Au Nicaragua, 34 personnes sont mortes en moins d'une semaine dans la répression des manifestations contre la réforme des retraites, dont le projet a depuis été abandonné.
Le dernier bilan pourrait encore s'alourdir. Une douzaine de blessés sont toujours dans un état grave et les ONG locales dénombrent au moins 16 disparus. La majorité des victimes sont des étudiants, à l'origine du mouvement de contestation.
Les témoignages sont rares, comme celui d'Ana Quiros, directrice du Centre d'information et de consultations médicales (Cisas), qui décrit les brutalités dont elle a été victime de la part de la police.
« Ils m’ont donné des coups avec une barre de fer sur la tête, dans le dos, sur les bras et les mains, raconte-t-elle. Ils m’ont ouvert la tête en deux endroits et m’ont fracturé la main. Alors que j’étais déjà blessée, ils ont continué à me tabasser et à me jeter des pierres ».
« Comme au temps de Somoza »
« Ensuite, j’ai passé plus d’une heure cachée dans un commerce avant de pouvoir sortir et aller à l’hôpital », poursuit Ana Quiros qui estime le nombre de morts à plus de 35 personnes, la plupart tombées sous les balles de la police, et à 300 le nombre de personnes arrêtées ou disparues.
« Certains ont raconté avoir reçu un traitement inhumain en prison, qu’on leur a rasé la tête comme du temps de Somoza [Anastasio Somoza Debayle, dictateur du Nicaragua de 1967 à 1979] puis qu’on les a abandonnés en sous-vêtements, en pleine rue, n’importe où », raconte encore Ana Quiros.
Le 24 avril, le président Daniel Ortega, ex-guérillero de 72 ans confronté à une vague de colère sans précédent depuis son arrivée au pouvoir il y a onze ans, a joué l'apaisement en libérant des dizaines d'étudiants arrêtés lors des manifestations et en levant la mesure de censure appliquée à une télévision locale.
Il a aussi cédé à la pression de la communauté internationale, inquiète du zèle des forces de l'ordre. L'Union européenne, les Etats-Unis et le Vatican ont critiqué la force excessive utilisée par la police. L'ONU a même affirmé soupçonner de possibles « exécutions illégales » et a demandé que des enquêtes soient menées sur ces décès.