Noix de cajou: renversement ou mauvaise passe?
C'est la désillusion pour les producteurs ouest-africains d'anacarde, après deux très belles années. Les transformateurs vietnamiens sont en difficulté et ils ont stoppé leurs achats. Les prix s'effondrent.
Renversement ou mauvaise passe pour la noix de cajou ? Depuis le mois d'avril les prix de la noix brute exportée par l'Afrique de l'Ouest dégringolent. La tonne expédiée en Asie pour y être décortiquée vaut aujourd'hui moins de 2 000 dollars, contre 2 400 dollars en décembre dernier, observe Public Ledger. Finie l'euphorie.
Faillite des usines vietnamiennes
La qualité de la noix de cajou africaine cette année n'est certes pas très bonne, reconnaît un expert de Rongead, mais le vrai problème est ailleurs. Les usines vietnamiennes de décorticage ont stoppé leurs achats, beaucoup d'entre elles sont au bord de la faillite. Elles ont acheté beaucoup trop, au prix fort, l'an dernier. Maintenant que la production mondiale est très abondante, en Asie comme en Afrique, les usines vietnamiennes ne peuvent plus répercuter leur coût de matière première dans leur prix de vente en Europe, aux Etats-Unis ou en Chine. Elles décortiquent à perte la noix de cajou et sont lâchées par les banques. Avec 65% des exportations le Vietnam est très touché, mais les usines indiennes ne vont pas beaucoup mieux.
Au moins 200 000 tonnes invendues en Côte d’Ivoire
L'arrêt des importations asiatiques fait évidemment tanguer le secteur de l'anacarde en Afrique de l'Ouest. Heureusement la majorité des producteurs ont vendu en début de campagne, quand les prix garantis (500 FCFA en Côte d'Ivoire, 650 FCFA au Bénin, 900 FCFA au Burkina Faso, 1000 FCFA en Guinée-Bissau et l'équivalent au Ghana) étaient respectés. Mais pour les autres, ceux qui avaient stocké en pensant que les prix allaient continuer à flamber, c'est la catastrophe. En Côte d’Ivoire au moins 200 000 tonnes, plus d'un quart de la production, n'auraient pas trouvé preneur. Dans ce pays comme au Bénin, la volonté de développer la transformation locale par une taxe à l'exportation se retourne cette année contre les producteurs : le prix du kilo de noix de cajou brute, déjà affaibli, en est réduit d'autant.
Transformation locale gagnante
Les gagnants dans cette histoire, ce sont les usines ivoiriennes ou béninoises qui ont démarré cette année. Elles peuvent se fournir en noix brutes à petit prix et certaines, même, situation inédite, à crédit ! Elles paieront les producteurs quand elles auront vendu les noix décortiquées. La transformation locale, de plus en plus appréciée par les acheteurs européens et américains, qui veulent plus de traçabilité, pourrait même contribuer in fine à stabiliser les prix au producteur. Car la chute actuelle des marchés asiatiques ne reflète pas le succès croissant de la noix de cajou au niveau mondial.
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