Avec notre correspondant Moscou, Étienne Bouche
Le souvenir de Beslan replonge les Russes au début des années 2000, à une période où les attentats terroristes se succédaient. Quinze ans plus tard, la rédaction du journal d’opposition Novaïa Gazeta revient sur les faits à travers un film documentaire.
La journaliste Olga Bobrova est à l’origine du projet. « Nous avons conscience qu’est apparue une nouvelle génération constituée de jeunes qui n’ont pas vuBeslanaux infos et qui n’ont pas la possibilité d’en entendre parler aujourd’hui à la télé, souligne-t-elle. Parce que croyez-moi, le 3 septembre, ce sera la quatrième, voire la cinquième actualité sur les chaînes fédérales et on se contentera d’évoquer les hommages aux victimes. C’est tout. »
Aucune chaîne publique n’a d’ailleurs accepté de donner accès à ses archives. Le pouvoir russe semble peu disposé à revenir sur ce passé de mauvais ton à une époque où la stabilité est la colonne vertébrale idéologique de l’État.
La reporter Elena Milachina est la meilleure connaisseuse de Beslan, elle était sur place en 2004 et y a vécu ensuite. Il s’agit, selon elle, du premier film racontant la vérité sur cette affaire.
« La Russie actuelle vient de Beslan, affirme-t-elle. C’est à ce moment-là que les gens ont renoncé à leur liberté en échange de la promesse de sécurité. Sauf qu’ils n’ont pas obtenu cette sécurité du pouvoir. »
Selon l’institut de sondages indépendant Levada, la moitié des Russes attribue la responsabilité de la tragédie aux terroristes. Un tiers estime que les services spéciaux russes partagent cette responsabilité.
En 2017, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) avait condamné la Russie à verser plus de trois millions d’euros à 409 requérants, anciens otages blessés et proches des victimes.