« Parle ! ». Un homme subit des tortures sur la chaise électrique. Les fils électriques entrent dans les oreilles. Malgré les tortures il persiste et signe : « Je ne dirai rien. » Ce sont des mots écrits sur des cartons qui parlent. On n'entend que l’orchestre qui joue dans la fosse. On est à Hollywood, en 1927.
George Valentin est la star de l’époque. Il ne se lasse pas de se faire applaudir par ses fans à la sortie. Peppy Miller, figurante est admiratrice, se retrouve par hasard à côté de lui et, du coup, fait aussi la pose pour les photographes. Le lendemain, elle se retrouve sur la Une de tous les journaux et commencent à tourner avec lui. Leurs destins basculent.
Le monde parle, maintenant
Deux ans plus tard, le krach de 1929 et la crise boursière ébranlent Hollywoodland. Le Kinograph-Studio arrête la production de films muets : « Le monde parle, maintenant. Les gens veulent des têtes qui parlent », assène le producteur.
George Valentin et Peppy Miller se croisent à nouveau, dans l’escalier de la maison de production. C’est elle qui se trouve sur la marche haute, lui en bas. Jeune et belle, elle deviendra avec Young and pretty la nouvelle star du cinéma parlant que George refuse obstinément. Il amorce alors une descente aux enfers.
Pour la vedette George Valentin, l’apparition du cinéma parlant est très violente. Personne ne veut plus « des acteurs qui font des grimaces pour se faire entendre. » Quand il est viré, il entend pour la première fois le bruit du verre d’eau qu’il pose sur la table. Et nous avec. A ce moment, le réalisateur Michel Hazanavicius fait parler son film sonore.
L'audace d'un film muet et moderne

Michel Hazanavicius a l’audace de faire un film muet moderne et divertissant : des acteurs rayonnants et des décors sublimes au service d'un scénario des années 1920 qui parle de notre époque. Il y a des effets spéciaux avec des acteurs en miniature et le facétieux petit chien Jack qui joue le troisième rôle principal. La belle musique de Ludovic Bourge, enregistrée avec 80 musiciens de l’Orchestre philharmonique de Flandres, laisse une place aux sons qui font des apparitions rares et réussies. La scène des claquettes a été dansée sur une musique de Cole Porter, mais finalement diffusée sur la partition de Ludovic Bourge avec exactement la même rythmique, grâce à la technologie moderne.
Dans The Artist, un film français tourné en anglais à Hollywood, il y a parfois une nostalgie palpable et certaines longueurs. Plusieurs fois, on a l’impression que le film est fini, mais le réalisateur persiste et trouve finalement une scène finale réussie, avec un grand BANG ! qui s’éclate sur un carton et dans nos oreilles. George Valentin est in extremis sauvé par Peppy Miller. Le film parlant vole au secours du film muet. Avec son retour dans le temps, Hazanavicius nous offre une nouvelle époque. Après la projection, les spectateurs frédonnent la mélodie du film : pam da da da da da, pam da da da da da... Chapeau l’artiste !