« Tu peux laisser derrière toi ce qui te poursuit, mais pas ce qui se passe en toi ». C’est par ce proverbe rwandais que commence Rising From Ashes. Ce documentaire américain, consacré à l’équipe cycliste du Rwanda, a été présenté à Paris ce 8 juillet 2013 au siège de l’Unesco, en plein Tour de France.
Pendant 82 minutes, Rising From Ashes (« renaître de ses cendres » en anglais) raconte le parcours de jeunes cyclistes rwandais qui ont, pour la plupart, perdu de la famille durant le génocide de 1994. Un groupe entraîné depuis 2006 par Jock Boyer, le premier Américain à avoir disputé le Tour de France.
La caméra suit leur quotidien, leurs galères mais surtout leur joie de rouler dans un pays qui a pourtant été ravagé par la guerre. Le tout avec les commentaires de l’Américain Forest Whitaker, Oscar 2007 du meilleur acteur pour The Last King of Scotland.

Un projet taillé pour en faire un film
L’histoire de Rising From Ashes est belle. Et pour cause : l’idée du film est née en même temps que l’équipe rwandaise. « En 2005, un ami, Dan Cooper, m’a raconté qu’il avait vu des talents incroyables au Rwanda, explique le réalisateur T.C. Johnstone. Puis j’ai rencontré un type nommé Tom Ritchey qui était l’inventeur du Mountain Bike (le vélo tout terrain ou VTT, Ndlr). Nous sommes allés tous les trois au Rwanda pour observer ces talents incroyables. Et nous nous sommes alors demandé : ‘Qu’est-ce que ça donnerait un film sur l’équipe cycliste du Rwanda ?’ Nous nous sommes ensuite dit que Jock Boyer serait un entraîneur incroyable. Et c’est comme ça que l’histoire a commencé ».
Au départ, le réservé Jock Boyer n’est pourtant guère emballé par le projet : « On m’a emmené au Rwanda en 2006. Quand on a décidé de tester des coureurs, T.C. Johnstone a dit qu’on allait faire un film sur le sujet. Et moi, je n’étais pas du tout d’accord avec ça. Ça coûtait beaucoup d’argent et moi je préférais utiliser cet argent pour les coureurs et pour l’équipe. […] Je n’étais pas du tout d’accord avec ce film pendant les deux premières années. »
Le tournage de Rising From Ashes a au final duré plus de six ans : de la genèse du Team Rwanda à la participation d’Adrien Niyonshuti, l’un des coureurs, aux Jeux olympiques de 2012 à Londres. Le tournage a parfois été difficile, à cause de la distance, de la barrière de la langue et de la curiosité constante du public rwandais.
Mais le jeu en valait la chandelle, estime aujourd’hui Jock Boyer : « Ça a changé beaucoup de choses. Le film offre plus d’attention à notre projet. On a emmené deux coureurs pour faire la présentation de Rising From Ashses aux Etats-Unis. Les coureurs ont visité plusieurs écoles. Ils ont vu [...] que l’impact de ce film était très fort et très important. [...] Ça les a rendus très fiers. »
Le réalisateur T.C. Johnstone décrypte le succès de Rising From Ashes : « Le message du film ne porte pas sur le cyclisme. Il parle de paix et de réconciliation. Le vélo était un incroyable moyen d’envoyer un message, de raconter cette histoire et de parler du Rwanda, un pays qui a une image violente. C’était une manière de montrer que cette histoire n’est pas celle que le grand public s’imagine. Ça permet de montrer le Rwanda tel qu’il est vraiment. »
Rising From Ashes est aussi une histoire d’amitié entre deux hommes : Jock Boyer et Adrien Niyonshuti. En 2006, Boyer sort tout juste de prison après avoir été condamné pour agression sexuelle sur mineur. Niyonshuti, lui, a perdu une soixantaine de membres de sa famille dans le génocide de 1994. L’ex-coureur professionnel s’attache progressivement au jeune Rwandais dont il décèle le potentiel. Niyonshuti considère en retour l’Américain « comme un frère et un père ».

Avec tous ces ingrédients, Rising From Ashes aurait pu virer au mélodrame. Mais TC Johnstone, le réalisateur, a veillé à ce que ne ce soit pas le cas. « Réaliser ce film impliquait de raconter cette histoire de manière honnête, explique-t-il. Ce que vous voyez est une représentation honnête des souvenirs des coureurs ».
Les membres du Team Rwanda dévoilent avec beaucoup de pudeur et de retenue leur drame. Ils semblent presqu'aussi avares en mots sur le sujet que généreux en coups de pédales. Et c'est peut-être l’aspect le plus émouvant de Rising From Ashes.
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