RDC

En un an, le M23 s’est forgé une place centrale dans le conflit en RDC

Sultani Makenga (g.) à Goma, le 20 November 2012, après la prise de la ville par le M23.
Sultani Makenga (g.) à Goma, le 20 November 2012, après la prise de la ville par le M23. Reuters/James Akena

Le M23 a fêté son premier anniversaire ce lundi 6 mai lors d’une cérémonie tenue à Rutshuru dans le Nord-Kivu. Depuis sa création, le M23 n’a pas fait beaucoup de conquêtes territoriales, mais s’est affirmé comme un acteur principal du conflit. Il a montré sa puissance en occupant la ville de Goma en novembre 2012. Depuis, face à ce mouvement, le gouvernement de Kinshasa et les Nations unies oscillent entre la menace d’un règlement militaire et l’espoir d’un accord de paix.

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Il y a un an, par un communiqué adressé aux journaux congolais, le lieutenant-colonel Vianney Kazarama annonçait la création du M23. Ce n’était pas que l’acte de naissance d’un simple groupe armé de plus dans la nébuleuse politico-militaire des provinces de l’est. Très vite, le M23 allait bouleverser le paysage politique et sécuritaire du Nord-Kivu.

L’apparition du M23 est intervenue après la fuite du général Bosco Ntaganda, qui avait la mainmise sur la région en vertu des accords du 23 mars 2009 entre le gouvernement et la précédente rébellion du CNDP. Pourtant, officiellement, le M23 n’a jamais reconnu Bosco Ntaganda comme l’un des siens. Poursuivi par la Cour Pénale Internationale pour crimes de guerre, il risquait d’entacher la réputation du mouvement. C’est donc son adjoint, le colonel -aujourd’hui général - Sultani Makenga qui prenait la direction militaire du mouvement. La direction politique était confiée à Jean-Marie Runiga, un pasteur autrefois proche du président Kabila.

Démonstration de force

Des bouleversements se sont succédés depuis un an. Jean-Marie Runiga, jugé trop proche de Bosco Ntaganda, a été chassé avec ses hommes du M23 à coups de canon. Il s’est réfugié au Rwanda. Bosco Ntaganda, lui, a dû se rendre à la CPI pour avoir la vie sauve. Sultani Makenga reste le chef militaire, tandis que la direction politique est désormais assurée par l’ancien porte-parole, Bertrand Bissimwa.

Six mois après sa création, en novembre 2012, le M23 a fait une démonstration de force en chassant l’armée gouvernementale de Goma. En quelques heures, ce mouvement a fait la preuve de la faiblesse de Kinshasa et également des Nations unies. La Monusco avait assisté, impuissante, à la prise de la capitale du Nord-Kivu. À partir de là, le gouvernement de Kinshasa acceptait des négociations qui devaient s’ouvrir à Kampala un mois plus tard, sous l’arbitrage du gouvernement ougandais.

Négociations au point mort

Depuis le 6 décembre 2012, ces négociations piétinent. La médiation ougandaise ne parvient pas à faire avancer les parties au-delà d’un premier point, qui consiste simplement à constater les désaccords.

Le M23 demande toujours l’amnistie et l’intégration de tous ses hommes dans l’armée congolaise et des prérogatives sur la région des Nord et Sud-Kivu. Des revendications politiques se sont ajoutées, au premier rang desquelles la « vérité des urnes » après les élections présidentielles et législatives contestées de 2011, un gouvernement de transition vers de nouvelles élections, etc.

À Kinshasa, l’opposition défiante

Malgré ses revendications, calquées sur celles de l’opposition congolaise, le M23 n’a pas réussi à attirer des ralliements de la classe politique à Kinshasa, hormis celui du député pro-Tschisekedi Roger Lumbala, seul à avoir rejoint le mouvement. À Kinshasa, beaucoup reprochent au M23 d’être « la marionnette du Rwanda » et de ce fait, de ne pas sincèrement défendre les intérêts du peuple congolais.

Il y a dix jours, le M23 a rapatrié les membres de sa délégation de Kampala vers Bunagana, la « capitale politique » du mouvement, à la frontière entre la RDC et l’Ouganda. Le mouvement exige maintenant la signature d’un cessez-le-feu avec Kinshasa avant de reprendre les pourparlers.

Les Nations unies menaçantes

De fait, il n’y a plus de combat depuis longtemps entre l’armée gouvernementale et le M23. Cependant, la création par les Nations unies d’une « brigade d’intervention » pourrait changer la donne. Le mandat de cette nouvelle unité de casques bleus lui permettra d’être offensive en s’attaquant directement aux groupes armés.

Dans cette perspective, le M23 préfère rappeler qu’il est toujours en négociation dans le but de signer un accord avec le gouvernement. Une manière de s’épargner à l’avance des coups que pourrait lui infliger cette brigade onusienne lorsqu’elle sera opérationnelle, dans quelques mois.

Le M23 s’est également adressé aux leaders politiques des pays fournissant des hommes dans cette nouvelle brigade - Tanzanie, Malawi, Afrique du Sud - en leur signifiant les risques qu’ils prenaient à venir combattre en RDC. Ce sont surtout les Sud-Africains qui pourraient être sensibles à cet argument, après la perte d’au moins 13 soldats lors de la prise de Bangui en Centrafrique.

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