RDC: Vital Kamerhe attend son sort, ses lieutenants donnent de la voix

Condamné l'année dernière à 20 ans de travaux forcés pour notamment détournement de près de 60 millions de dollars dans le cadre d’un programme présidentiel d’urgence, Vital Kamerhe, l’ancien directeur de cabinet du président congolais Félix Tshisekedi, attend le verdict de la cour d'appel de Kinshasa-Gombe. 

En première instance, Vital Kamerhe avait été condamné à 20 ans de travaux forcés et dix ans d'inéligibilité.
En première instance, Vital Kamerhe avait été condamné à 20 ans de travaux forcés et dix ans d'inéligibilité. REUTERS/Baz Ratner
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De notre correspondant à Kinshasa,

Vital Kamerhe avait été condamné in sodium avec deux autres personnes : le Libanais Jammal Samih, patron des entreprises Samibo Congo SARL et Husmal, qui avaient bénéficié des marchés de gré-à-gré de livraison et de construction des maisons préfabriquées dans le cadre du programme dit de « 100 jours » du président Tshisekedi ; et Jeannot Muhima Ndoole, le chargé du service import-export de la présidence. 

Après avoir organisé plusieurs marches à travers le pays, les lieutenants et militants de Vital Kamerhe attendent désormais son acquittement. « Rien que son acquittement », soutient Billy Kambale, le nouveau secrétaire général de l’Union pour la nation congolaise (UNC), parti de Kamerhe.

Le procès en appel, ouvert depuis juillet 2020 avant de sombrer dans un suspense procédural, a pris fin au début du mois avec la fin des plaidoiries, en l'absence de Vital Kamerhe et de ses avocats, qui avaient quitté la salle d’audience. 

La cour venait de rejeter la récusation des juges sollicitée par Daniel Shangalume Nkingi, alias Massaro, le neveu poursuivi par un autre tribunal, mais dans le cadre de la même affaire. Selon l’acte d’accusation, il lui est reproché d'avoir « sollicité ou accepté directement ou indirectement un avantage indu, pour lui-même ou pour autrui, afin d’abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire gagner des marchés publics en violation de la procédure d’appels d’offres et des seuils fixés par la législation en matière de passation des marchés publics par voie de gré à gré ». 

L’enjeu de ce procès en appel est d’obtenir la levée non seulement de la lourde condamnation qui pèse sur Vital Kamerhe, mais aussi de casser tous les jugements associés. Plusieurs personnes non impliquées dans le procès ont en effet vu leurs biens saisis, comme l’épouse de Kamerhe, Amida Chatur, ou encore sa fille Soraya Mpiana. 

Les avocats de l’ancien patron de l’administration Tshisekedi restent confiants même s’ils n’avaient pas participé aux plaidoiries. « Nous avions déjà soulevé tous les moyens et les motifs d’appel devant les juges. Nous attendons un acquittement, rien de plus », résume Me Joseph Guhanika, le coordinateur du collectif des avocats de Kamerhe. 

« Une machination »

À la tête de l’administration du parti, Billy Kambale est exaspéré, car pour lui, « ce procès n’a été qu’une spéculation sur les maisons préfabriquées. Le ministère public n’a jamais apporté la moindre preuve de la culpabilité de notre président. Le temps étant le meilleur allié de la vérité, on est parti de 400 000 dollars détournés, 260 millions de dollars jusqu’à atterrir à 57 millions. Toute une machination qui s’était mise en place pour monter l’opinion contre Vital Kamerhe ». Pour Billy Kambale, son leader « a effectivement été victime de quelque chose que nous ne maîtrisons pas jusqu’aujourd’hui ». 

Une avalanche de preuves apparue après la condamnation au premier degré devraient permettre l’acquittement de Kamerhe, estime-t-il encore, parlant des stocks de maisons préfabriquées qui moisissent dans différents ports et des pays qui se seraient plaints. 

« Nous avons la foi en Dieu et nous en appelons au président de la République : c’est le moment de remettre cet innocent dans ses droits, on ne peut pas sacrifier un acteur politique majeur et incontournable comme Vital Kamerhe avec ce mal jugé », insiste Billy Kambale, qui affirme que l’UNC « lèvera des options ». « Ce procès n’a jamais été équitable que ce soit au premier degré ou au second degré, dans le déroulé et dans tout ce que nous avions évoqué comme dysfonctionnements », affirme encore Kambale. 

Mais depuis le début de la salve de procès anticorruption sous Tshisekedi, la cour d’appel sort des jugements sans complaisance. Elle a souvent alourdi les peines de première instance.

Condamnés à 20 ans de travaux forcés, Kamerhe et le Libanais Sammal Jamih ne se sont pas présentés devant la cour pour ce procès en appel sous tension. Les deux hommes sont officiellement malades. Kamerhe, également condamné à 10 ans d’inéligibilité une fois sa peine de prison exécutée, est toujours pris en charge dans une structure sanitaire de Kinshasa, selon ses avocats et ses lieutenants.

Si les audiences lors du procès au premier degré avaient été retransmises de bout en bout sur les écrans de la télévision d’État (RTNC), aucune audience du procès en appel n’a été couvert par la presse, toutes les demandes d’accréditation étant systématiquement rejetées par le tribunal qui juge pour la première fois de l’histoire du pays un acteur politique condamné alors qu’il était encore directeur du cabinet présidentiel.

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