Crise politique en Tunisie: le parti Ennahdha prêt à des élections anticipées
Après son limogeage par le président dimanche, Hichem Mechichi, désormais ex-Premier ministre tunisien, s'est dit prêt à céder le pouvoir. Quant au principal parti au Parlement, Ennahdha, qui le soutient, il dénonçait un coup d'État, mais à l'issue d'un bureau politique qui s'est tenu cette nuit, il serait prêt à présent à des élections anticipées.
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Le parti Ennahdha, principal parti au Parlement, se dit prêt « à la tenue d'élections législatives et présidentielle anticipées simultanées pour garantir la protection du processus démocratique, et ce, précise Ennahdha, afin d'éviter que tout retard ne serve de prétexte au maintien d'un régime autocratique. » Le parti islamiste continue néanmoins de dénoncer « un coup d'État contre la Constitution et les institutions. » Le chef de file du parti, Rached Ghannouchi, a campé pendant douze heures ce lundi devant le Parlement, bouclé par l'armée, pour en réclamer l'accès.
Le premier parti au Parlement avec 52 sièges, doit désormais compiler sans sa principale tribune: l'Assemblée, dont les activités ont été suspendues par la Présidence, explique notre correspondante à Tunis, Lilia Blaise. Un coup dur pour le parti, qui a vu sa côte de popularité chuter ces derniers mois, accusé par une partie de la population de mauvaise gouvernance, et d’être responsable des maux économiques et sociaux que traversent le pays depuis 2011.
Ras-le bol
Ennahda réitère également son appel à un dialogue national pour sortir le pays de la crise politique, sociale, économique et sanitaire. Une manière de sauver la face et de se replacer dans l'échiquier politique selon le politologue Selim Kharrat. Le parti, au pouvoir depuis 2011, est en effet de plus en plus critiqué par une partie de la population.
Le parti a pris part à la majorité des gouvernements depuis la révolution et il cristallise aujourd’hui le sentiment de ras-le bol à l’égard de la classe politique. Le leader du parti islamiste Rached Ghannouchi, président de l’assemblée, qui a dénoncé la prise de pouvoir de Kaïs Saied comme un coup d’état, tente aujourd’hui d’arrondir les angles en proposant un dialogue national avec les autres forces politiques et la présidence pour restaurer la légitimité parlementaire, d’après un communiqué.
Le parti se dit même prêt à aller vers des élections anticipées si besoin. Fragilisé, Il tente alors ce qu’il fait à chaque crise politique depuis 2011 : un appel au dialogue et à respecter les acquis démocratiques, plutôt que la riposte violente. Pour le moment, Kais Saied n’a pas répondu à cet appel.
Consultations
Signe d'un début de consultations, le président Kaïs Saïed rencontrait lui, hier soir, des membres de l'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), influente centrale syndicale qui lui apporte son soutien ainsi que des représentants de la Ligue des droits de l'homme et du patronat. Il continue d'affirmer que ses décisions sont conformes à la Constitution. Plus tôt dans la journée, le président limogeait le ministre de la Défense Ibrahim Bartagi et la porte-parole du gouvernement Hasna Ben Slimane, également ministre de la Fonction publique et ministre de la Justice par intérim.
De son côté, pour sa première prise de parole depuis l'annonce de son limogeage, le Premier ministre Hichem Mechichi accepte la décision du chef de l'État, Kaïs Saïed de le limoger. « J'assurerai la passation de pouvoir à la personne qui sera désignée par le président de la République », a-t-il déclaré.
Une situation économique plombée par le Covid-19
La récente flambée des cas de la pandémie a mis sous les projecteurs l'étendue de la crise économique que traverse la Tunisie : manque de matériel médical et d’oxygène, hôpitaux saturés...
Le pays a bénéficié de la solidarité internationale, notamment d’oxygène et de 500 000 doses de vaccins de la part de la France pour accélérer sa campagne. Des tonnes de matériel médical sont également arrivés du Proche-Orient et de pays voisins comme l’Algérie et l’Égypte.
Pas suffisant pour calmer la grogne des Tunisiens qui battent le pavé pour critiquer le manque d'anticipation face à la pandémie. L’ampleur de la nouvelle vague de contaminations au Covid-19 dépasse visiblement les capacités de la Tunisie à faire face. Cette flambée au cœur de l’été a anéanti tout espoir d’une reprise du tourisme, qui représente en temps normal 12% du PIB.
L’année dernière déjà, la Tunisie a enregistré une récession de 8,8%, c’était déjà la conséquence de la pandémie de Covid-19. La dette publique du pays représente aujourd'hui plus de 100% de PIB.
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