Brésil: Altamira, la ville-champignon du Barrage de Belo Monte
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Au cœur de l’Amazonie brésilienne, Belo Monte sera bientôt le troisième plus grand barrage au monde. Son chantier, pharaonique, emploie plus de 15 000 ouvriers, qui y travaillent 24h/24. Bientôt 500 km² de forêt amazonienne seront inondés. Et quelque 16 000 personnes expulsées, en grande majorité des indigènes. La polémique que suscite ce gigantesque barrage est à la hauteur de son coût : près de 9 milliards d’euros. Depuis des mois, les associations de protection de l’environnement et des indigènes qui vivent sur la zone prochainement inondée sont mobilisées. Mais le chantier avance inexorablement. Et non loin, la ville d’Altamira ne cesse de croître. De 50 000 habitants, il y a quelques années, elle abrite aujourd’hui plus de 160 000 personnes. Rien ou presque n’a été prévu pour faire face à l’afflux de travailleurs et d’émigrés. Le trafic de drogue, les meurtres et la prostitution ont explosé.
Depuis l'ouverture du chantier en 2011, la prostitution a explosé à Altamira. En début de mois, lorsque la paie tombe, plusieurs milliers d'ouvriers déferlent sur la ville. Poussées par la misère, des mineures travaillent dont des conditions proches de l'esclavage moderne dans certaines maisons de passe. La ville a grandi trop vite et le nombre de crimes est exponentiel. Le trafic de crack a envahi les favelas. Faute d’effectifs suffisants, les policiers de l’unique commissariat en charge des 160 000 habitants d’Altamira sont impuissants à endiguer le phénomène.
Malgré des conditions de travail très dures, les émigrés qui viennent ici tenter leur chance continuent d'arriver à Altamira. Les 15 000 ouvriers du barrage multiplient les actions de protestation, mais le constructeur, Norte Energia, se montre intraitable. Et en dépit de l'opposition des Indiens, le chantier avance. « On sait bien qu'on ne peut pas empêcher la construction du barrage, c'est un projet du gouvernement fédéral. Nous luttons pour obtenir une indemnisation » argumente un représentant de la tribu des Kayapos. Car il s’agit bien d’une bataille entre le gouvernement fédéral, qui soutient que le barrage de Belo Monte pourra générer plus de 10 % de l’électricité dont le Brésil aura besoin d'ici à 2020, et les autorités régionales de l’État du Pará, qui exigent en retour la réhabilitation des zones dégradées par la retenue d’eau. Marcello Salazar, directeur de l'Institut socio-environnemental d'Altamira craint que « ce qui se passe ici va se reproduire ailleurs en Amazonie… D'un côté, il y a énormément d'argent et de personnes qui travaillent sans relâche, mais de l'autre, les projets sociaux et les d'alternatives économiques pour les Indiens, les bûcherons et la nouvelle population, tardent à être mis en place ». En attendant que les premières turbines commencent à tourner d'ici à deux ans, les habitants de la région, amers, en paient le prix fort.
Pour en savoir plus :
- Le site du mouvement mouvement Xingu Vivo
- Le site de l’Institut Socio-Environnemental (lSA)
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