Chronique des médias

Royaume-Uni: Boris Johnson et la post-vérité

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Boris Johnson vient d’obtenir une solide majorité à la chambre des communes et qui entretient des relations étroites avec les médias, notamment la presse.

Boris Johnson.
Boris Johnson. REUTERS/Lisi Niesner
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Les images ont fait le tour de tous les écrans : Boris Johnson aux commandes d’un bulldozer pulvérisant un mur de briques anti-Brexit en polystyrène. Ridicule, grotesque ? Voilà bien une question qui n’atteint pas Boris Jonhson. L’important est que cela marque les esprits, que ce soit efficace, et peu importe que ce soit vrai ou pas. Le Guardian a raconté récemment qu’il avait prétendu, dans un discours retransmis sur Sky News, construire 40 hôpitaux et embaucher 20 000 policiers supplémentaires, ce qui est totalement faux. Ou bien que le plan de son adversaire travailliste Jeremy Corbyn consistait à dépenser 1 200 milliards de livres sterling et à s’opposer à la propriété privée. « Jamais, en trois décennies, je n’ai vu autant de mensonges d’un politicien de haut niveau », écrivait en novembre le journaliste du Guardian Peter Oborne, en regrettant que la présentatrice de Sky News ne cherche même pas à le contredire. Y compris quand il accuse Corbyn d’être du côté de la Russie alors même que son gouvernement refuse de publier un rapport sur les dons d’hommes d’affaires russes au parti conservateur.

Le mensonge, c’est plus qu’une seconde nature pour Boris Johnson. C’est en quelque sorte le moteur de son ascension. Entre 89 et 94, correspondant à Bruxelles du Daily Telegraph, il invente des directives sur la taille réglementaire des préservatifs ou des cercueils, sur la courbure des bananes, sur l’interdiction des crevettes de cocktail... Très vite nommé rédacteur en chef adjoint, il a donné à la presse britannique conservatrice, et notamment au Times sous l’emprise de Rupert Murdoch, une tonalité de plus en plus anti-européenne qui a préparé le Brexit. En somme, le « bouffon Boris », comme on l’appelait alors, disait ce qu’une grosse partie de l’opinion voulait entedre, les tabloïds l’ont donc suivi sur ce qu’on appelait les euro-mythes. Et cela l’a rendu célèbre.

Aujourd’hui, Boris Johnson se retrouve totalement dans le concept de post-vérité cher à Donald Trump. Tout est bon, depuis des faux sites web attribués aux travaillistes jusqu’aux coups bas les plus tordus comme un compte Twitter des Tories transformé en site de vérification des faits ou des publicités sur Facebook – mensongères à 90% selon First Draft. Les médias ont, une fois de plus été la caisse de résonnance d’une orchestration grossière et les réseaux sociaux des relais efficaces. La question est maintenant de savoir si les chaînes publiques comme Channel 4 qui l’avait remplacé par un bloc de glace qui fond, pour dénoncer son absence à un débat sur le climat, ne vont payer leur impertinence. La licence de la chaîne arrive à échéance en 2024.

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