Union européenne

Les vingt-sept Etats de l'Union européenne se penchent sur l’évasion fiscale

François Hollande à son arrivée au sommet européen de Bruxelles du 22 mai.
François Hollande à son arrivée au sommet européen de Bruxelles du 22 mai. AFP PHOTO / GEORGES GOBET

La lutte contre l'évasion fiscale est au menu du sommet européen qui s'ouvre à Bruxelles ce mercredi 22 mai. Dans sa lettre d’invitation, le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, a souligné qu’il veut profiter des dernières affaires politiques pour traiter de ce fléau. L'Europe semble peut-être décidée à parler d'une seule voix, mais la partie est loin d'être gagnée.

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Ce n'est pas la première fois que le dossier est abordé au niveau européen. Mais les choses évoluent rapidement et l'Europe veut aller plus loin en adoptant une résolution commune. C'est l'avis du président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, qui sur son compte Twitter avait assuré qu'il voulait profiter de « l’élan politique » suscité par les derniers scandales.

Cela n’est pas sans rappeler l'affaire Cahuzac en France. Ou les révélations de l'OffshoreLeaks, dossier mené par un consortium international de journalistes d'investigation qui a divulgué les noms de personnalités actionnaires de sociétés dans des paradis fiscaux.

Les recettes manquent

Si l'évasion fiscale des particuliers indigne les citoyens, c'est surtout celle des entreprises qui pèse sur l'économie. Les pays ont besoin de recettes pour faire face à la crise de la dette et à la récession. Or, 1000 milliards d'euros par an manquent dans les caisses des Etats européens à cause de cette évasion fiscale organisée. Soit l'équivalent du PIB de l'Espagne.

« C’est un facteur d’injustice sociale » pour tous ceux qui payent leurs impôts, estime Bruno Colmant professeur à l'Université catholique de Louvain en Belgique. Le fondement de l’impôt, c’est son caractère redistributif. « On pourrait tous payer un peu moins d’impôt, si tous nous payions mieux d’impôt ». L’Europe veut harmoniser la fiscalité entre ses pays membres, mais elle n’est pas allée suffisamment loin dans ce processus. « On a plutôt laissé la concurrence fiscale entre pays se développer ». Finalement, la volonté d’harmonisation est là. Ce qui implique d’aborder de manière directe le problème de la fraude et de l’évasion.

La fin du secret bancaire ?

En 2009, au niveau mondial, la liste noire des paradis fiscaux a été établie. Pour en sortir, les pays ont dû adopter des accords d'échanges d'information fiscale les obligeant à lever le secret bancaire, si une demande de renseignement leur était adressée. Ils ont aussi passé certains accords entre eux. Selon l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), une trentaine de pays ont déjà suivi ce processus.

Et qu’en est-il des Européens ? Dans leur majorité, ils soutiennent la proposition de loi visant à généraliser l'échange automatique d'informations à toute l'Union européenne. Le Luxembourg a annoncé qu’il rejoindrait le dispositif en 2015, renonçant ainsi en partie à son secret bancaire. L’Autriche fait la résistance en Europe. Pour Bruno Colmant « inéluctablement ce pays devra procéder au transfert des informations, parce que la notion de sphère privée en matière monétaire et en matière patrimoniale est en train de disparaître. Les dettes publiques des pays explosent. Il faudra considérer un prélèvement sur les patrimoines accumulés des citoyens pour rembourser ces dettes ».

Vers l’union budgétaire et fiscale

On essaie de bâtir une union budgétaire et fiscale en Europe. Et dans ce cadre avoir une transparence fiscale semble incontournable. C'est dans cette optique que l’on pourrait qualifier de fédéraliste que cinq pays, dont la France, demandent l'instauration d'un « FATCA européen », à l'image de cette loi américaine qui devrait permettre à Washington d'obtenir les informations sur les comptes bancaires des contribuables américains à l'étranger.

Cela pose quelques problèmes réglementaires, estime Eric Delannoy, vice-président du cabinet Weave, « adapter les systèmes d’information et l’ensemble des procédures de gestion de clients à cette nouvelle loi imposée par les Etats-Unis coûte très cher. Cela se compte en centaines de millions d’euros. On est aussi face à un problème légal, puisque cette demande du fisc américain vis-à-vis des banques étrangères peut contrevenir à des règles fiscales et légales du pays en question ».

Malgré cela, les Etats-Unis disposent d’un avantage, celui de peser sur les institutions financières. Aujourd’hui, l’Europe n’est pas en mesure de contraindre les établissements financiers qui ne respecteraient pas sa demande. Or, la loi obligeant les entreprises à payer l'impôt là où se crée la valeur pourrait être un premier pas vers cette union fiscale dont rêvent les Européens.

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