Russie / Serbie

La Serbie joue la carte russe pour faire avancer ses négociations avec l’Union européenne

Tomislav Nikolic (g.), le président de la Serbie, serrant la main à Vladimir Poutine, le président russe, à Sotchi, le 24 mai 2013.
Tomislav Nikolic (g.), le président de la Serbie, serrant la main à Vladimir Poutine, le président russe, à Sotchi, le 24 mai 2013. REUTERS/Misha Japaridze

Alors que le Premier ministre serbe Ivica Dacic a mené durant deux jours de difficiles négociations à Bruxelles avec son homologue kosovar Hashim Thaçi, le président Tomislav Nikolic, lui, était vendredi 24 mai à Sotchi, en Russie, où il a signé un «accord de partenariat stratégique» avec Vladimir Poutine. La Serbie confirme ainsi l’importance de ses liens privilégiés avec la Russie.

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Qu’il s’agisse de la question du Kosovo ou du gazoduc South Stream, les relations russo-serbes sont toujours au beau fixe. Il y a un an, à peine élu, le président Tomislav Nikolic s’était rendu à Moscou pour assister au congrès de Russie unie, le parti de Vladimir Poutine, et le maître du Kremlin devrait se rendre avant la fin de l’année à Belgrade.

Le document paraphé vendredi par les deux présidents réaffirme la convergence de vue entre la Serbie et la Russie sur de nombreux dossiers stratégiques de premier ordre. La Russie a réaffirmé son opposition de principe à l’indépendance du Kosovo. Pour ceux qui savent lire entre les lignes, ce document représente aussi un feu vert de Moscou au dialogue engagé par Belgrade avec Pristina sous l’égide de l’Union européenne. A condition, bien sûr, qu’une éventuelle reconnaissance de l’indépendance proclamée par l’ancienne province serbe en 2008 ne soit pas exigée.

Une coopération russo-serbe avec un volet économique

Le document signé par les deux présidents affirme aussi que Moscou continuera à « encourager » les investissements russes en Serbie. Pour l’instant, les investissements privés demeurent relativement limités. Mais le gazoduc South Stream, qui doit acheminer le gaz russe, passera par la Serbie, et Vladimir Poutine a confirmé que son pays allait investir 1,7 milliard de dollars pour la construction du tronçon serbe du gazoduc, tout en injectant 1,5 milliard de dollars supplémentaires dans NIS, l’entreprise serbe de distribution de pétrole et de gaz, rachetée par Gazprom.

Par ailleurs, la Russie va investir la bagatelle de 800 millions de dollars dans la modernisation des chemins de fer serbes. Enfin, Moscou apporte aussi une aide financière directe à Belgrade. Début avril, la Russie a accordé un prêt de 500 millions de dollars à la Serbie, dont la première tranche de 300 millions doit être versée début juin. Alors que les finances publiques serbes sont grevées par les dettes et que le pays bénéficie d’un accord-cadre avec le FMI, ce prêt russe représente une véritable bouffée d’oxygène.

Jeu d'équilibriste

Le nouveau gouvernement serbe, au pouvoir depuis un an, est formé par d’anciens nationalistes devenus de fervents europhiles. Belgrade espère obtenir au mois de juin une date d’ouverture de ses négociations d’adhésion européenne, et c’est au nom de cette perspective européenne que le pays a accepté de difficiles compromis sur le Kosovo.

Toutefois, l’accord signé à Bruxelles début avril ne prévoit pas une reconnaissance formelle de l’indépendance du Kosovo et Belgrade, tout en donnant des gages aux Européens, compte bien sur le soutien de ses alliés traditionnels - en premier lieu la Russie et la Chine - pour ne pas être obligée de franchir cette « ligne rouge ».

En somme, en affirmant son engagement européen tout en cultivant l’amitié russe, la Serbie continue à jouer un subtil jeu d’équilibrisme. Le soutien russe permet à Belgrade de renforcer sa position auprès des Européens, alors que ces derniers craignent de voir la Serbie basculer dans l’orbite de Moscou. En somme, les dirigeants serbes excellent toujours dans l’art délicat qui consiste à ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier.

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