La République serbe de Bosnie vote un processus de retrait des institutions fédérales
Le Parlement des Serbes de Bosnie a lancé, vendredi 10 décembre, un processus controversé de retrait des institutions communes du pays, malgré les mises en garde de l'Occident. Les représentants serbes ont donné au gouvernement fédéral un délai de six mois pour organiser ce départ de trois institutions cruciales de l’État central : l'armée, la justice et les impôts.
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Le membre serbe de la présidence de Bosnie, Milorad Dodik, 62 ans, avait annoncé une session parlementaire extraordinaire, un jour historique pour l'entité serbe de Bosnie. Dodik, un nationaliste élu en 2018 à la présidence collégiale d'un pays dont il souhaite ouvertement la disparition, utilise systématiquement son pouvoir pour saper ou bloquer les institutions du pays, rapporte notre correspondant à Belgrade, Laurent Rouy.
Depuis cet été, il rejette une loi de négation des génocides, selon lui anti-serbe, et s'est lancé dans une fuite en avant pour obtenir la sécession de l'entité qu'il représente. Mais à l'automne, l'Europe et les États-Unis, voyant un risque de retour de la guerre dans les agissements de Milorad Dodik, le menacent de sanctions économiques.
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Le Parlement de l’entité serbe de Bosnie a approuvé la motion sur le processus de retrait des institutions fédérales par 49 voix sur 83 sièges. Le vote a été boycotté par les partis de l’opposition qui dénoncent une manœuvre politicienne qui plonge le pays dans une période d’instabilité dangereuse.
Une décision non contraignante
Du coup, la session parlementaire d'hier, annoncée comme une rupture, n'aboutit au final que par une décision non contraignante de sortir, peut-être dans six mois, de l'armée et de l'administration fiscale communes, mais la Republika Srpska - qui dispose d’une large autonomie au sein d’un État décentralisé et divisé selon des lignes de fractures ethniques - a, de facto, ouvert la voie à une sécession.
Bien que de faible portée, le vote a été condamné de toutes parts, y compris par l'opposition serbe. Mais Dodik a eu son débat et sa petite victoire. Reste à voir si ce nouveau rebondissement décidera, les chancelleries occidentales à mettre en place les sanctions annoncées. Washington, Paris et Londres ont en tout cas dénoncé une nouvelle escalade qui menace la stabilité de la Bosnie Herzégovine mais aussi de toute la région.
La Bosnie-Herzégovine est une république fédérale multipartite au fonctionnement politique très spécifique. Il s'agit d'un régime parlementaire, où le Conseil des ministres est le chef du gouvernement. Le pouvoir exécutif est exercé par le gouvernement formé par une présidence tripartite tandis que le pouvoir législatif fédéral est partagé entre le gouvernement et le Parlement.
La Bosnie-Herzégovine est divisée en deux entités : la Fédération de Bosnie-et-Herzégovine et la République serbe de Bosnie, toutes deux disposant de leur propre Constitution.
Suite aux accords de Dayton de 1995 et afin de représenter toutes les minorités qui composent l'État fédéral, la présidence de la Bosnie-Herzégovine comprend trois membres, en accord avec l'article V de la Constitution. Un président bosniaque et un président croate sont tous deux élus par le peuple de la Fédération ; et un président serbe, qui est actuellement Milorad Dodik, est élu par le peuple de la République serbe de Bosnie. Leur mandat est de quatre ans. Chacun d'entre eux assure à tour de rôle les fonctions de président de la présidence pour une durée de huit mois.
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