Journée internationale de la femme

Centenaire 14-18 : femmes dans la guerre, à l'assaut de leurs droits

Cette Journée internationale de la femme est l’occasion de mesurer le chemin parcouru par les femmes en un siècle, depuis la Grande Guerre. Travailleuses, les Françaises l’étaient déjà avant 1914. Institutrices, domestiques, tisseuses, certes, mais la plupart des femmes qui avaient un emploi l’exerçaient à la ferme ou dans un commerce, autrement dit, elles « aidaient » leur mari. Dès 1914, les hommes partis au front, les femmes vont suppléer la main d’œuvre manquante et investir le monde du travail.

En avril 1916, des femmes soudent des pièces d'obus dans une usine d'armement française.
En avril 1916, des femmes soudent des pièces d'obus dans une usine d'armement française. GETTY/Culture Club/Hulton Archive
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On nous présente souvent la période de la Grande Guerre comme étant celle où les femmes françaises sont entrées sur le marché du travail et ont investi l’espace public. En réalité, le mouvement avait commencé avant le conflit. Ainsi, dès le milieu du XIXe siècle, des femmes seront employées dans les usines, surtout textiles, qui se multiplient. 

Munitionnettes

Au début de la Grande Guerre, ce sont déjà 7,2 millions de femmes (36 % de la population active) qui travaillent, en majorité dans l’industrie, le commerce et la domesticité, mais aussi comme dactylos, sages-femmes ou institutrices. C’est en 1900 que sont diplômées les premières femmes médecins, avocates et professeures agrégées ; Marie Curie sera la première femme professeure à la Sorbonne en 1906.
 

Appel aux femmes françaises du président du Conseil, en août 1914.
Appel aux femmes françaises du président du Conseil, en août 1914.

Quand survient la mobilisation en août 1914, toute l’activité économique est bouleversée : 60 % des emplois d’avant-guerre disparaissent et de nombreuses femmes se voient privées du salaire de leur mari. Cependant, tout le monde veut croire que le conflit sera vite et bien réglé. Mais, rapidement on déchante, les hommes, les poilus, sont partis pour longtemps et les femmes doivent les remplacer à la fois dans l’industrie de guerre, où on les surnomme les munitionnettes, les transports et aux champs…

C’est sur un ton martial que le président du Conseil René Viviani appelle dès le mois d’août les Françaises du monde rural : « Debout femmes françaises, jeunes enfants, filles et fils de la Patrie. Remplacez sur le champ du travail ceux qui sont sur le champ de bataille ! ». Il s’agit alors de se substituer toutes affaires cessantes aux millions d’hommes mobilisés juste au moment des récoltes. « Outre leurs occupations traditionnelles (basse-cour, potager), les agricultrices devenues souvent chefs d’exploitation, doivent exécuter des travaux habituellement assumés par des hommes ».  

Un accélérateur

« Ouvrières, paysannes ou infirmières, les femmes sont au cœur du conflit, même si l’historiographie récente privilégie les cultures de guerre, la souffrance des hommes, les deuils et les privations des civils », remarque l’historienne Michelle Zancarini-Fournel*. Le fait est là, durant quatre ans et bien au-delà notamment pour les 600 000 veuves et leurs 760 000 orphelins, les femmes sont au four et au moulin !

« Une fois la guerre terminée, en novembre 1918, les femmes ont été "démobilisées" des usines de guerre (les veuves exceptées) même si elles ont été réembauchées quelques mois plus tard », explique l’historienne. Entre 1911 et 1921, les femmes qui travaillent sont en nombre constant, 7,2 millions. Peut-on dire pour autant que la guerre n’a rien changé au statut des femmes de l’époque ? Pour Michelle Zancarini-Fournel on ne peut pas plus l’affirmer que le contraire, à savoir que la guerre peut « être considérée comme une véritable rupture qui aurait représenté l’entrée des femmes dans les industries et les bureaux ». Pour elle, « la guerre a été en fait un accélérateur pour le travail des femmes [dans ces secteurs]». Ni plus, ni moins. De même qu'elle a été une opportunité pour affirmer le féminsme en marche.

La légitimité du travail des femmes demeurera malgré tout un combat de longue haleine. « La démobilisation, explique Michelle Zancarini-Fournel, s’accompagne de discours critiques sur l’émancipation des femmes et d’un éloge de la ménagère et des mères. Le devoir de repeuplement de la France paraît urgent après quatre années de combats. L’histoire de l’entre-deux guerre montre cependant que les femmes ont été sourdes aux appels natalistes de tous ordres ». Mais, malgré le rôle majeur qu’elles ont pu avoir durant la Grande Guerre, il faudra attendre 1944 pour que les femmes françaises obtiennent le droit de vote. Leurs voisines britanniques pourront, elles, voter dès 1918.

*Combats de femmes 1914-1918 Les Françaises, pilier de l’effort de guerre, dirigé par Evelyne Morin-Rotureau. Ed ; Autrement 

**La vraie histoire des femmes de 14-18, par Franck et Michèle Jouve. Ed. Chronique

→ A consulter également, notre dossier spécial : «Femmes d'ici, femmes d'ailleurs: paroles d'exilées»

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