Raif Badawi: l’épouse du blogueur demande l’aide de la France
Ensaf Haidar, la femme du blogueur saoudien Raif Badawi, était à Paris ce vendredi pour demander à la France de soutenir la libération de son mari. Il avait été condamné en 2014 à 1 000 coups de fouet, dix ans de prison et l’équivalent de 226 000 euros d’amende pour avoir créé en 2006 un forum de discussion en ligne dans lequel il demandait la fin de l’influence religieuse dans la vie quotidienne. Une première séance de 50 coups de fouets, en janvier dernier, avait suscité un tollé international et entrainé la suspension de la sentence.
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En tournée en Europe (Norvège, Allemagne, Pays-Bas, Belgique, France) Ensaf Haïdar, réfugiée depuis 2013 au Canada avec ses enfants, est venue témoigner à Paris de la situation de son époux Raif Badawi qu’elle espère voir libéré au plus vite. Ensaf Haidar a quitté l’Arabie saoudite en 2012, quelques mois avant l’arrestation de son mari à cause des pressions devenues trop fortes. Elle s’est rendue au Caire puis à Beyrouth et enfin au Canada où elle a obtenu l’asile avec ses trois enfants.
Depuis la condamnation de Raif Badawi en 2013 et la première séance de 50 flagellations en public le 9 janvier, Ensaf Haidar est très inquiète. Deux fois par semaine, elle arrive à lui parler au téléphone. « La cellule dans laquelle est enfermé Raif compte 13 à 14 prisonniers. Evidemment, la situation y est très mauvaise, il n’y a aucune activité physique, la nourriture et son état de santé sont très mauvais, mais je n’en dirai pas plus, car je crains que mes déclarations aient un impact négatif sur les conditions de détention de Raif. »
Campagne de soutien internationale
Amnesty International et Reporters sans Frontières (RSF) soutiennent Raif Badawi depuis qu’il subit des pressions en 2006 lorsqu’il a créé le forum de discussion Liberal Saudi Network dans lequel il critiquait les excès de l’influence religieuse dans la société saoudienne. Récompensé par RSF qui lui a octroyé le Prix 2014, et considéré comme prisonnier d’opinion par Amnesty International, Raif Badawi fait l’objet d’une campagne de sensibilisation emblématique de ce que subissent des dizaines d’autres blogueurs.
Selon son épouse Ensaf Haidar, ces actions sont aussi importantes pour son moral. « Moralement, bien sûr, lorsqu’il y a des réactions internationales, de personnalités ou de gouvernements, cela nous donne un peu d’espoir, cela lui remonte le moral, mais quand Raif regarde la réalité, elle est très sombre : c’est quelqu’un qui est loin de ses enfants, qui en restera encore loin pendant encore dix ans, et cela fait déjà trois ans que lui et ses enfants sont séparés. »
Libérez Raif Badawi pour « raisons humanitaires »
La peine de 1 000 coups de fouet à l’encontre de Raif Badawi a été suspendue à la demande d’un comité de médecins, mais elle n’est pas levée. Ce vendredi, Ensaf Haidar a terminé à Paris une tournée européenne pour sensibiliser l’opinion publique et surtout les gouvernements européens afin qu’ils interpellent les autorités saoudiennes sur le cas de son mari pour des raisons humanitaires. « Ma démarche n’est pas de faire pression sur Riyad, mais de communiquer sur un cas humanitaire, celui de mon mari qui a toujours prôné la paix et la liberté, et qui manque aujourd’hui cruellement à sa famille », a-t-elle insisté.
Ce vendredi, Ensaf Haidar devait rencontrer des responsables du ministère français des Affaires étrangères. « Ma demande est très simple : je demande au gouvernement français qu’il communique avec le gouvernement saoudien pour que Raif Badawi soit libéré et qu’il puisse sortir d’Arabie saoudite. »
Selon RSF et Amnesty International, la France, qui a renforcé ses relations bilatérales avec l’Arabie saoudite avec la signature de contrats importants, se contente de soutenir la liberté d’expression sans prendre ouvertement position sur le cas des blogueurs emprisonnés et de Raif Badawi en particulier. L’Arabie saoudite, de son côté, refuse toute ingérence dans ses affaires intérieures. Le pays qui a comptabilisé 90 exécutions capitales au cours des cinq premiers mois de l’année, tente même de se faire élire à la présidence du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, en décembre prochain. Ensaf Haidar espère, quant à elle, que le nouveau roi Salmane choisira de gracier Raif Badawi et tous les prisonniers d’opinion à l’occasion du mois de ramadan qui débute le 18 juin prochain.
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