Syrie: Bachar «l'indestructible»
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L'opposition syrienne se réunit à Istanbul ce jeudi 23 mai pour décider de son éventuelle participation à une conférence internationale, en présence du régime. L'objectif de cette réunion, si elle a lieu, est de trouver une issue au conflit syrien qui dure depuis plus de deux ans et qui a fait au moins 94 000 morts. D'autant plus que, pour l'instant, Bachar el-Assad n'est pas près de partir.
« Démissionner, ce serait fuir », a déclaré Bachar el-Assad dans un entretien, samedi 18 mai, à l’agence de presse officielle argentineTelam et au quotidien Clarin. Un Bachar el-Assad qui donne toujours cette image d'homme calme et déterminé, répétant qu'il est la victime du terrorisme et d'un complot international.
Bachar el-Assad est « enfermé d’une façon maladive dans une idée de lui comme étant le Dieu ou le seigneur de la Syrie », selon Paolo Dall’Oglio, un prêtre jésuite qui a vécu trente ans en Syrie et qui a été expulsé l'an dernier pour ses prises de position en faveur de l'opposition syrienne.
Celui qui s’était destiné à une carrière d’ophtalmologiste à Londres a pris la succession de son père Hafez el-Assad à la tête de la Syrie en 2000, uniquement parce que son frère aîné Bassel, l’héritier naturel, est mort dans un accident de voiture. Mais Bachar s’est apparemment attaché à l’exercice du pouvoir.
Il semble aussi poursuivre l’œuvre sinistre de son père dans la répression de l’opposition comme ce fut le cas à Hama en 1982, contre les Frères musulmans.
« Un clan jusqu’au-boutiste »
Depuis le début de la révolution syrienne en mars 2011, Bachar el-Assad ne semble pas fléchir. Son clan « est jusqu’au-boutiste, car il n’a pas d’alternative. Il a renoncé au dialogue au début, il a renoncé aux réformes, donc il n’y a plus rien à négocier, même la sortie du pouvoir », analyse Paolo Dall’Oglio.
Il faut dire aussi que le contexte actuel est plutôt favorable à Bachar el-Assad. Militairement, le régime semble gagner du terrain, comme l’a démontré la bataille de Qousseir, ces derniers jours. Le régime a repris la plupart des quartiers de cette ville stratégique qui mène à la région côtière où vivent la plupart des alaouites, la communauté à laquelle appartient Bachar el-Assad, région où il pourrait se retrancher au cas où le conflit tournerait en sa défaveur.
L’armée syrienne continue d’être fidèle au régime, « il n’y a pas eu de défections massives », rappelle Frédéric Pichon, universitaire spécialiste de la Syrie, ni d’intervention internationale, « du fait du blocage de la Russie et du fait qu’aucun pays actuellement n’est en mesure de faire une no fly zone(zone d'exclusion aérienne) ou d’intervenir ».
Le soutien de la Russie et de l’Iran
Si Bachar el-Assad résiste aussi bien, c’est également parce qu’il continue de recevoir le soutien de la Russie et de l’Iran. « Il y a sans doute plusieurs milliers de pasdarans iraniens présents et qui combattent aux côtés du régime syrien, et puis le Hezbollah libanais s’est illustré récemment à Qousseir, poursuit Frédéric Pichon. D’autre part, la Russie fournit du matériel (…) en défense antiaérienne et économiquement, Moscou achète du pétrole brut et vend du pétrole raffiné à des prix cassés au régime. »
Dans son entretien à la presse argentine, Bachar el-Assad a lié son sort à celui de son peuple. Il y a une élection présidentielle en 2014, à laquelle il n'exclut pas de se représenter. Le prêtre de la rébellion Paolo Dall'Oglio dénonce un « maquillage démocratique ». Selon lui, « les élections en Syrie, c'est du rêve, pire c’est du théâtre. Ça n’a aucun sens ! A ce moment-là, il sera réélu président de la Syrie à 90 %. »
Frédéric Pichon estime, pour sa part, qu’organiser des élections présidentielles dans un contexte de guerre civile n’est pas réaliste. « Si elles sont organisées, prédit-il, on pourra douter de la sincérité de ce scrutin. »
Reste cette conférence internationale proposée par la Russie et les Etats-Unis et qui devrait se tenir en juin à Genève. Le sort de Bachar el-Assad pourrait être décidé à ce moment-là. Mais la tenue de cette conférence est conditionnée à la participation des deux parties au conflit, ce qui n'est pas encore acquis.
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