Les médias ont des difficultés à appréhender le mouvement des antivax qui manifestent ce samedi à Nantes. Faut-il leur donner la parole ? Les ignorer au nom de la santé publique ? Ces questions font débat dans les rédactions…
Les médias donnent-ils trop la parole aux antivax ? En mai dernier, le site du Point organisait déjà un « vote » sur ce sujet. Résultat : six internautes sur dix pensaient qu’en effet, on entendait trop ces antivax qui bien souvent sont connectés à des mouvances politiques, parfois complotistes, en tout cas relevant de la contestation antisystème. Mais voilà que mardi, l’entretien « Face aux lecteurs » du Parisien d’Emmanuel Macron, a remis cette population très minoritaire sur le devant de la scène avec la fameuse phrase « j’ai très envie d’emmerder les non-vaccinés » et son corollaire : un déni de citoyenneté pour ceux qu’il juge « irresponsables ».
Emmanuel Macron, en principe président de tous les Français, pensait sans doute davantage aux antivax qu’aux non vaccinés, ces 20 % de la population qui peuvent ne pas être vaccinés pour des motifs divers sans nécessairement rejeter le vaccin. Mais le fait est qu’il a réussi à obtenir ce qu’il cherchait : un clivage entre une majorité qui pense comme lui et une toute petite minorité qui refuse le vaccin et fait ainsi peser sur les hôpitaux la très lourde charge de supporter la vague Omicron.
Dès lors, il y a ceux qui considèrent qu’il faut traiter les antivax a minima, et avec des pincettes, tant ils sont susceptibles de dissuader la vaccination avec leurs infox, et ceux qui pensent qu’il faut montrer qui ils sont, ce qu’ils pensent. D’un côté, on trouve par exemple Frédéric Filloux, journaliste et professeur associé à Science Po, qui s’en est pris à France Inter sur Twitter pour avoir donné la parole à un non-vax qui « raconte sa vie d'emmerdé, ses pots entre amis non-vax, son emprunt d'un QR code pour aller faire de la gym ». Bref, dit-il, un « abruti que la journaliste ne prend pas la peine de contredire ». De l’autre, France Inter, bien sûr, qui a déjà fait intervenir en direct des anti-vaccins sur son antenne. Sa directrice Catherine Nayl rejetait en juillet toute stigmatisation des antivax et toute « brutalité scientifique qui s’imposerait de façon descendante ».
Désormais, il est important d’entendre, de suivre des antivax, pour savoir jusqu’où ils sont « emmerdés », comme dit Macron, avec leurs faux certificats de vaccin et leurs faux passes sanitaires. Important d’entendre aussi leur colère qui peut agréger d’autres colères, comme on l’a vu avec les Gilets jaunes. En même temps, il ne faut pas rentrer dans le piège d’une instrumentalisation politique des antivax en leur conférant trop d’importance. C’est sans doute ce qu’espèrent certains antivax, mais aussi peut-être le pouvoir pour montrer que la responsabilité est de son côté.
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