Qu'est-ce que l'écofascisme dont est accusé le défenseur des baleines Paul Watson?
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Le fondateur de l'ONG Sea Shepherd, invité en France à la Fête de l'Huma, a été conspué ce week-end par des militants de la gauche radicale. Pourquoi l'ont-ils traité d'écofasciste ? Quels sont les ressorts de l'écofascisme, l'écologie d'extrême droite ?

« Paul Watson n’est pas un camarade ! » Le slogan, scandé par des militants de la gauche radicale, a perturbé samedi 13 septembre à la Fête de l’Huma, près de Paris, l’intervention d’une icône de l’environnement, Paul Watson. Il était passé par la case prison pour sa défense des baleines. On l’a même traité d’« écofasciste », un terme réservé à l’écologie d’extrême droite. Un terme d’ailleurs qu’on entend souvent à droite contre la gauche écologiste qui voudrait imposer des restrictions pour lutter contre la crise climatique.
Ce qu’il est reproché à Paul Watson ? Certaines déclarations sur l’immigration ou les femmes, ainsi que certaines fréquentations. « Paul Watson est effectivement un militant qui sauve des baleines, mais qui est également proche de pleins de personnalités d’extrême droite, affirme ainsi une jeune militante antifasciste dans une vidéo enregistrée à la Fête de l’Huma et postée sur les réseaux sociaux. C’est quelqu’un qui fréquente Brigitte Bardot, condamnée à de multiples reprises pour incitation à la haine raciale. Mais vu qu’elle sauve des animaux, ça peut être une camarade… »
Suffit-il de fréquenter Brigitte Bardot pour être écofasciste ? La réponse est un peu plus compliquée. « L’écofascisme, c’est une conception de l’écologie qui va valoriser une forme d’harmonie entre une communauté humaine et son territoire d’appartenance, définit l’universitaire français Antoine Dubiau, auteur d’un livre intitulé Ecofascismes (éditions Grévis). Le but de l’écologie serait de préserver cette harmonie quoi qu’il en coûte. C’est une forme de justification écologique du rejet de toute forme d’immigration. »
Une idéologie « blanche »
Il est justement reproché à Paul Watson certaines positions sur l’immigration, mais il s’en est défendu, affirme rejeter « toutes les frontières », et dénonce plutôt l’exploitation de la main d’œuvre immigrée aux États-Unis. En revanche, il est indéniable que Paul Watson, qui préfère les animaux aux humains, est malthusien, du nom de l’économiste britannique Thomas Malthus, qui plaidait pour une limitation des naissances face aux ressources limitées de la planète. Une théorie qui est reprise par les écofascistes. Pour eux, la surpopulation est une menace, même si c’est un malthusianisme à dimension variable.
« Ils sont plutôt malthusiens pour le reste du monde, mais plutôt natalistes pour leur propre culture, leur propre civilisation, leur propre identité, précise Antoine Dubiau. Ils vont plutôt défendre le fait que "les blancs" doivent faire plus d’enfants et continuer à se reproduire, et plutôt critiquer la surpopulation du reste du monde et des "non-blancs et non-blanches". Pourtant, si on rapporte l’empreinte écologique par habitant, les pays occidentaux sont très largement responsables du ravage écologique. »
L’écologie d’extrême droite, c'est le culte de la nature, d'un territoire et de racines menacés par l'étranger. L'écofascisme légitime les inégalités, puisque dans la nature certaines espèces seraient supérieures aux autres.
Des « écolo-conservateurs » qui existent « depuis très longtemps »
Il n’y a donc pas qu’à gauche que l’on défend l’environnement. Pour paraphraser la célèbre réplique de Valéry Giscard d’Estaing face, à François Mitterrand (« Vous n’avez pas le monopole du cœur »), la gauche n’a pas le monopole des fleurs. Par nature, l'écologiste est conservatrice. Il y avait même un courant pro-environnement au sein du parti nazi.
« Certes, la gauche est la première famille politique qui s’est appropriée pleinement la question écologique, devenue un sujet central dans la plupart des organisations de gauche aujourd’hui, constate Antoine Dubiau, chercheur à l’université de Genève. Il se trouve que des penseurs écolo-conservateurs, il y en a depuis très longtemps, parfois même depuis plus longtemps que ceux de la gauche écologiste. Mais l’écologie d’extrême droite, ce n’est pas la même chose que l’écologie de gauche. » Il y a en effet des nuances de taille. Le tueur de l’attentat de Christchurch en Nouvelle-Zélande (51 morts dans une mosquée en 2019) se revendiquait « écofasciste ».
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