COP30: peut-on encore respecter les limites de température de +1,5°C et +2°C?
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Dix ans après l'Accord de Paris, l'un des objectifs de hausse de la température mondiale semble désormais impossible à atteindre. Le sommet mondial sur le climat à Belém pourrait au moins permettre de limiter la casse climatique.

Ils ne sont pas sortis d’un chapeau, pour faire joli ou pour faire peur. Non, ces deux chiffres clé dont on parle depuis dix ans dès qu’il s’agit du climat, 1.5°C et 2°C, ces limites de hausse de température fixée par l’accord de Paris, relèvent de la science et de l’avenir de l’humanité, de notre civilisation.
Il faut d’abord rappeler à quoi correspond cette augmentation de température : par rapport à la température du globe au 19e siècle, avant la révolution industrielle, quand l’humanité commence à émettre, en masse, du CO2, le principal gaz responsable du réchauffement climatique. Et ce sont des limites à ne pas dépasser à la fin de ce siècle.
Chaque dixième de degré compte
Au-delà de 2°C, il deviendra difficile de s’adapter, de continuer à vivre comme avant, selon le diagnostic du Giec, les experts du climat. « L’idée de l’accord de Paris, c’est de prendre des mesures pour que les jeunes d’aujourd’hui puissent s’adapter au changement climatique dans la seconde partie de ce siècle et au-delà », résume le climatologue Jean Jouzel, vice-président du Giec au moment de l’accord de Paris. Cette limite de 2°C faisait consensus à la COP21. La limite de 1,5°C, elle, a été imposée par les États insulaires, en première ligne face au réchauffement climatique. « Ils ont fait le forcing pour avoir une limite à 1.5°C, et ils ont argumenté sur le fait qu’ils étaient particulièrement exposés avec la montée du niveau des mers», rappelle Françoise Vimeux, climatologue à l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
Dans cette histoire, celle de l’avenir de l’humanité et au-delà de l'ensemble du vivant, chaque degré compte, et même chaque dixième de degré. Chaque dixième en moins peut sauver des vies. « Dans un monde à +2°C, tous les récifs coralliens auront disparu ; à +1.5°C, “seulement” 70 %, explique par exemple Françoise Vimeux. En termes d’élévation du niveau des mers, dans un monde à +1.5°C, c’est 10 cm d’élévation en moins, et ce sont environ 10 millions de personnes en moins exposées au risque de cette montée des eaux comme l’érosion côtière, la disparition de territoires et les submersions marines. »
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Illusoire, impossible
Mais aujourd’hui, dix ans après l’accord de Paris, le réchauffement s’est tellement accéléré que la plupart des climatologues ont déjà fait une croix sur la limite de 1.5°C. « C’est illusoire, dit ainsi François Vimeux, de l’IRD. Si on veut rester sur une trajectoire qui nous ramènerait vers 1.5°C, on n’a plus que trois ans d’émissions de gaz carbonique au rythme actuel. On voit bien que c’est impossible, confirme Jean Jouzel. C’est une vingtaine d’années si on voulait revenir vers 2°C ; ça reste possible. Il faut maintenir l’objectif, même si on sait qu’il ne pourra pas être respecté pour 1.5°C. J’espère qu’il est encore possible qu’il soit respecté pour arriver autour de 2°C. »
Selon la trajectoire actuelle des émissions de gaz effet de serre, on s’approcherait, à la fin du siècle, de +3°C. Un monde pratiquement impossible. « À 3°C, des régions deviendront pratiquement invivables. Pendant une partie de l’année, les conditions de température et d’humidité seront telles qu’il sera impossible de vivre normalement en extérieur, d’aller travailler, de faire du sport, etc. Le message est très clair sur la capacité d’adaptation et la vulnérabilité des populations, en particulier dans les régions tropicales et équatoriales », souligne Jean Jouzel. C’est l’un des objectifs de la COP30, de ces deux semaines qui viennent à Belém, au Brésil : limiter la crise climatique à 2.4 ou 2.5°C. Sans les COP, on serait, à la fin du siècle, à +4°C.
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