Reportage Afrique

Maurice: les plages de l'île risquent de disparaître dans 50 ans [5/7]

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Deux phénomènes liés au changement climatique inquiètent les scientifiques mauriciens. La température a augmenté de 1,36 C° déjà dans l’île et l’érosion des plages s’accélère, au point qu’elles pourraient disparaître dans 50 ans. Pour gagner du temps, Maurice a engagé de grands travaux d’ingénierie il y a trois ans. Objectif : protéger 14 kilomètres de côtes et des villages. Mais dans certains endroits, le déplacement des habitants est désormais envisagé par les autorités.

A Bel Ombre, au sud-ouest de Maurice, des digues ont été érigées pour stopper l’érosion et protéger la route et les habitations.
A Bel Ombre, au sud-ouest de Maurice, des digues ont été érigées pour stopper l’érosion et protéger la route et les habitations. © Abdoollah EARALLY / RFI
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Pour certains habitants qui ont profité de génération en génération d’une maison à proximité de la mer, aussi modeste soit-elle, cette vie ne sera qu’un souvenir dans les prochaines décennies.

Sabeena Ramma, une habitante de Saint-Martin, au sud-ouest de Maurice, assiste impuissante à l’élévation du niveau de la mer juste devant sa porte : « Tous les proches, quand ils viennent chez moi, ils disent wow ! Quel bel endroit pour habiter. Pied dans l’eau, wow ! Je leur réponds, venez quand la mer est démontée ».

Ici, non seulement la mer avance, mais elle est plus imprévisible encore. Sabeena et ses deux voisins devront tôt ou tard aller chercher refuge ailleurs. Selon les données du ministère de l’Environnement, ces 45 dernières années, de 1987 à 2020, la mer s’élève d’environ 5 millimètres par an. C’est nettement plus que la moyenne mondiale de 3,6 millimètres.

Des solutions artificielles peu adaptées

L’impact est pleinement visible dans la localité. À la lisière de Saint-Martin, à Bel Ombre, le décor du littoral a changé. Des blocs de pierre ont remplacé le sable pour protéger la route côtière et les habitants. Une plage artificielle a été aménagée. Pas forcément la meilleure approche, estime l’océanographe Vassen Kauppaymuthoo. « Quelle est la solution pour Maurice ? Mettre des murs de roche et créer une plage artificielle comme la plage sur laquelle je me trouve, qui est formée de calcarénite, des roches qu’on a écrasé pour créer des grains de sables, ou il y a des solutions plus basées sur la nature ? Aujourd’hui, la plupart des scientifiques s’accordent à dire qu’il faut des solutions basées sur la nature. »

Le scientifique mauricien propose la plantation de mangroves et lianes, plus résistantes pour lutter contre l’érosion sur le littoral. Vassen Kauppaymuthoo, également ingénieur en environnement, appelle à planter des coraux en mer pour briser les vagues et au final recréer un écosystème durable. La méthode est appliquée à Mont Choisy, une plage très fréquentée durement affectée par l’érosion.

Plusieurs millions d'euros de travaux réalisés

Les travaux enclenchés depuis 2019 partout à travers l’île ont coûté 9 millions d’euros déjà, selon Ramchurn Seenauth, chef du département responsable de la gestion des zones côtières au ministère de l’Environnement. « La plupart des fonds proviennent du budget national. On a eu l’assistance du fond d’adaptation du protocole de Kyoto pour effectuer des travaux sur la plage de Mont Choisy dans le nord où on a placé des récifs artificiels », explique-t-il.

La température à Maurice a augmenté de 1,37 C° durant les 70 dernières années. Les scientifiques s’inquiètent que le seuil dévastateur de +2 C° n'arrive plus vite que prévu.

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