Ça fait débat avec Wathi

Investir dans l’avenir des jeunes filles pour accélérer les transformations positives de nos sociétés

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Ça fait débat avec Wathi. Gilles Yabi, Wathi a organisé le 8 mars 2023 une table ronde en collaboration avec la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, sur le thème de l’autonomisation des jeunes filles. Pourquoi s’intéresser en particulier aux jeunes filles ?

Gilles Yabi, responsable du Think-tank Wathi
Gilles Yabi, responsable du Think-tank Wathi © Samuelle Paul
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Parce que les germes de la discrimination à l’égard des femmes commencent dès la petite enfance et que les options de vie pour une grande partie des filles sont très vite restreintes. Malgré des progrès notables, les inégalités restent énormes entre filles et garçons. Le vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, Ousmane Diagana, a rappelé que près de six filles sur dix en Afrique de l'Ouest et du Centre ne fréquentent toujours pas l'école secondaire, deux filles sur dix ont leur premier enfant alors qu'elles sont encore adolescentes. Évidemment, ce sont aussi largement les filles des milieux sociaux les plus défavorisés qui ont le moins de chances d’échapper aux pièges qui se dressent précocement sur leur chemin.

En 2013, la Banque mondiale a conçu un projet axé sur l’autonomisation économique des femmes et le dividende démographique au Sahel, connu sous l’acronyme SWEDD en anglais. Ce projet a été étendu à plusieurs pays au-delà du Sahel : Bénin, Cameroun, Côte d'Ivoire, Guinée, en plus du Mali, du Burkina Faso, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad. Avec des résultats probants. Au Niger par exemple, les filles reçoivent une allocation annuelle pour l'alimentation et le logement, ce qui leur permet de trouver des familles d'accueil plus proches de leur école. Cela a réduit le décrochage scolaire de 53%. Il n’y a pas de doute sur l’utilité d’investissements comme celui-là. Je parle à dessein d’investissements et pas de dépenses sociales, parce qu’il s’agit bien d’un investissement précieux.

Des gouvernements de la région font des efforts conséquents dans ce domaine depuis quelques années, à l’instar du Nigeria et du Bénin dont les ministres ont participé à la discussion...

Tout à fait. Pour Pauline Tallen, ministre des Affaires féminines et du développement social au Nigeria au sein du gouvernement sortant, l’autonomisation des filles est la chose la plus intelligente à faire sur le plan économique. Ne pas investir dans l’éducation et la formation des filles, c’est se priver de la moitié au moins du potentiel économique d’un pays. L'initiative appelée AGILE, soutenue par la Banque mondiale au Nigeria, a permis à plus de 20 millions de jeunes filles et de mères de bénéficier d’un accès à des services de santé sexuelle et reproductive et à des formations pour faciliter leur insertion économique.

Participant également à la discussion, le ministre d’État béninois chargé du développement et de la coordination de l’action gouvernementale, Abdoulaye Bio Tchané, a partagé l’expérience du Bénin où plusieurs réformes et programmes ont permis de s’attaquer aux discriminations à l’égard des filles. La création d’un Institut national de femme a constitué une innovation, permettant un ancrage institutionnel pour toutes les questions relatives aux conditions des filles et des femmes. Il a aussi cité le développement des cantines scolaires et les programmes visant l’amélioration de l’accès à l’eau potable dans les zones rurales qui contribuent de manière indirecte mais essentielle à l’autonomisation des filles. Ce sont en effet elles qui sont toujours les premières mobilisées pour les tâches domestiques, qui manquent des heures d’enseignement et qui finissent par être retirées de l’école.

Parmi vos invités, une jeune entrepreneure camerounaise qui forme des filles aux métiers de l’informatique et des technologies avec une passion contagieuse…

Passion pour les technologies, pour l’économie numérique, pour le travail... Elle a livré un puissant message pour que les filles croient en elles et prennent toute leur place dans l’économie et dans la société. Arielle Kitio Tsamo a fondé un centre de formation et incubateur technologique, qui a déjà formé près de 6 800 enfants en codage informatique, robotique et intelligence artificielle. Elle a rappelé l’impératif de l’engagement politique pour améliorer les infrastructures qui sont indispensables pour un développement encore plus rapide et inclusif de l’économie numérique. On sort d’une discussion comme celle-là avec une motivation décuplée pour continuer à imposer dans le débat public une question aussi vitale pour l’avenir de nos sociétés, celle de l’égalité des chances entre les filles et les garçons, quels que soient leurs lieux de naissance.


► La table ronde virtuelle à voir ici : Les jeunes filles actrices de la transformation économique en Afrique de l'Ouest et du Centre

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