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L’invasion limitée des perruches à collier

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Introduite par accident, la perruche à collier, originaire des pays chauds, ne passe plus inaperçue dans les grandes villes européennes. Un oiseau exotique qui prolifère, même si une étude publiée en France se montre rassurante sur cette invasion.

Une perruche à collier, en milieu urbain.
Une perruche à collier, en milieu urbain. Getty Images/Sandra Standbridge
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C’est à une idée reçue que l’université de Paris-Saclay vient de tordre le cou : la perruche à collier, un oiseau exotique qui a envahi l’Europe, n’est pas le concurrent impitoyable des espèces autochtones qu’on redoutait jusqu’ici. Le constat pourrait étonner, tant la perruche à collier est apparue invasive ces dernières années. A Bruxelles, Copenhague, Paris ou Séville, elle est partout. Très facilement reconnaissable, grâce à son chant, plus proche du cri, crispant. Et grâce à son plumage vert, et parfois son collier rouge ; chez les perruches, seuls les mâles portent des colliers…

À Paris, la perruche à collier est évidemment visible, et audible, dans les deux bois de l’est et de l’ouest, Vincennes et Boulogne. Elle a gagné du terrain, jusqu’à squatter des endroits beaucoup moins densément arborés : l’allée de platanes devant le musée du Quai-Branly, ou le petit square Boucicaut face au Bon Marché.

Mais comment a pu arriver jusqu’ici cet oiseau vivant en Asie et en Afrique, du Sénégal au Soudan ? L’histoire commence dans les années 1970, dans les aéroports parisiens d’Orly et de Roissy. Pour la plupart importées d’Inde, les perruches à collier sont alors un des oiseaux exotiques de compagnie préférés des Occidentaux. Mais à l’aéroport, en zone de transit, des perruches réussissent à s’échapper de leurs cages. Un mâle et une femelle suffiront à perpétuer l’espèce. Et à la propager dans toute la région, jusqu’à atteindre la capitale. Le même scénario a été démontré à Londres, même si une légende attribue plutôt la paternité des rose-ringes parakeet londoniennes à Jimi Hendrix, qui aurait un jour relâché un couple de perruches. La veuve du musicien depuis a démenti.

Deux perruches parisiennes sur une mangeoire du bois de Vincennes.
Deux perruches parisiennes sur une mangeoire du bois de Vincennes. RFI/Florent Guignard

Dans les platanes pour nicher et se nourrir

Retour à nos perruches parisiennes. Elles vivent pour beaucoup dans deux grands « dortoirs » situés près des aéroports de Roissy et d’Orly où elles avaient débarqué. Et à l’image des banlieusards qui prennent le RER, chaque jour elles prennent les airs jusqu’aux parcs parisiens, comme celui des Buttes-Chaumont, où en avait retrouvé début mars Frédéric Mahler, de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), venu en voisin, sous l’un des platanes préférés des perruches à collier.

Mais pourquoi les platanes ? La perruche à collier est une espèce cavicole, qui niche dans des trous, et à cet égard, le platane est un arbre idéal pour abriter une maternité. Frédéric Malher a pris ses jumelles, l’indispensable appareil de l’ornithologue. « Là, j’en vois une… tout en haut...  C’est un oiseau qui niche très tôt dans le printemps, et là apparemment, les œufs sont déjà pondus. Enfin je ne suis pas allé vérifier ! »

Le platane sert à nicher, mais aussi à manger. La perruche raffole de ses fruits. « Je n’avais jamais vu un oiseau manger des marrons, le fruit du marronnier. Les perruches en mangent ! C’est vrai, poursuit l’ornithologue, l’œil un brin ironique, que les jardiniers du château de Versailles n’étaient pas contents, parce que leur récolte de prunes, une fois, y est passée. C’est très triste, mais ce n’est pas encore un problème économique ! » Pas comme en Inde, ou en Israël, où les perruches à collier menacent des cultures et peuvent dévorer des récoltes entières. En Israël, les perruches s’attaquent aux champs de tournesol. Et en Inde, on a signalé une invasion sur des champs de pavot ; les oiseaux, devenus accros à la drogue, venaient chaque jour récupérer leur dose.

Une population éradiquée aux Seychelles

À Paris, même si pisttacula krameri, son nom latin, squatte allègrement les mangeoires du Jardin des plantes destinées aux mésanges ou aux moineaux, elles ne semblent pas trop entrer en concurrence avec ces familles d’oiseaux plus petits. C’est ce qu’a mis en évidence l’étude publiée par l’Université de Paris-Saclay, avec le Muséum d’Histoire naturelle : la perruche à collier n’est pas plus nuisible que d’autres oiseaux de taille équivalente comme la pie. En sa présence, rouges-gorges ou mésanges continueront à fréquenter les mangeoires, et à accéder ainsi à la nourriture.

Ces conclusions sont tirées des données recueillies par BirdLab Vigie-Nature, un réseau d’observation participative des oiseaux sur application mobile. Frédéric Malher, de la LPO, rappelle par ailleurs que l’invasion des perruches à collier, en milieu urbain, peut s’avérer limitée. « À Bruxelles, comme partout, il y a eu une croissance exponentielle, mais maintenant on est arrivé à un plateau. Il fallait s’y attendre. Donc depuis 2010, le nombre de perruches n’augmente pas dans Bruxelles-Capitale. »

Mais ailleurs, la perruche à collier peut se révéler nuisible, et porter atteinte à l’équilibre des espèces autochtones ; c’est une famille de plus à nourrir et à élever. À Séville, dans le flamboyant parc de Maria Luisa, la perruche menace une chauve-souris, la Grande Noctule, classée dans la liste rouge européenne de l’UICN, l’observatoire de référence sur la diversité animale dans le monde, en l’agressant pour la chasser de sa cavité et y faire son nid. Sur une île des Seychelles, raconte Frédéric Mahler, « on a carrément éradiqué la population de perruches à collier, qui menaçaient directement une autre espèce de perruche autochtone. »Drôle d’oiseau mondialisé. Les humains, qui les importent et les encagent pour leur beauté, se plaignent aussi de leurs cris et de leur fiente. On organise même des battues pour les chasser des centres-villes.

« Pourquoi faut pas pousser mémé dans les orties ? »

Il ne faut pas exagérer quand même, c'est mémé ! Et ça pique, les orties. Ça gratte et ça démange, comme l'indique leur nom latin : urtica. C'est une plante poilue. Et pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, ses poils s'appellent des dards. Ils contiennent de la silice, l'un des composants du verre, et justement, leur extrémité se casse comme du verre au moindre contact, pour libérer des substances urticantes. Un moyen de défense comme un autre. Les roses ont leurs épines, et les orties des poils. Pour éloigner les herbivores, c'est plutôt efficace. L'ortie est aussi très utile au jardinier. Le purin d'ortie, une potion de feuilles macérées, chasse les nuisibles. Utilisée aussi en phytothérapie, le soin par les plantes, l'ortie soigne les rhumatismes. Et ça, mémé, elle apprécie !

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