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Sénégal: les PME se disent étouffées par le système des compteurs électriques prépayés

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Au Sénégal, le Premier ministre Ousmane Sonko a promis lundi 27 octobre une baisse prochaine des tarifs de l’électricité, face à la multiplication des plaintes sur la cherté de la vie. Au cœur des crispations : les compteurs d'électricité prépayés utilisés par 72% des clients de la Senelec, la société nationale d’électricité. Connus sous le nom de Woyofal, ils sont critiqués pour leur système de tarification opaque, jugé responsable de lourdes factures énergétiques. En première ligne, les petites et moyennes entreprises peinent à faire face. 

Une vue du marché Sandaga de Dakar (Image d'illustration).
Une vue du marché Sandaga de Dakar (Image d'illustration). SEYLLOU / AFP
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De notre correspondante à Dakar,

Dans le quartier populaire de Ouest Foire, à Dakar, Talabiou Kanté jette, l’air écœuré, des poulets, yaourts et autres produits glacés à l’arrière de sa boutique. « J’ai éteint le frigo pour faire des économies et certains produits sont gâtés, se lamente-t-il. C’est une grosse perte pour nous ».

Censé aider les clients à maîtriser leur consommation au Sénégal, le compteur prépayé utilisé par le commerçant est au contraire devenu un gouffre financier : en un an, avec les mêmes équipements, sa facture énergétique a doublé. En rayon, le prix de ses volailles vient de flamber de quelques centaines de francs CFA. « Le client ne comprend pas que ça n’est pas notre faute si certains prix ont augmenté. C’est à l’État de nous aider parce que la souffrance, n’est pas que pour nous. La population aussi souffre. »

Dans ce café du quartier résidentiel de Mermoz, la climatisation tourne en continu. Cette entreprise de taille moyenne peut se le permettre. Par chance, elle utilise encore les anciens compteurs de la Senelec, préservés de toute instabilité des tarifs. « Pour l’entreprise ici, on est gagnant parce que c’est stable : 1,5 million [francs CFA] en août 2024 et 1,5 million en août 2025 », se félicite Tété Diallo, cheffe comptable de la société, en consultant les factures,

« Ça freine l'économie des PME et des startups ! »

Sur les compteurs prépayés mis en cause, à l’inverse, la consommation est incontrôlable. Les kilowattheures s’épuisent à toute vitesse. Les recharger coûte cher. Une situation intenable pour les entrepreneurs. « Aujourd’hui, le moindre bénéfice qu’ils font, ils en profitent pour couvrir leurs charges, souligne Mohamed Diallo, secrétaire général de Noo Lank, collectif engagé contre la cherté de l’électricité. Ça freine l'économie des PME et des startups, car aujourd'hui, ils ne peuvent plus le supporter ! »

La Senelec dément toute hausse des tarifs de l’énergie. Elle explique les lourdes factures par la consommation propre des usagers, en hausse face à la période de chaleur. Une version rejetée par Mohamed Diallo, qui réclame une tarification plus juste et transparente. « Il y a de la tension partout : le pouvoir d'achat des Sénégalais est menacé, il y a la problématique des finances publiques. Si on y ajoute la problématique de l'électricité, les Sénégalais ne peuvent plus tenir ! »

Face à la colère et à l’incompréhension, la Commission de régulation du secteur de l’énergie (CRSE) a annoncé début octobre l’ouverture d’une enquête indépendante sur ces compteurs prépayés. Ses conclusions doivent être publiées prochainement.

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