La Russie redoute-t-elle de nouvelles sanctions économiques?
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Plusieurs Etats européens plaident pour le renforcement des sanctions contre la Russie suite à l’arrestation de l’opposant Alexeï Navalny et de ses partisans. Des sanctions accrues seraient-elles un coup dur pour l'économie russe?
Le discours officiel à Moscou consiste à minimiser, voir à négliger l’impact économique de ces représailles. Voilà maintenant six ans que la Russie est soumise à des sanctions économiques suite à la crise ukrainienne, des sanctions américaines et européennes régulièrement reconduites depuis. Ces représailles portent sur l'interdiction du commerce des armes et de certaines technologies sensibles, elles ciblent des personnalités, environ 180, et une cinquantaine d’entités liées au Kremlin. Enfin, elles restreignent l’accès aux marchés de capitaux. Si les premières mesures prises en 2014 conjuguées à la baisse du cours du pétrole ont provoqué une grave crise économique en 2015, depuis, la Russie a pris soin de renforcer son autonomie pour éviter de subir de nouveau choc.
Moscou a par exemple réduit le recours au dollar
Pour la première fois les réserves en or de la banque centrale russe dépassent ses réserves en dollar, c’est vrai depuis l’été 2020, une situation tout à fait inhabituelle. La banque centrale russe est devenu le premier acheteur d’or, une valeur refuge qui permet de mieux traverser les crises. L’Etat russe évite aussi d’emprunter à l’extérieur. Enfin il a pris l’habitude de faire des provisions : quand le cours du baril dépasse les 42 dollars, le surplus abonde les caisses publiques, une assurance qui sert aussi à faire face à la chute des cours du pétrole, car c’est encore le principal pourvoyeur de recette fiscales. Enfin la Russie s’est dotée des outils financiers pour contourner certains marchés européens, comme les chambres de compensation.
La mise en place de ces mesures de protection démontrent en creux à quel point les sanctions peuvent entraver son activité économique
Toutes les études concordent : les sanctions ont un coût pour l’économie russe. Le FMI estime qu’elles l'ont privé de 0,2% de croissance par an entre 2014 et 2018. Leur impact à court terme est moins nocif que celui provoqué par la chute des marchés pétroliers mais cela reste un sérieux handicap pour développer l’économie. La fragilité du rouble en témoigne. À chaque nouvelle salve de sanctions, ou chaque fois que les milieux d’affaires estiment que ce risque grimpe, la monnaie russe plonge. Après l’empoisonnement d’Alexeï Navalny, le rouble a perdu 20% de sa valeur face aux autres devises.
L’économie russe doit aussi absorber en ce moment les conséquences de la pandémie
Le coronavirus a fait des ravages. En 2020 le nombre de morts a triplé par rapport à l'année précédente, un bond attribué au Covid-19 par les experts indépendants. La santé n'est pourtant pas la priorité du Kremlin, elle passe après l'économie: pour éviter qu'elle ne s'effondre le gouvernement russe a renoncé à un deuxième confinement l'automne dernier. L'État a dépensé l'an dernier 4% du PIB pour venir en aide aux entreprises et aux familles, bien moins qu'en Europe mais comparable à ce qui fait dans les pays aux revenus intermédiaires. Mais ce filet de sécurité se contracte déjà à 1% du PIB cette année. L'économie devrait retrouver son niveau d'avant la crise dès cet automne d'après les prévisions de la VTB, la deuxième banque du pays. A moins que de nouvelles sanctions ne compromettent la reprise. Une nouvelle salve provoquerait la fuite des capitaux, de quoi entraver durablement l'essor économique de la Russie.
EN BREF
La commission européenne envisage de renforcer les contrôles sur les exportations de vaccin à l'extérieur de l'Union. Comme elle l'a fait au printemps pour les masques elle pourrait limiter ces exportations pour protéger son approvisionnement. Les discussions avec Astra Zeneca n'ont rien donné. Le laboratoire a fait savoir qu'il pourrait réduire ses livraisons à l'Europe de moitié. Il produit aujourd'hui au Royaume Uni et sur le continent, c'est bien sûr cette production qui serait concernée par des restrictions à l'export.
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