Aujourd'hui l'économie, le portrait

Patrick Pouyanné, patron de TotalEnergies, sous le feu des critiques

Publié le :

Sommé de cesser ces activités en Russie, Patrick Pouyanné, patron de TotalEnergies a renoncé à l’achat de pétrole russe, d’ici fin 2022. S’il maintient les activités gaz en Russie, il arrête tous nouveaux investissements dans ce pays.

Le PDG de TotalEnergie, en 2018 à Saint Petersbourg (image d'illustration).
Le PDG de TotalEnergie, en 2018 à Saint Petersbourg (image d'illustration). REUTERS - SERGEI KARPUKHIN
Publicité

Patrick Pouyanné a été durement critiqué, accusé même de « complicité de crimes de guerre », par le candidat Europe-Écologie Les Verts à l’élection présidentielle, Yannick Jadot. Des propos qui l’ont ulcéré, comme il le dit, la gorge nouée, mercredi chez nos confrères de RTL.

« Je suis un patron en colère. Quand monsieur Jadot accuse les 100 000 salariés de Total, c’est gravissime, c’est une insulte. Est-ce que vous pensez que nous ne sommes pas des êtres humains et que nous ne réfléchissons pas tous les jours ? J’ai la photo de deux personnes. Ce sont deux soldats ukrainiens, qui sont des employés de TotalEnergies. Ce sont les deux héros de mon entreprise aujourd’hui. Et on nous accuse de crimes, mais ce n’est pas acceptable, se défend Patrick Pouyanné. On me dit retirez-vous de Russie. Je lâche tout ? J’arrête d’amener le gaz russe aux Européens qui en ont besoin, alors que les gouvernements européens nous disent de continuer parce qu’ils ne veulent pas le sanctionner et pourquoi ils ne veulent pas le sanctionner ? Parce que sans gaz russe on arrête une partie de l’économie européenne. »

► À lire aussi : Ukraine: l’UE met l’embargo total sur le pétrole russe à nouveau sur la table des sanctions

Homme de terrain, Patrick Pouyanné, 58 ans, passe sa jeunesse sur la Côte basque française, à Bayonne, où son père est directeur régional des douanes. Élève brillant, il devient ingénieur, diplômé de Polytechnique, puis de l’École des Mines. Il débute à la BNP à Londres, passe par les cabinets ministériels français en charge de l'industrie et entame en 1997, sa carrière dans le secteur pétrolier, chez Elf d’abord, racheté par Total en 2000. Il est directeur du raffinage-chimie du groupe, lorsqu’il en prend les rênes en 2015, après le décès tragique du PDG, Christophe de Margerie dans un accident d’avion près de l’aéroport de Moscou.

« Patrick Pouyanné est un personnage plus grand que nature. C’est quelqu’un de très visible, qui a son franc parlé, un petit peu dans la tradition de Christophe de Margerie, une voix très reconnaissable dans le paysage de l’entreprise française, mais aussi dans le paysage de l’industrie de l'énergie dans le monde entier », témoigne Antoine Halff, co-fondateur de Kayrros, spécialisé dans l’énergie.

Lorsque Patrick Pouyanné devient numéro un de Total, le baril d'or noir dégringole et la valeur du géant français est divisée par trois. Réduire les coûts devient son obsession. Il diminue les dépenses d’exploration de 30% et supprime 2 000 emplois dans le monde, essentiellement des gels d’embauche et des départs non remplacés.

« Premier VRP de TotalEnergies »

Impulsé par l’accord de Paris pour le climat, l’homme à la stature imposante, 1m91, fait prendre un nouveau virage à l’entreprise.

« Il a su imprimer au groupe une stratégie, des changements importants. Il est en train de faire faire un tournant à son groupe pour diversifier ses activités vers des activités moins polluantes, moins génératrices de gaz à effet de serre : l’énergie solaire, l’énergie éolienne… Et ça il le fait avec détermination », explique Colette Lewiner, conseillère Énergie chez Capgemini.

À la tête de près de 110 000 employés dans plus de 130 pays dans le monde, le « premier VRP de TotalEnergies », comme il se qualifie lui-même, investit massivement dans les énergies renouvelables.

 « Il a été pionnier dans le verdissement de Total, mais en même temps, il a aussi été très ferme dans sa défense du rôle des hydrocarbures dans le mix-énergétique, même dans un système carbonisé. C’est une vue qui est très juste, rappelle Antoine Halff. On ne peut pas se débarrasser du pétrole et du gaz du jour au lendemain, non seulement cela, mais le pétrole et le gaz ont un rôle à jouer dans l’intégration des renouvelables dans le mix énergétique, mais aussi dans la réduction de l’emprunte climatique, insiste Antoine Halff. Parce qu’il y a beaucoup de progrès qui peuvent être réalisés dans la chaine du pétrole et du gaz pour réduire le carbone. »

L’offensive russe en Ukraine oblige désormais le patron de TotalEnergies, à mettre fin à de futurs investissements stratégiques dans le gaz, qui représente 80% de la production d’hydrocarbures du groupe en Russie. Toutefois, cette décision ne devrait pas peser trop durement sur le portefeuille de l'entreprise, assure Patrick Pouyanné, la Russie représentant entre 3 et 5% seulement des revenus de Total.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI