Rodolphe Saadé, milliardaire discret de l'empire français CMA CGM
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Portrait du milliardaire Rodolphe Saadé : ce Franco-Libanais de 52 ans est, depuis cinq ans, à la tête du géant français du fret maritime CMA CGM qui a connu des profits records depuis 2021.

L’armateur basé à Marseille a engrangé près de 28 milliards de dollars de bénéfices nets depuis le début de l’année. C'est un peu plus qu’en 2021, et il compte bien en profiter pour s’agrandir. Rodolphe Saadé s’exprimait récemment sur France Inter : « Nous sommes dans le transport et la logistique, par exemple les baskets que vous portez viennent probablement d’Asie et sont transportées par des navires porte-conteneurs et j’espère à bord des bateaux de CMA CGM. Donc ça, c'est le transport maritime. Nous sommes également investis dans la logistique. Ce qui est important pour moi, c’est qu’aujourd’hui le groupe CMA CGM c’est 150 000 collaborateurs de grande valeur qui sont présents dans 160 pays et je compte beaucoup sur eux pour continuer à me développer. Donc tant que j’ai les moyens de le faire, je vais continuer. »
Rodolphe Saadé a pris les commandes de la CMA CGM, en 2017, un an avant le décès de son père Jacques Saadé. Ce Libanais d’origine syrienne avait fui la guerre civile au Liban en 1978 pour s’installer à Marseille. Au départ, il n’avait qu’un bateau et quatre employés, puis s’est développé grâce aux échanges internationaux, notamment vers la Chine. 44 ans plus tard, le groupe français est troisième mondial du fret maritime derrière l’Italien MSC et le Danois Maersk avec 580 navires porte-conteneurs.
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Il a pourtant traversé bien des tempêtes. Alors comment expliquer ces résultats exceptionnels ? Yann Allix, délégué général de la fondation « C’est facile », et spécialiste du monde maritime, portuaire et logistique : « Le résultat de CMA CGM a été multiplié par 12 sur les 24 derniers mois. Donc effectivement, il y a une réussite incroyable au niveau économique et macroéconomique de CMA CGM. Et ces superprofits résultent du jeu de l’offre et de la demande. On s’est retrouvé un peu tous confinés, il a fallu qu’on s’équipe et on a eu une demande d'e-commerce qui n’avait jamais été expérimentée. Ceci est véritablement le reflet d’une logique de marché qui a connu une forme de bulle sur 24 mois dans un monde de supply chain où on n'avait jamais connu une telle tension entre l’usine du monde qui est la Chine et le reste du monde qui avait besoin de produits et qui ne pouvait pas avoir accès à ces produits sans les compagnies maritimes. »
Fort de ces bons résultats, ce patron discret a continué à étendre son empire en mer, sur terre, et dans les airs. Il vient de racheter de gros terminaux maritimes à New York. Il opère des entrepôts et des avions cargo partout dans le monde. Il a récemment acquis 9% du capital de la compagnie aérienne Air France-KLM.
L'année 2023 s'annonce difficile
Mais le vent est en train de tourner, reconnait Rodolphe Saadé sur France Inter : « Ce que je vois pour l’année 2023, je vois une année difficile. À cause de la crise énergétique, à cause des tensions entre l’Ukraine et la Russie. Donc l’Europe passe par une période compliquée. »
Jérôme de Ricqlès est spécialiste du fret maritime chez Upply : « On a un ensemble de signaux assez négatifs à l’approche de 2023. Donc les compagnies maritimes sachant que cette période exceptionnelle n’allait pas durer ont réinvesti très rapidement leurs profits dans d’autres chainons de la logistique qui sont moins volatiles que le cours du fret qui eux fluctuent rapidement en fonction de l’offre et de la demande. »
Autre défi pour l’armateur français, la transition énergétique afin d’atteindre zéro carbone en 2050, sachant que le fret maritime est une activité très polluante, car les bateaux ont besoin de fuel lourd pour naviguer.
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