Aujourd'hui l'économie

La Fed et la BCE à la manœuvre face à l’inflation

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Aux États-Unis comme en Europe, les banques centrales étaient sur le pont, ce mercredi 15 juin, pour tenter de mater l’inflation. Avec des priorités très différentes de part et d’autre de l’Atlantique.

La présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde et le président de la Réserve fédérale américaine, Jerome Powell.
La présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde et le président de la Réserve fédérale américaine, Jerome Powell. © Montage RFI - AFP - AP/Susan Walsh
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La Réserve fédérale (Fed) a opté pour la manière forte en relevant ses taux directeurs au-delà de ce qu'elle avait laissé entendre lors de sa précédente réunion : 0,75% de hausse des taux. C'est historique. On n'avait pas vu une telle remontée depuis presque trente ans. La Banque centrale européenne (BCE) a surpris les investisseurs en convoquant une réunion dans l'urgence, pour se pencher, non pas sur l’inflation, mais sur l’envolée des taux d’intérêts de l’Italie. Son emprunt à dix ans a dépassé la barre des 4% et l'écart avec les taux allemands a atteint le seuil d'alarme il y a quelques jours. Un seuil qui indique un fort risque de crise de la dette. 2022 a soudain le parfum de 2012.

Les derniers chiffres indiquent que l'inflation a dépassé les 8% aux États-Unis et en Europe. Pourtant, les banques centrales n'agissent pas au même rythme. Ce qui les éloigne dans la réaction, c'est la nature de cette inflation, selon l'économiste Julien Marcillly de GSA. Aux États-Unis, l'inflation est généralisée, avec des répercussions sur les salaires, poursuit-il. Il y a donc urgence à faire rentrer le dentifrice dans le tube, à faire baisser les prix, y compris par les moyens les plus agressifs.

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Tandis que dans la zone euro, « l'inflation était jusqu'à maintenant alimentée par une hausse de l'énergie et de l'alimentation ». La zone euro en est « au stade de l'économie américaine d'il y a six mois », la BCE a donc un peu de temps devant elle pour relever les taux, ce qu'elle a promis de faire à partir de cet été. Sans précipitation, pour éviter d'embraser les marchés déjà affolés par le risque italien.

Une nouvelle crise de la dette pourrait survenir ?

Même si la dette de l'Italie a encore gonflé avec le Covid-19, la situation d'aujourd'hui est bien meilleure qu'il y a dix ans. Parce que des réformes structurelles ont été accomplies pour se prémunir d'une nouvelle crise au niveau de secteur bancaire. Mais vu le climat d'incertitude actuel, la BCE doit rassurer. Elle a donc proposé, le 15 juin, de mettre en place un nouvel outil pour gérer la fragmentation de la zone euro, avec d'un côté des pays du Sud qui peuvent encore avoir besoin de son soutien. Et de l'autre, des pays moins endettés, plus riches qui peuvent absorber seuls la hausse des taux à venir. La Banque centrale européenne va donc agir de façon paradoxale, souligne Julien Marcilly, en augmentant les taux d'un côté et en achetant les actifs sur les marchés de l'autre, pour soutenir les maillons faibles.

En Europe, les annonces de Christine Lagarde ont soulagé les marchés

Les taux italiens se sont détendus et l'écart avec les taux allemands s'est resserré. Mais la partie n'est pas encore gagnée. Le fait que la BCE reste floue sur le contour de ce nouvel engin dédié aux pays du Sud indique qu'il y a encore des désaccords entre les pays membres. Des désaccords qu'il faudra surmonter au plus vite.

► À lire aussi : La BCE sur la voie du resserrement monétaire

Aux États-Unis, Wall Street a bien réagi aux annonces de la Fed. La bourse avait en fait déjà anticipé ce traitement de cheval. Elle a plongé les jours précédant la réunion de la Banque centrale pour mieux se reprendre après les annonces de Jay Powell. Les marchés américains se préparent au pire, c'est-à-dire à un ralentissement de l'économie. Les taux américains vont dépasser la barre des 3% avant la fin de l'année et continuer à grimper en 2023. De quoi refroidir sérieusement la machine.

Peut-on éradiquer l'inflation sans tomber en récession en Europe ?

La manœuvre est périlleuse, mais l'Europe semble aujourd'hui en mesure d'éviter cet écueil. Il n'y a pas eu de récession au deuxième trimestre et la confiance des ménages reste plutôt élevée. Le sort de l'économie dépend en partie des futures hausses de salaires. Et de la réaction des ménages. Comment vont-ils encaisser le choc de l'inflation qui dévore leur pouvoir d'achat ? D’après Julien Marcilly, si les plus aisés puisent dans l'épargne accumulée pendant le covid, cela pourrait nettement limiter les dégâts.

► EN BREF

En Tunisie, le secteur public est en grève aujourd'hui à l'appel de l'UGTT, le principal syndicat du pays.

Une grève pour obtenir des hausses de salaire prenant en compte l'inflation. Ce mouvement met la pression sur le président Saied actuellement en discussion avec le FMI. La Tunisie, en crise politique et financière, a besoin d'une rallonge pour se remettre à flot.

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