C'est dans ta nature

Vie et mort d’un gypaète barbu

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Un gypaète barbu, l’un des plus grands rapaces qu’on rencontre en Europe, en Asie et en Afrique, est mort cette semaine aux Pays-Bas, tué par une éolienne. Le vautour, né en captivité, avait été réintroduit il y a un an dans les pré-Alpes françaises.

Photo prise le 22 juin 2002 d'un gypaète barbu volant au dessus du parc naturel Alpi Marittime à Cueno en Italie.
Photo prise le 22 juin 2002 d'un gypaète barbu volant au dessus du parc naturel Alpi Marittime à Cueno en Italie. © AFP - VANINA LUCCHESI
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C’était il y a un peu plus d’un an, en février 2020, Angèle naissait dans un zoo de la République Tchèque, mais il ne s’appelait pas encore Angèle. Angèle est un mâle, un gypaète barbu, qui doit son nom à une montagne des pré-Alpes françaises, dans la Drôme, où on l’a « libéré », trois mois après sa naissance.

Le gypaète barbu, avec ses trois plumes au menton, fait l’objet de programme de réintroduction en Europe lancé dans les années 80. L’espèce n’avait pas été vue en France depuis les années 30, décimée par les humains qui croyaient alors que le rapace s’en prenait à leurs troupeaux, alors que le gypaète barbu, dont les ailes mesurent près de 3 mètres d’envergure, ce qui en fait un des plus grands rapaces, est un animal fort utile.

Le « casseur d’os »

Ce rapace des montagnes est un vautour, un charognard qui intervient en bout de chaîne, quand il ne reste que les os. On le surnomme « le casseur d’os ». « S’il récupère, par exemple, une colonne vertébrale de chamois, il va la transporter dans les airs, se placer au-dessus d’un pierrier, à 50 ou 100 mètres de hauteur, et laisser tomber cette colonne, décrit Pascal Orabi, ornithologue à la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). Les os vont alors se briser au contact de la roche, et là il va venir prélever sa pitance. Le gypaète barbu est capable d’avaler des os d’une quinzaine voire une vingtaine de centimètres de long. »

Mais revenons à Angèle, qui a passé plusieurs mois dans les Alpes, quand soudain le 14 mai dernier, le grand oiseau a traversé la vallée du Rhône, direction le Massif central. Son grand voyage initiatique avait commencé. « Après leur envol, les gypaètes vont être cantonnés un certain temps sur leur site de naissance ou de réintroduction. Et puis quelques mois plus tard, ils vont engager un voyage plus ou moins long. Certains restent France, d’autres vont traverser différents pays d’Europe, pour ensuite revenir, après cette phase erratique, sur leur lieu de naissance ou sur le site de leur réintroduction. »

60 000 oiseaux tués par des éoliennes

Mais Angèle n’est jamais revenu dans la Drôme. On le sait grâce au GPS dont on l’a équipé au moment de sa réintroduction. Sa traversée du Massif central l’a conduit vers Limoges, avant qu’il ne prenne la direction du nord, en passant par Paris, puis la Belgique, et enfin les Pays-Bas où il est arrivé cette semaine. Le soir, près d’un lac, il s’était endormi, avant de reprendre son envol, mercredi matin. À faible altitude, il battait des ailes dans le ciel hollandais, quand ses ailes ont heurté les pales d’une éolienne. Angèle est mort deux jours avant le premier anniversaire de sa réintroduction.

Son décès illustre d’ailleurs les contradictions que rencontre parfois la préservation de l’environnement. Les éoliennes, l’un des outils de lutte contre le réchauffement climatique, est un ennemi des oiseaux. « Les énergies renouvelables, oui, mais pas à n’importe quel prix et n’importe comment !, s’agace Pascal Orabi. Aujourd’hui, en France, on peut considérer que bon nombre de parcs éoliens sont construits sans prendre de précautions particulières au regard des risques de mortalité générés sur l’avifaune. » 60 000 oiseaux sont tués chaque année en France par des éoliennes, selon la LPO. Et quand vendredi 28 mai, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a relancé le plan français des éoliennes, elle n’a pas eu un mot pour Angèle.

« N’y a-t-il que des mauvaises nouvelles dans « C’est dans ta nature » ? »

Mais non ! Plusieurs informations annoncées cette semaine nous montrent que l’extinction des animaux n’est pas inéluctable. Le lynx ibérique, présent dans le sud de l’Espagne et du Portugal, a vu sa population multipliée par 10 en 20 ans. Le nombre d’antilope saïga, qu’on rencontre au Kazakhstan, a lui plus que doublé en 2 ans. Aux Galapagos, on a identifié une tortue géante qu’on pensait disparue depuis un siècle. Et en Australie continentale, on a constaté la naissance, en milieu naturel, de diables de Tasmanie pour la première fois depuis 3 000 ans.
 

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