Parfums de fleurs

Pour attirer les pollinisateurs, les fleurs émettent du parfum, que les humains ont su exploiter, notamment à Grasse, « capitale mondiale du parfum », dans le sud de la France. Le jasmin, cueilli au petit matin en été, est la fleur star des parfumeurs

Une fleur de Jasminum grandiflorum, le jasmin utilisé en parfumerie © RFI/Florent Guignard

« Au niveau du parfum... c’est juste le bonheur ! » Vanessa Aubert est penchée sur les jeunes plants de jasmin qu’elle a plantés en début d’année. La jeune femme, originaire du nord de la France, a changé de vie. Finie l’hôtellerie, vive Jasminum grandiflorum, le jasmin à grandes fleurs cultivé dans la région de Grasse, sur la Côte d’Azur, pour la parfumerie. 

Après avoir déniché un champ sur les hauteurs de Fayence, à une vingtaine de kilomètres de Grasse, sur Le Bon Coin, le site de petites annonces, son mari et elle ont planté un millier de jasmins. En ce début d’été, quelques fleurs sont apparues avant le début de la récolte, au mois d’août.

Matins parfumés 

La reconversion de Vanessa Aubert a été facilitée par le soutien de l’association Fleurs d’exceptions du Pays de Grasse, qui œuvre à la promotion des fleurs de Grasse, devenue la capitale mondiale du parfum grâce à son climat privilégié. « Le jasmin adore les fortes chaleurs, donc il suffit de bien l’arroser pour maîtriser la floraison », détaille Vanessa Aubert, qui se projette avec envie sur cette première récolte tant attendue. « Ça va être tout blanc, ce sera tout beau tous les matins ! »

La fleur de Jasminum grandiflora s’ouvre dans la soirée, mais c’est au petit matin qu’a lieu la cueillette, quand la fleur dégage le plus de parfum. « En fonction du vent, je pense qu’on va pouvoir inonder de bonnes odeurs tout le voisinage ! »

Le parfum est dans les pétales 

Le jasmin est, avec la rose de mai, la fleur la plus cultivée dans la région de Grasse pour la parfumerie. « Le jasmin ? Les Grassois l’appellent “la fleur”, tout simplement », explique Charlotte Urbain, directrice de la communication chez Fragonnard, le célèbre parfumeur installé à Grasse depuis presque 100 ans.

C’est de leurs pétales que les fleurs émettent leurs parfums. « Le jasmin est comme la rose. Ce sont des fleurs qui ont énormément de molécules de fleurs odorantes. Ce sont des matières premières magnifiques. Très chères d’ailleurs », souligne Charlotte Urbain.

2 000 heures de cueillette pour 1 litre d’absolu

Ce qui coûte le plus cher, outre la transformation, un processus chimique qui s’est modernisé au cours du siècle dernier, c’est la cueillette. « Tout se fait à la main, rien n’est mécanisé », rappelle Vanessa Aubert, qui a obtenu dès sa première année un contrat d’exclusivité avec un parfumeur, comme la plupart des cultivateurs de la région. 

« Pour avoir un kilo de jasmin, il en faut des fleurs ! En 4 heures, on cueille entre 1,3 et 2 kilos de jasmin. » Sachant qu’il faut à peu près 2 000 heures de cueillette pour obtenir un litre d’absolu de jasmin, le concentré de parfum qu’on retrouve dans de nombreux parfums et eaux de toilette, comme le N° 5 de Chanel, le parfum le plus vendu au monde, qui contient 10 % de jasmin.

Mais les parfums de synthèse, obtenus sans fleurs naturelles, ont pris de l’ampleur ces dernières années, pour utiliser moins de terres cultivables et pour obtenir des fragrances qui ne sont pas dans ta nature.

« Y a-t-il des fleurs qui puent ? »

Des fleurs qui ne sentent pas la rose, ni le jasmin, il y en a quelques-unes. Le sterculier fétide, par exemple, un arbre tropical, qu’on appelle aussi, et c’est encore plus clair, l’arbre à caca. Même si, pour être précis, ça sentirait plutôt le fumier. Il y a aussi l’arum titan, qui donne une fleur de 3 mètres, la plus grande au monde. On est là plutôt sur de la viande pourrie. 

Mais quel est l’intérêt de puer ? Il est le même que pour les fleurs qui sentent bon : attirer des pollinisateurs, des insectes, coléoptères ou diptères. Les Scathophaga, par exemple, plus connues sous le nom de mouches à merde. Tous les goûts sont dans la nature ! Vous l’avez compris : on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre...