L’avalanche de poudres de lait à l’huile végétale: une fatalité en Afrique?
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L’Afrique de l’Ouest importe toujours plus de poudre de lait et la grande majorité est désormais ré-engraissée à l’huile végétale, très peu chère. Le CIRAD a comparé les avantages et les inconvénients de ce commerce avec ceux de la transformation, au Sahel, du lait local.

C’est une avalanche qui grossit d’année en année. En 2019 l’Afrique de l’Ouest a importé 324 000 tonnes de poudres de lait ré-engraissées à l’huile végétale, estime un rapport du CIRAD. Deux fois plus qu’il y a dix ans. Désormais ces poudres qui mélangent du lait écrémé en poudre à des graisses végétales, huile de palme ou de coprah déshydratées, représentent aujourd’hui les deux tiers de la poudre de lait importée en Afrique de l’Ouest, jusqu’à 90% dans une ville comme Dakar.
Deux tiers de la poudre de lait contient de l’huile végétale
Ce commerce permet de répondre facilement à une demande en produits laitiers de plus en plus forte dans la région, reconnaissent les experts, notamment dans les villes, alors que le lait local fournit à peine la moitié des besoins. Il crée aussi des emplois dans l’industrie de la transformation laitière, en Afrique, comme en Europe.
2% du lait collecté au Sahel
Mais la transformation locale du lait du Sahel est seule capable de créer de l’emploi en zone rurale et elle est plus vertueuse d’un point de vue environnemental. Malheureusement 2% uniquement du lait produit localement est collecté en Afrique de l’Ouest. Sur les millions de familles d’éleveurs, seule 20 000 sont connectées à l’industrie laitière locale.
Faux « yaourt »
Le coût de la collecte est en cause, il est élevé étant donné la dispersion des élevages et la saisonnalité de la traite. Impossible dans ces conditions de concurrencer les importations de poudre de lait, d’autant que mélangées à des matières grasses végétales, elles sont encore 30% moins chères que la poudre de lait entier. Le consommateur africain, lui, n’y voit souvent que du feu. La faute à un étiquetage trompeur qui nomme « yaourt » un produit qui n’a pas les mêmes qualités nutritionnelles et qui n’aurait pas le droit de s’appeler ainsi sous d’autres latitudes.
Jouer sur la fiscalité
Pourtant il n’y pas de fatalité, estiment les chercheurs. Les taxes sur ces poudres de lait sont très basses dans les pays de la CEDEAO : 5 %, quelles que soit leur qualité. Elles pourraient être relevées jusqu’à 30% selon leur composition, pour protéger la transformation du lait local, sur lesquels au contraire la TVA pourrait être abaissée. L’étiquetage devrait être plus strict. Quant aux firmes laitières européennes elles sont appelées à des démarches plus responsables dans leurs investissements, afin de soutenir la transformation locale du lait du Sahel.
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