Chronique des matières premières

Eramet suspend sa production dans les mines de Moanda au Gabon, dans l'espoir d'une remontée des prix

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Le groupe minier français a décidé de suspendre la production de manganèse dans ses mines de Moanda au Gabon. Raison invoquée : l'essoufflement de la demande chinoise qui pèse sur les prix. Une demande très conditionnée à celle en acier, qui est appelée à baisser sur le long terme.

Carrière d'exploitation de manganèse à Moanda par la Compagnie minière de l'Ogooué (COMILOG, filiale du groupe français Eramet).
Carrière d'exploitation de manganèse à Moanda par la Compagnie minière de l'Ogooué (COMILOG, filiale du groupe français Eramet). RFI/Yves Laurent Goma
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C'est pour l'instant une suspension ponctuelle d'activité qu'annonce Eramet. Une pause dans l'extraction de manganèse qui sera « ajustée en fonction de l'évolution du marché », selon le communiqué. Mais rien ne dit qu'en réduisant l'offre de manganèse – Eramet vient d'abaisser son objectif pour 2024 –, les prix remontent durablement. Car la tendance mondiale est à une diminution de la demande en manganèse, tributaire elle-même de la sidérurgie. La demande est donc très liée à la bonne santé de la filière, et donc à celle de son moteur, la Chine.

« C'est le pays qui a connu la plus forte hausse de consommation d'acier jamais observée. Ses besoins ont augmenté en 25-30 ans, autant que dans d'autres pays en 40-50 ans », explique Marcel Genet, PDG de Laplace Conseil, cabinet spécialisé dans les industries métallurgiques et minières. Pour suivre cette demande, la production d'acier a été décuplée depuis les années 1990, mais cette période de croissance assurée quasi exclusivement par la Chine se termine, ajoute l'expert.

Déclin inévitable de la production d'acier

Le pays a construit ses infrastructures essentielles, la fièvre de la construction est retombée et son pic de consommation d'acier a été atteint. D'où un retour à une demande plus normale, qui est appelée à baisser dans les prochaines décennies et qui entraînera une diminution lente, mais inévitable, de la production d'acier, à l'instar du déclin déjà amorcé depuis plusieurs années en Europe, en Amérique du Nord, et globalement dans l'ensemble des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). 

Mais cette tendance lourde ne veut pas dire que les sidérurgistes vont appuyer tout de suite sur le frein. La tentation de maintenir leur activité, pour des raisons économiques, et d'exporter le surplus non consommé localement est souvent trop grande. 

On le voit aujourd'hui avec la Chine, qui se retrouve accusée d'inonder le marché d'acier à prix cassé. Un acier que les pays qui en exportaient traditionnellement ne sont plus capables de concurrencer.

De nouveaux investissements

Eramet pâtit donc d'une demande en acier qui se normalise chez le géant d'Asie et qui ralentit en Europe, où l'industrie est sommée de se conformer à des objectifs de réduction de CO2 et où le recyclage toujours plus grand de l'acier aura un impact grandissant sur la demande en métaux tels que le manganèse.

C'est peut-être une des raisons qui explique la diversification du groupe français qui a décidé d'investir dans un « métal d'avenir », le lithium. Sa première usine de production de carbonate de lithium a été mise en service en juillet 2024, en Argentine.

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