Le soja, nouveau levier politique et économique de la Chine?
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Au cœur de la rivalité commerciale sino-américaine, le soja n’est pas qu'un simple produit agricole. S'il illustre une vulnérabilité stratégique de la Chine qui en est la première consommatrice dans le monde, il montre aussi sa capacité à transformer une dépendance en levier politique et économique.

Pour Pékin, le soja est devenu un produit sensible, presque vital. La Chine, qui en importe plus de 100 millions de tonnes chaque année, en consomme des quantités colossales, non seulement pour produire du tofu ou du lait de soja, mais aussi et surtout pour nourrir des millions de porcs et de poulets, piliers de l’alimentation chinoise.
Alors que l’essor des classes moyennes a fait exploser la consommation de viande dans le pays, la production locale ne parvient en effet à couvrir qu’une fraction des besoins, malgré des subventions massives et une récolte nationale en hausse.
Fournisseurs étrangers
Si, Pour la Chine, les États-Unis ont été pendant de longues années un fournisseur incontournable, les guerres commerciales déclenchées par Donald Trump ont aujourd'hui changé la donne : Pékin a riposté en boycottant le soja américain, préférant se tourner vers le Brésil, désormais son premier fournisseur.
Si la stratégie se révèle payante sur le plan diplomatique, elle est toutefois risquée sur le plan agricole : en cas de sécheresse ou d'inondation en Amérique du Sud, Pékin voit toute sa chaîne d’approvisionnement fragilisée. Le problème pour elle réside dans le fait que les alternatives restent limitées. Un temps présentée comme une solution, la Russie a aujourd'hui freiné ses exportations depuis la guerre en Ukraine, privilégiant son propre marché et ses soldats.
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Stocks stratégiques
Face à sa dépendance persistante au soja, Pékin a donc sorti une autre arme : ses stocks stratégiques. Officiellement secrets, ils sont estimés à près de 45 millions de tonnes, soit de quoi amortir un choc ou résister à la pression américaine pendant plusieurs mois.
Mais derrière le soja se dessine une leçon plus large qui montre que si la Chine a su bâtir une industrie high-tech et sécuriser ses approvisionnements en terres rares, en pétrole ou en gaz, elle dépend encore largement en revanche de l'étranger pour son alimentation. Un paradoxe qui fragilise son ambition de souveraineté...
Résultat aujourd’hui : chaque cargaison de soja qui entre dans un port chinois n’est pas seulement un navire de marchandises, c’est aussi un rappel que l’autosuffisance alimentaire reste, pour Pékin, le maillon faible de sa puissance. Un maillon que Washington n’hésite pas à tester dans sa nouvelle guerre froide commerciale avec le géant asiatique...
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