Chronique transports

«Drôles de villes pour une rencontre»: transports et inégalités sociales vus par la télé

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Drôles de villes pour une rencontre ! Voici le titre de l'un des documentaires les plus appréciés de la télévision française. Pour chaque émission de la chaîne publique France 5, la journaliste Alexandra Alévêque part à l'autre bout du monde. Son principe est simple : partager durant quinze jours, 24h/24 le quotidien d'une famille dans de drôles d'endroits ! Autant dire autant de villes que de drôles de transports ! Alexandra Alévêque au micro de Marina Mielczarek. 

Le plus grand réseau téléphérique au monde, Mi Teleférico, relie les villes de La Paz et d'El Alto en Bolivie. Photo d'illustration prise le 2 juin 2014, après sa mise en service le 30 mai de la même année.
Le plus grand réseau téléphérique au monde, Mi Teleférico, relie les villes de La Paz et d'El Alto en Bolivie. Photo d'illustration prise le 2 juin 2014, après sa mise en service le 30 mai de la même année. © AP/Juan Karita
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RFI : De l'âne aux motoneiges, vous avez à peu près tout pris ! Mais un transport vous a particulièrement marqué. C’était en Bolivie… 

Oh oui ! C'était à La Paz, la capitale administrative bolivienne. Une ville très dure, en altitude à 3 500 mètres. Et contrairement à plusieurs villes du monde construites en hauteur, à La Paz, les riches habitent en bas et les pauvres au sommet. 

Vous logiez pour votre émission dans une famille pauvre... En hauteur donc, avec une seule solution de transport pour descendre ?  

Le fameux téléphérique de La Paz ! Tous les matins, la mère de famille allait faire le ménage dans une famille bourgeoise. J'ai donc pris ce téléphérique hallucinant avec elle. La Paz est un nid d’aigle ! 

Un transport insolite pour une Européenne comme vous ? 

Pas vraiment. Moi je connaissais nos téléphériques de montagne, dans les Alpes par exemple quand on va faire du ski. Mais là-bas, c'est comme le bus ou le métro chez nous. C'est ça qui est hallucinant ! 

Et cette hauteur fascinante... 

Les gens vivent perchés à hauteur de nids d'aigle. Ce téléphérique surplombe les maisons à flanc de montagne. Et les riches le prennent aussi, mais ils ne montent pas jusqu’en haut. On voit bien que ce transport illustre les divisions de statut social.  

Des différences que vous montrez et qui évoluent en cours de trajet. 

C’est exactement ça… Plus on monte vers les quartiers pauvres, plus les maisons sont petites et pauvres. Les briques rouges remplacent les murs blanchis à la chaux. C’est flagrant lorsque vous montez, les maisons, la ville entière change. 

3 500 mètres au-dessus des toits, de quoi avoir le vertige !  

Moi j’avais le vertige, eux pas du tout, c’est leur quotidien. Ils font ça tous les jours, ils sont incroyables.  

Dans un autre épisode de Drôles d’endroits pour une rencontre, vous êtes en Inde. Là encore avec un transport, le scooter, auquel la famille ne pouvait pas échapper, y compris en pleine saison des pluies !   

L’horreur. Une douche de pluie ! Des trombes d’eau tellement abondantes qu’il y avait comme un écran blanc, un brouillard épais sur toute la ville. Nous étions dans le nord-est de l’Inde dans l’état du Meghalaya. Ce qui est affreux, c'est que ce rideau de pluie dure des jours et des jours sans discontinuer. Sur la route, on n’y voit rien ! Mais rien de rien ! Moi, j’avais une peur bleue à l’arrière du scooter. 

Et ce scooter était le seul moyen pour le fils de rejoindre son école ?

Là encore, c’est un problème d’inégalité. Ma famille d’accueil n’avait pas l’argent nécessaire pour avoir une voiture. Et vous savez, ce fils m’a transporté sur ce scooter en prenant toutes les précautions sur la route. Il n’allait pas trop vite et c’est sa vie de tous les jours comme il me disait. 

Racontez-nous votre extraordinaire aventure en train ou il faudrait plutôt dire… sur les rails à Manille aux Philippines. 

Manille, oui. La capitale la plus embouteillée du monde ! En tout cas c’est cette constatation lorsque vous vivez dans cette ville gigantesque. On peut attendre des heures dans les bouchons. Alors les gens là-bas utilisent le train, donc les voies ferrées.  

Dans cet épisode à Manille, vous montrez le système D sur les rails. Une trouvaille qu’utilise la famille dans laquelle vous logez.  

Aux Philippines, il y a des super riches et des supers pauvres. Ces fortes inégalités ressortent dans les transports. Comme une bonne partie des Philippins, la famille dans laquelle je vivais n’avait pas les moyens de s’acheter un billet de train. Alors pour gagner du temps et pour pouvoir circuler, ils ont inventé le train parallèle ! 

C'est-à-dire ? 

Des charrettes faites-maison, fabriquées avec des roues adaptées aux rails. Ces espèces de carrioles roulent entre les passages des vrais trains ! Donc quand les trains ne sont pas là, ils mettent ces trolleys sur les rails et les jeunes hommes les poussent. On peut y monter à 4, avec les marchandises.   

Mais c’est dangereux ! 

Extrêmement dangereux oui. Parce que quand un train arrive, il faut l’entendre de loin, le temps d’enlever les charrettes des rails. Moi, j’étais morte de trouille !

Et eux, on le voit à l’image, n’ont pas peur du tout.

Pas peur du tout. Ils riaient de me voir ainsi terrorisée ! N’empêche que la veille du tournage, j’ai appris qu’il y avait eu des morts sur cette ligne de train parce que les wagons qui circulent ne s’arrêtent pas, ils foncent et quand les charrettes sont encore sur les rails et qu’un train arrive trop vite, ça fait des accidents très graves. 

Ce qui est marquant dans votre épisode à Manille, ce sont les solutions des super riches pour circuler malgré les embouteillages ! 

C'est très simple, ils prennent des hélicoptères pour passer au-dessus. J'aurais aimé tester, mais que voulez-vous, j'ai préféré l'aventure dans ma famille d'accueil au plus près des réalités des Philippins. Mais là encore, cette solution des hélicos, a été à la hauteur de mes étonnements dans cette ville foisonnante ! 

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