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Andrej Plenkovic : «La Croatie n'est pas prête à envoyer des soldats en Ukraine»

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Cette semaine, nous recevons Andrej Plenkovic, Premier ministre croate. Il réaffirme son soutien indéfectible à l'Ukraine et commente un possible élargissement européen aux pays des Balkans.

Andrej Plenkovic.
Andrej Plenkovic. © France 24
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La Croatie, pays balkanique de 3 900 000 habitants, est un fervent soutien de l’Ukraine. Andrej Plenkovic, Premier ministre du parti de droite de L’Union démocratique croate, rappelle que son pays a été occupé à la suite de l’agression du président serbe Slobodan Milošević dans les années 1990 : «Nous savons ce que c’est d’être victime d’une agression». «Notre expérience est unique. Pour cette raison, nous soutenons l’Ukraine d’un point de vue politique, financier, technique, humanitaire et militaire», poursuit le Premier ministre.

La Croatie fait partie de la «coalition des volontaires», les alliés de l’Ukraine qui discutent actuellement des garanties de sécurité à apporter au pays et notamment de la possibilité d’envoyer des soldats européens sur le terrain en cas de cessez-le-feu. «Nous souhaitons une paix juste et durable. Certains pays sont prêts à envoyer des soldats en Ukraine. La Croatie n'est pas prête», tempère le Premier ministre.

En effet, le gouvernement d’Andrej Plenkovic est en situation de cohabitation avec le socialiste Zoran Milanović, reconduit comme président en janvier 2025. Le président croate, chef des armées, s’oppose à un envoi de ses troupes en Ukraine. «Mon gouvernement n’a jamais proposé que l’armée croate participe aux opérations sur le sol ukrainien une fois la paix établie», se défend le Premier ministre. Il estime cependant que son pays pourrait tout de même jouer un rôle significatif dans la recherche de la paix : «La coalition des volontaires signifie que chaque pays qui en fait partie peut trouver un mode de participation pertinent pour atteindre le but recherché.» 

 

«Il y a 26 pays d'un côté et un autre à part»

En ce qui concerne l’aide apportée à l’Ukraine, la division est réelle au sein des Vingt-Sept. Le Premier ministre hongrois Viktor Orban, proche de Vladimir Poutine et Donald Trump, refuse à présent de signer en faveur d'une aide financière rapide pour le pays en guerre. «Il y a 26 pays d'un côté et un autre à part. Le Premier ministre hongrois a une stratégie complètement différente», reconnaît Andrej Plenkovic. «Il est tout à fait aligné avec l'administration Trump et n’est pas d’accord avec notre modèle de sanctions contre la Russie.» «Mais les 26 autres ont toujours été pour l'Ukraine», rappelle le Premier ministre croate. 

Le président socialiste croate Zoran Milanović a régulièrement dénoncé le soutien de l’Union européenne (UE) envers l’Ukraine. S’il reconnaît que le président a été élu démocratiquement, Andrej Plenkovic rappelle qu’il a lui-même été reconduit trois fois à son poste et estime «qu’une grande partie de la population croate soutient la ligne politique du gouvernement en ce qui concerne les questions internationales». «La Croatie est aujourd’hui à la table des discussions au sujet de l'architecture nouvelle et de la sécurité de l’Europe ou de l’aide apportée à l'Ukraine», explique-t-il. 

 

«Il faut discuter de la situation dans les Balkans occidentaux»

Alors que les Vingt-Sept envisagent l'élargissement de l’Union à de nouveaux États, notamment à l’Ukraine, Andrej Plenkovic salue cette «nouvelle volonté politique au sein de l'UE». La Croatie est le dernier pays à avoir rejoint le club des 27 en 2013 et aspire à être un pont entre l'UE et les pays candidats des Balkans : «Les pays de l'Europe du Sud-Est sont en première ligne pour entrer dans l’UE. Nous les soutenons tous, notamment la Bosnie-Herzégovine, où les Croates représentent une partie de la population avec les Serbes et les Bosniaques.» «Il faut que tous nos voisins, nos amis, remplissent les critères d'adhésion», nuance-t-il. 

Au moment où certains pays des Balkans sont marqués par de fortes manifestations et où l’influence russe est présente, Andrej Plenkovic insiste sur la nécessité de «discuter de la situation dans les Balkans occidentaux au prochain Conseil européen». Il cite la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, le Kosovo, le Monténégro, l'Albanie ou la Macédoine du Nord qui, selon lui, «sont prêts à accélérer leur intégration dans l'UE». Il en appelle notamment à la prudence de l’Union : «Il existe une situation politique et des tensions auxquelles l'Europe doit d'abord faire attention. Il faut agir pour la stabilité, soutenir les forces politiques qui sont pour la stabilité et l’intégration européenne.»

 

«Des relations de bon voisinage»

En Serbie, des manifestations secouent le pays à la suite d’un accident ayant fait quinze victimes dans la gare de Novi Sad. Un mouvement de jeunesse transpartisan fait vaciller Aleksandar Vučić, le nationaliste au pouvoir depuis 2014. «Ces manifestations sont portées par des groupes très hétérogènes de la société serbe. La balle est maintenant dans le camp du président Vučić afin de proposer un nouveau gouvernement et de rechercher une stabilité. Nous sommes pour la stabilité et les processus démocratiques», explique Andrej Plenkovic.   

La Serbie, qui a signé un accord de coopération militaire avec la Croatie en 2010, a parfois adopté un discours très pro-russe. «Le jour arrivera quand la Serbie devra choisir si elle est du côté de l'Europe ou de la Russie», déclare le Premier ministre croate. «S'il y a une vraie volonté d'être au sein de l'UE, il faut faire des choix stratégiques», poursuit-il. 

S’il reconnaît des relations «de bon voisinage» avec ce pays, notamment en termes de commerce, il évoque «des questions qui restent ouvertes depuis l’agression de la Serbie il y a trente ans». «Nous aimerions régler toutes les questions au sujet de la minorité croate [qui vit en Serbie] alors que nous soutenons la minorité serbe en Croatie», lance-t-il.

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