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Élections locales au Sénégal: l’enjeu pour Macky Sall «c’est l’appréciation de sa gouvernance»

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Au Sénégal, la campagne électorale des élections locales démarre le week-end prochain. Les candidats auront deux semaines pour convaincre, l’élection ayant lieu le dimanche 23 janvier. Les enjeux vont bien au-delà du contrôle des grandes villes, car ce scrutin permettra aux différentes forces politiques sénégalaises de confirmer leur ascension, d’asseoir leur hégémonie, ou d’essayer d’enrayer leur déclin. Pour en parler notre invité ce matin est Moussa Diaw, professeur de Science politique à l’université de Saint-Louis. Il répond aux questions de Laurent Correau

Le président sénégalais Macky Sall à Dakar, le 11 mai 2020. (Illustration)
Le président sénégalais Macky Sall à Dakar, le 11 mai 2020. (Illustration) © AFP / Lionel Mandeix
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RFI : À quel point les enjeux nationaux vont-ils peser dans le choix des électeurs lors de la prochaine élection locale ?

Moussa Diaw : Les enjeux nationaux vont peser parce qu’on est dans un paysage qui bouge avec l’apparition de nouvelles élites, des jeunes. C’est un test grandeur nature pour les leaders, pour se peser au niveau de l’opinion publique, et aussi pour faire valoir leurs projets de société comme alternative par rapport à la gouvernance actuelle.

On voit deux affiches importantes se dessiner pour deux grandes villes, Dakar et Ziguinchor. Et à Dakar, tout d’abord, la question est de savoir si la majorité va réussir ou non à conquérir la capitale, qui est pour l’instant entre les mains de l’opposition.

Oui, ce ne sera pas facile de conquérir la capitale, bien que la majorité ait mis les bouchées doubles autour d’Abdoulaye Diouf Sarr, qui est ministre de la Santé et de l’Action sociale. Le pouvoir mise donc sur lui pour gagner la capitale, mais ce ne sera pas facile, il y a de grandes coalitions d’opposition qui sont nées, notamment la coalition Yewwi Askan Wi autour de Sonko et Khalifa Sall, et vous avez aussi Wallu Sénégal autour du PDS et d’autres. Dakar c’est quand même une ville symbole, c’est quand même un enjeu important pour se positionner au niveau de l’électorat sénégalais.

L’autre affiche importante, c’est Ziguinchor. Ousmane Sonko, qui avait réalisé une percée spectaculaire lors de la présidentielle, fait notamment face au sortant Abdoulaye Baldé, dissident de la majorité présidentielle, et il fait face également au candidat du parti au pouvoir Benoît Sambou.

Oui, Ousmane Sonko s’est lancé dans la bataille parce qu’il a besoin d’avoir une base et cette base c’est Ziguinchor où il avait gagné une bonne partie de l’électorat lors des élections présidentielles. Et donc il remet cela, il met à contribution tous les acteurs qui sont autour de lui dans sa coalition. Et il mène le combat en publiant d’ailleurs un livre programme pour la ville de Ziguinchor. Il faut qu’il réussisse. S’il ne réussit pas, cela risque de compromettre ses projets d’avenir.

Le PDS, le parti fondé par l’ancien président Abdoulaye Wade, n’avait pas de candidats lors de la présidentielle de 2019. Sa dernière participation remonte donc aux législatives de 2017. Est-ce que vous diriez qu’il s’agit d’une élection-test pour le PDS alors que depuis cette échéance le parti a connu de très nombreuses divisions ?

Oui, c’est vrai, c’est une élection test pour le PDS parce que depuis le départ de l’ancien président et l’annonce de la succession par son fils, il y a eu beaucoup de défections. La plupart des leaders qui étaient là sont partis et ont rejoint la majorité ou bien ont créé leur propre formation politique. Les militants sont un peu déstabilisés parce qu’il y a l’absence du président Wade, son fils n’est pas là et il n’y a pas de leader charismatique pour prendre le relais.

Dans quel climat est-ce que le pays avance vers les élections ? Est-ce qu’on risque d’aller vers une nouvelle poussée de tensions ?

Oui, on risque d’arriver à de nouvelles poussées de tensions... Déjà elle a été palpable, cette tension, avec la confection des listes et bien sûr les rejets de certaines listes. Il y a eu des recours, mais sur les 22 recours qui ont été introduits, seulement deux sont revenus à l’opposition. Donc cela veut dire qu’il y a une forte tension sur le débat autour de ces listes-là et naturellement ça n’améliore pas le climat social pour préparer des élections sereines, transparentes et calmes.

Selon vous, Moussa Diaw, quelle est l’enjeu de cette élection pour le président Macky Sall ?

Cette élection lui permettra de savoir si les Sénégalais ont apprécié sa gouvernance, sa politique, est-ce qu’il est soutenu. C’est en fonction de ce résultat-là qu’il va se déterminer, me semble-t-il, par rapport à des enjeux importants pour l’avenir.

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