Alain Godonou: au Bénin, «l'exposition des trésors d'Abomey a été un surprenant succès populaire»
Publié le :
C’était il y a un an quasiment jour pour jour. Le Bénin se voyait restituer par la France les 26 œuvres des trésors royaux d’Abomey. Les autorités béninoises espèrent que d’autres œuvres leur seront rendues dans les prochaines années. Mais avant cela, elles travaillent, pour des expositions temporaires, sur le prêt de certaines pièces de renom comme la célèbre statue du dieu Gou. Alain Godonou est le directeur du programme Musées à l’Agence nationale de promotion des patrimoines et de développement du tourisme au Bénin.

Les œuvres des trésors royaux d’Abomey vous ont donc été restituées il y a un an. Elles ont été exposées au palais de la présidence pendant plusieurs mois. Comment ont-elles été accueillies par le public ?
Alain Godonou : Disons que c’est un accueil au-delà de nos espérances. Vous avons eu une exposition en deux temps : une première saison de février à mai, à peu près 40 jours d’exposition, et nous avons eu à peu près 190 000 visiteurs, avec une moyenne journalière de quasiment 4 500 à 5 000 visiteurs. Puis, sur la demande du public, nous avons rouvert l’exposition du 16 juillet à la fin du mois d’août et nous avons eu à peu près 34 000 visiteurs. Donc, cela a été un succès énorme, populaire, qui nous a surpris.
Que vont devenir les œuvres maintenant ? Vont-elles être exposées à Ouidah, comme cela avait été annoncé dans un premier temps ?
Nous sommes en train d’y réfléchir et nous nous posons la question : est-ce que cela vaut véritablement la peine de les exposer de nouveau à Ouidah, vu qu’il y a eu largement le temps, vu les statistiques que nous avons, de les visiter, ou bien faut-il les soigner, les traiter et attendre tout simplement de les exposer de façon définitive dans l’écrin naturel d’Abomey ?
Vous le disiez, ces œuvres doivent à terme être exposées à Abomey, au musée de l’Épopée des amazones et des rois du Dahomey. Où en est la construction de ce musée ? Les travaux avancent normalement ?
Oui, la construction du musée avance. Nous avons décidé de mettre ce musée, cet espace muséal, à l’intérieur du site classé des palais royaux d’Abomey, qui est un site classé patrimoine mondial de l’Unesco. Et pour ce fait, il faut des discussions techniques professionnelles, mais qui tiennent compte aussi de ce qu’on appelle la V.U.E., la valeur universelle exceptionnelle, de ce site-là. Nous avons eu ce dialogue avec l’Unesco, qui est terminé maintenant. Donc, les études finales sont en cours d’achèvement et l’entreprise, qui doit conduire à terme les travaux, sera choisie incessamment. Et l’ouverture de ce musée est prévue pour la rentrée 2024.
Est-ce que le succès populaire de l’exposition de ces 26 œuvres vous a poussé à formuler de nouvelles demandes de restitution à la France ?
Quand le président Patrice Talon était en France à l’Élysée pour acter le retour de ces 26 trésors, il y a eu un rappel des œuvres que nous souhaitions recevoir. Cette demande est toujours sur la table. Maintenant, c’est l’affaire des politiques. Nous savons comment cela se passe en France. Nous savons que le président Emmanuel Macron a lancé l’étude d’une loi qui facilite les dispositions réglementaires, qui facilite la restitution. Probablement que cela mettra du temps. Maintenant, nous, nous sommes sur un plan plus technique. Nous sommes dans un dispositif de coopération. Nous sommes pour la circulation des œuvres et nous sommes en discussion avec les collègues français, peut-être pas pour la restitution, qui est un dossier politique et parfois législatif, mais pour le partage des collections qui existent. Donc, nous attendons des musées en France et des professionnels, des conservateurs en France, que nous puissions discuter, pour que les œuvres qu’ils ont et qui nous intéressent ici dans nos expositions puissent circuler dans ce sens-là, que nous puissions les accueillir et les présenter.
Quelles sont les pièces en particulier qui vous intéresseraient à court ou moyen terme ?
Bien sûr. Vous savez qu’il y a une pièce qui était dans notre demande depuis longtemps, le dieu Gou par exemple. À partir du moment où nous mettons en place le musée international du Vaudou, toutes les œuvres qui pourraient relever de cette problématique patrimoniale, le vaudou qui a une identité au Bénin, il est normal que nous puissions penser à les accueillir. Il n’y a pas que le dieu Gou, il y a tout le mobilier Ifa, la divination attachée au fameux devin du royaume d’Abomey, Gèdègbé, qui sont sur la table suite à notre demande pour restitution ou circulation. Je vous ai cité les plus emblématiques. Mais il y en a d’autres qui trouvent leur place dans les expositions que nous voulons faire ici.
À quelle échéance ces œuvres pourraient-elles vous être prêtées ?
Il y a un travail entre les institutions dont la responsabilité, la mission est de s’occuper de ces collections-là et nous, nous commençons la discussion avec la partie française. Nous organisons notre discussion d’ailleurs à travers l’appui d’Expertise France et des professionnels français du ministère de la Culture sur ces questions-là. Pour vous donner une date, une échéance, à la rentrée 2024 à partir de septembre, nous devrions avoir de nouveau de très grandes expositions au Bénin qui incluraient peut-être, si nous arrivons à bon port, ce que nous souhaitons, ces objets-là.
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne