Gabon: l'opposant Jean Ping ne soutiendra personne à la présidentielle du 26 août
Publié le :
De passage à Paris, l’opposant gabonais Jean Ping confirme qu’il ne se présentera pas à la présidentielle du 26 août prochain. « Je ne peux pas être candidat dans une élection qui est pipée d’avance », précise-t-il, alors que la clôture des candidatures est fixée ce dimanche 16 juillet à 18 heures locales. Toujours dans cette interview à RFI et France 24, Jean Ping se refuse à apporter son soutien à l’un ou l’autre des opposants qui se présentent contre le Président sortant Ali Bongo.
Une extension de votre navigateur semble bloquer le chargement du lecteur vidéo. Pour pouvoir regarder ce contenu, vous devez la désactiver ou la désinstaller.

Préfère-t-il, par exemple, Paulette Missambo ou Alexandre Barro Chambrier, qui étaient tous deux dans son équipe de campagne en 2016 ? « Je n’ai pas de préférence à donner dans des conditions de simulacre, je leur souhaite simplement bon vent », répond-il. Et le candidat malheureux d’août 2016 de faire cette confidence à RFI et France 24 : « Le 26 août prochain, je ne voterai pas, car ce serait cautionner une forfaiture ».
France 24 & RFI : En cette fin de semaine, le dépôt des candidatures à l'élection présidentielle prévue le 26 août au Gabon se termine. Seront, sur la ligne de départ, le président sortant Ali Bongo Ondimba, ainsi que plusieurs opposants. Mais il y a un nom qui manque à l'appel : le vôtre. Pourquoi n'êtes-vous pas candidat, cette fois-là ? Est-ce que ce n'est pas l'occasion pourtant de prendre votre revanche sur 2016 ?
Jean Ping : Écoutez, 2016 n'est pas derrière nous. 2016 est une élection que tout le monde affirme ! Tous les observateurs, d'abord ceux de l'Union européenne qui ont vraiment supervisé les élections d'une manière exemplaire. Donc, 2016 n'est pas derrière nous.
Pour l’instant, vous n'êtes pas candidat. Pouvez-vous nous confirmer que vous ne serez pas candidat ?
Non, je ne suis pas candidat. Sauf si on se rend compte que cette élection a pour objet de réparer le Gabon, qui est mal en point, de rassembler les gens, pour pouvoir sortir ce pays des difficultés. Je ne peux pas être candidat dans une élection qui est pipée d'avance.
À quelles conditions pourriez-vous être candidat à une prochaine élection ?
Si je me rends compte que l'élection en question a pour objet de réparer le Gabon, de rassembler ses enfants, de sortir la vérité des urnes, et que ça ne soit pas une entourloupe, comme d'habitude.
Vous appelez à la mise en place d'une transition dont vous pourriez prendre la tête, mais est-ce qu'on ne risquerait pas de vous reprocher de vouloir vous installer au pouvoir sans passer par les urnes ?
D'abord, je ne sais pas qui vous a dit que j'avais demandé une transition. Ce sont certains officiels, qui auraient déclaré que nous étions prêts à aller à une élection, avec une transition d'une durée de 5 ans, conduite par monsieur Ping.
Est-ce faux ?
Je n'en sais rien. On dit qu'on a dit…
Voulez-vous une transition plutôt qu'une élection maintenant ?
Je vous dis : si une élection – qu'elle soit une transition ou autre – a pour objet de réparer le Gabon, de rassembler les enfants du Gabon, d'essayer de sortir ce pays des difficultés dans lesquelles il est empêtré, je ne vois pas pourquoi je refuserais. Mais, pour le moment, on ne semble pas s'orienter dans cette direction.
Pour le moment, il y a une élection qui est prévue le 26 août, dans un peu plus d'un mois. Les candidatures se multiplient. L'élection se déroulant à un tour, cela semble faire le jeu du pouvoir, Pour se rassurer, les opposants – qui sont, eux, candidats – affirment que, d'ici au 26 août, ils trouveront un candidat de consensus, comme vous l'étiez il y a 7 ans. Croyez-vous qu'ils y parviendront ?
Je leur souhaite simplement bon vent.
Rien de plus ?
Rien de plus. Parce que ça semble être, comme d'habitude, un simulacre.
Il y a quand même des candidats très sérieux qui se présentent, notamment des candidats qui étaient à vos côtés dans votre équipe de campagne il y a 7 ans. Est-ce que, parmi eux, il y a quelqu'un – ou quelqu'une – qui a le profil d'un candidat de consensus comme l'était Jean Ping en 2016 ?
C'est ce qu'on va voir. Pour le moment, ça ne se dessine pas sous cette forme-là. Mais on va voir.
En voyez-vous un ou une - qui aurait votre profil d'il y a 7 ans ?
Oh, je n'y ai même pas pensé.
Paulette Missambo est là. Alexandre Barro Chambrier aussi. Ils étaient tous les deux à vos côtés en 2016. Observez-vous leurs candidatures avec intérêt ?
Non. Je leur souhaite simplement bon vent.
Lequel préférez-vous ?
Non, je n'ai pas de préférence à donner dans ces conditions-là. La condition du simulacre. Non, non, non.
Pourtant, vous semblez indiquer qu'ils font fausse route en se présentant à cette élection. Eux se disent : « Il y a une élection, on y va. On ne va pas la boycotter. », Est-ce une erreur, selon vous ?
Je leur souhaite simplement bon vent.
Comptez-vous adouber l'un des candidats ?
Non.
Voterez-vous le 26 août ?
Non, je ne peux pas aller voter dans les circonstances que l'on connaît. Ce serait cautionner une forfaiture.
Vous êtes ici à Paris. C'est la première fois que vous sortez du Gabon depuis de nombreuses années, parce que les autorités vous ont octroyé un passeport. Vous avez rencontré des personnalités politiques. Ali Bongo, lui aussi, rencontre des personnalités politiques. Il a même reçu à Libreville la visite du président Emmanuel Macron le premier mars dernier. Est-ce que, pour vous, cela signifie que la France parie une nouvelle fois sur Ali Bongo le 26 août ?
Je ne sais pas. Je ne peux pas me fier à certaines apparences. Parce qu'il n'y a que le président Macron qui connaît la vérité, et qui sait ce qu'il veut faire. J'observe.
Quand vous parlez aux officiels français, avez-vous l'impression qu'ils sont d'accord avec vous – c'est-à-dire qu'il ne faut pas aller à cette élection - ou qu'ils se disent que l'élection aura lieu, et voir ce qu'il se passe ?
Ils ne disent rien de tout ça.
Que disent-ils, alors ?
Ils ne disent rien de tout ça. J'ai été reçu au quai d'Orsay, ça s'est très bien passé. L'échange a été extrêmement fructueux et positif. On ne m'a rien dit de tout ce que vous proposez comme question.
En 2016, lors de la dernière présidentielle, vous affirmez que les observateurs de l'Union européenne se sont bien conduits. La France est-elle restée neutre dans le duel entre Ali Bongo et vous-même, ou a-t-elle choisi son camp ?
Je crois qu'il faut leur poser la question.
Je vous pose la question, parce qu'en 2016, à l'époque, vous aviez dénoncé le soutien de la France à Ali Bongo. Et puis, il y a quelques jours, devant la diaspora gabonaise à Paris, vous avez même affirmé que, lors de l'assaut de votre quartier général en août 2016, Ali Bongo lui-même était dans l'hélicoptère qui a tiré sur votre QG – avec un bazooka – et qu'il y avait à ses côtés le ministre français de la Défense de l'époque, Jean-Yves Le Drian, qui pourtant n'était pas au Gabon ce jour-là.
Cette affaire, je l'ai déjà réglée. J'ai dit que ce ministre n'était pas dans l'hélicoptère. Ce que j'ai dit, je le retire, je présente mes excuses. À plusieurs reprises, à toutes les autorités, je l'ai dit. Pour moi, c'est clos.
Si cette élection a bien lieu le 26 août prochain, si vous n'y allez pas, si vous n'êtes pas candidat, si vous n'êtes même pas électeur et si la vie du Gabon continue, ne risquez-vous pas de laisser passer le train de l'histoire ?
Nous verrons bien.
C'est-à-dire ?
C'est-à-dire que si les trains passent, on verra qui sera dans le train.
Vous y croyez encore ?
À quoi ?
À monter dans le train de l'histoire.
Mais je suis déjà dans le train de l'histoire. Pourquoi voudriez-vous que je monte dans le train de l'histoire, puisque j'y suis.
Beaucoup de gens pensent que, depuis 2016, vous avez un petit peu abandonné la lutte, que vous êtes isolé et que, finalement, votre vie politique est derrière vous. Vous pensez pouvoir jouer un rôle de premier plan à l'avenir au Gabon ?
Est-ce que vous avez l'impression que la vie politique est derrière moi ?
C’est à vous de nous le dire.
Non, mais parce qu'on se connaît bien. Je vous connais très bien, depuis l'époque où je présidais l'Assemblée générale de l'ONU, depuis l'époque où je dirigeais la commission de l'Union africaine, j'ai été à l'OPEP… Vous étiez presque partout. Avez-vous l'impression que je suis le genre d'homme à quitter le train, le bon train ?
Donc, vous espérez toujours ?
Si je n'espérais pas, je ne vivrais plus.
À lire aussiGabon: les candidats se déclarent, l'opposition négocie avant la présidentielle
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne