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Turquie - Arabie saoudite, un rapprochement dicté par la nécessité

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Le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salmane s’est rendu en visite officielle en Turquie, le 22 juin dernier au où il a été reçu par le président Recep Tayyip Erdogan. Une visite qui met fin à une brouille née de l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi à Istanbul en 2018, où le président turc avait mis en cause les autorités saoudiennes. Quelles sont donc les raisons qui ont poussé le président Erdogan à renouer avec MBS ?

Le président turc Recep Tayyip Erdogan (gauche) et le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane (ABS)  devant la garde d'honneur militaire lors de la cérémonie de bienvenue, à Ankara, en Turquie, le mercredi 22 juin 2022.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan (gauche) et le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane (ABS) devant la garde d'honneur militaire lors de la cérémonie de bienvenue, à Ankara, en Turquie, le mercredi 22 juin 2022. AP - Burhan Ozbilici
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Et bien pour des raisons très pragmatiques. Bien loin en effet des foucades adressées par Recep Tayyip Erdogan aux autorités saoudiennes après l’assassinat dans des circonstances sombres du journaliste Khashoggi en 2018, voici que le président turc reçoit en grande pompe le prince héritier saoudien MBS, Mohammed Ben Salmane.

Ce dernier a tout lieu d’être satisfait : montré du doigt par de nombreux pays, il y a deux ans et demi, relégué au rang de paria, le voici qui fait une réapparition en fanfare sur la scène internationale - en tout cas régionale. Avant Ankara, MBS s’est en effet rendu en Égypte et en Jordanie, où il a déjà signé des contrats importants. Dans trois semaines, c’est le président Joe Biden qui doit se rendre en Arabie saoudite, alors même qu’il avait exprimé publiquement le peu de considération qu’il portait à MBS après l’affaire Khashoggi.

Ce retour de MBS sur le devant de la scène est dû à deux raisons : son pays a de l’argent et les moyens d’investir à l’étranger, et puis la guerre en Ukraine a remis les pétro-monarchies au centre du jeu pétrolier fortement déstabilisé par les sanctions occidentales contre Moscou.

Attirer les investissements

Et ces atouts saoudiens rencontrent les besoins du président Erdogan. Le dirigeant turc, qui doit affronter des élections générales en juin de l’an prochain, sait qu’il doit absolument redresser la barre économique de son pays, où les indicateurs sont au rouge, qu’il s’agisse de l’inflation, officiellement à un niveau de 70 %, mais sans doute bien plus, du taux de chômage, ou de l’effondrement de la monnaie nationale. Bref, s’il veut être réélu, Erdogan doit attirer des revenus pour tenter de faire redémarrer son économie. Et c’est ce que lui apporte précisément le dirigeant saoudien : des investissements massifs. MBS souhaite aussi acheter du matériel militaire à la Turquie qui dans ce domaine possède une certaine expertise, notamment dans le domaine des drones, les fameux Bayraktar TB2, vendus par Ankara à l’armée ukrainienne en ce moment.

Il s’agi donc de « real politik » avant tout. Mais Erdogan n’hésite pas non plus, peut-être pour faire diversion en ces temps difficiles, à jouer sur le sentiment national voire nationaliste, de ses concitoyens. C’est ainsi qu’il a réveillé la tension avec la Grèce au sujet cette fois du statut des îles grecques de la mer Égée, notamment celles du Dodécanèse. Athènes reste sereine pour l’instant, ayant sans doute compris que ces gesticulations sont surtout des manœuvres de politique intérieure.

► À lire aussi:  Mohammed ben Salman en Turquie quatre ans après l'assassinat de Khashoggi

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