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Exécutions en Birmanie: jusqu'où peut aller la junte militaire?

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La junte militaire birmane au pouvoir depuis un an et demi a procédé cette semaine à l’exécution de quatre prisonniers politiques, dont deux célèbres résistants, alors que la peine de mort en Birmanie n’avait plus été pratiquée depuis des décennies. Comme faut-il analyser ce nouvel accès de violence ?

Le général Min Aung Hlaing, à la tête de l’administration militaire qui s’est emparée du pouvoir en Birmanie depuis février 2021, ici en mars 2021.
Le général Min Aung Hlaing, à la tête de l’administration militaire qui s’est emparée du pouvoir en Birmanie depuis février 2021, ici en mars 2021. REUTERS - Stringer .
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Une fuite en avant, un jusqu’au boutisme sanguinaire, une affirmation du règne par la terreur, creusant encore un peu plus le fossé qui sépare les forces armées et la population de Birmanie. La pendaison, lundi 25 juillet, dans la prison d’Insein à Rangoon de quatre dissidents condamnés à mort pour de vagues raisons a provoqué la consternation, la colère et, surtout, une immense vague de chagrin dans tout le pays. Kyaw Min Yu alias Ko Jimmy, activiste écrivain et Zeya Thaw, l’homme qui avait fait découvrir le rap à la jeunesse birmane avant de rejoindre comme député le parti du Prix Nobel de la Paix Aung San Suu Kyi, étaient deux figures immensément populaires et admirées dans un pays où le sacrifice et l’engagement politiques sont sanctifiés… En les exécutant par surprise, les militaires putschistes ont cherché à traumatiser le peuple et à démobiliser une résistance pro-démocratique en plein essor.

Peut-on espérer que ces exécutions constituent un tournant dans la guerre civile ?

Le gouvernement parallèle birman a immédiatement dénoncé un « Jour Noir » pour le pays alors que les Forces de Défense Populaires, l’armée de l’ombre qui contre-attaque aux quatre coins de la Birmanie ont appelé à une campagne de représailles contre les forces de sécurité. À l’étranger, la France et les États-Unis ont mené la vague d’indignation qui a culminé par une déclaration au Conseil de sécurité des Nations unies qui, fait rarissime, a été signée par la Chine et la Russie, les deux parrains de la dictature birmane… La haute portée symbolique de la disparition des deux héros nationaux va certainement à terme provoquer un regain de combativité populaire dans une guerre civile qui a déjà atteint depuis de longs mois le point de non-retour…

Mais signe inquiétant, en Birmanie cette semaine, la rumeur se répand sur une nouvelle série d’exécutions de prisonniers politiques…

Sur les quinze mille civils arrêtés pour subversion depuis le coup d’État du 1er février 2021, une centaine a déjà été condamnée à la peine capitale. Les observateurs sur place estiment que les exécutions du 25 juillet pourraient être le préambule à une nouvelle stratégie de terreur alors que la peine de mort n’avait pas été appliquée depuis plus de trente ans. Le général Min Aung Hlaing, chef de la junte, avait prévenu il y a quelques mois qu’il n’y aurait aucune concession, aucune discussion avec une résistance birmane qu’il qualifie de « terroriste ».

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