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En Irlande du Nord, quels impacts de l’évolution démographique de la province?

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Pour la première fois depuis sa création en 1921, le dernier recensement d'Irlande du Nord indique que les catholiques sont majoritaires par rapport aux protestants. En quoi les données de ce recensement peuvent-elles renforcer les velléités des républicains, souvent catholiques, à demander le rattachement de l'Irlande du Nord à la République irlandaise ? 

Vue d'un quartier résidentiel et commerçant de Belfast, en Irlande du Nord.
Vue d'un quartier résidentiel et commerçant de Belfast, en Irlande du Nord. © Getty Images/Catherine Falls Commercial
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Il s'agit en effet d'une donnée démographique qui pourrait avoir de lourdes conséquences politiques. Pour rappel, lorsque les Britanniques, contraints d'accorder l'indépendance au reste de l'Irlande en 1921, ont créé la province nord-irlandaise qui restait unie à la Grande-Bretagne, c'est précisément la situation démographique - les protestants unionistes étant majoritaires au nord de l'île - qui avait légitimé en quelque sorte l'existence même de cette province dont les contours avaient été dessinés en fonction du poids des protestants. 

Et depuis sa création il y a un siècle, cette appartenance au Royaume-Uni satisfaisait donc la majorité protestante et mécontentait fortement les catholiques, majoritairement républicains, et qui réclamaient le rattachement à leur grande sœur d'Irlande. Ils demandaient aussi une meilleure égalité de traitement avec les Unionistes qui dirigeaient avec le soutien de Londres, la politique et l'économie de la province. Ce sont ces revendications non satisfaites qui ont provoqué les tristement célèbres troubles en Irlande du Nord, 30 ans d'affrontements entre républicains catholiques et protestants unionistes, qui ont fait 3 500 morts. 

Une divergence fondamentale qui persiste

Les choses ne se sont apaisées qu'avec l'accord du Vendredi saint en 1998 instaurant un partage du pouvoir. Mais un apaisement fragile et compliqué : le dispositif politique a été souvent bloqué à cause de dissensions entre les deux communautés. Car la divergence fondamentale persiste : les unionistes veulent à tout prix rester dans le Royaume-Uni tandis qu'une grande partie des catholiques souhaitent rejoindre l'Irlande. Et de ce point de vue, la démographie est surveillée par les uns et les autres comme le lait sur le feu. 

D'où l'importance du dernier recensement qui indique que 42,3% de la population s’identifie comme catholique, contre 37,3% comme protestant ou autre religion chrétienne. Ce chiffre ne peut qu'encourager le principal parti Républicain, le Sinn Fein - qui a remporté les élections provinciales en mai dernier - là aussi pour la première fois-, à demander à Londres l'organisation d'un référendum sur le rattachement à l'Irlande, et donc la séparation définitive avec la Grande-Bretagne.

Quant aux protestants, certains s’estiment menacés dans leur identité et demandent à Londres de les soutenir, notamment en déchirant l’accord sur le protocole d’Irlande du Nord dans le cadre du Brexit. Un protocole qui établit une frontière de facto en mer d’Irlande entre leur province et le reste de la Grande-Bretagne. La nouvelle Première ministre Liz Truss, alors cheffe de la diplomatie, a fait un premier pas dans ce sens, au risque de créer une tension extrême avec l’Union européenne qui ne veut pas en entendre parler. Le gouvernement britannique demande en revanche aux unionistes du parti DUP de ne plus bloquer les institutions provinciales comme ils le font depuis la victoire du Sinn Fein.

Dans ce contexte tendu, le recensement constitue une mauvaise nouvelle de plus pour les Unionistes d’Irlande du Nord.

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