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Biélorussie, une position périlleuse ?

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En Biélorussie, le président Loukachenko est sous forte pression de la part des Russes pour contribuer d’une manière ou d’une autre à la guerre contre l’Ukraine. Pourquoi le positionnement de Minsk est-il si important pour Moscou ?

Le président de Biélorussie Alexandre Loukachenko, à Minsk, le 19 janvier 2023.
Le président de Biélorussie Alexandre Loukachenko, à Minsk, le 19 janvier 2023. © Russian Foreign Ministry Press Service via AP
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La réponse tient d’abord à la géographie. La Biélorussie est voisine de la Russie et de l’Ukraine, elle présente même le notable avantage d’avoir une longue frontière commune avec le nord de l’Ukraine. Une frontière qui est située à même pas 100 kilomètres de Kiev – et c’est d’ailleurs de là qu’était partie l’invasion russe l’an dernier vers la capitale ukrainienne – avec le succès que l’on sait.

Il y a ensuite les liens politiques et culturels qui existent de longue date entre Moscou et Minsk. Du coup, la position géopolitique de la Biélorussie est importante pour le Kremlin. Le président Loukachenko, qui a été très fortement contesté à l’été 2020 par ses opposants dans le pays, qui estimaient que sa réélection était frauduleuse, doit jouer l’équilibriste sur tous les tableaux.

En interne, il est en en train d’accentuer la répression contre ses opposants - avec de nombreux procès en cours, dont celui de la femme qu’il a affrontée en 2020 au scrutin présidentiel, Svetlana Tikhanovskaia. Une tentative, sans doute un peu vaine, de museler définitivement toute voix discordante, deux ans et demi après ces immenses manifestations qui avaient donc failli le déloger.

Un soutien à la Russie essentiel à son maintien au pouvoir

Vis-à-vis de Moscou, Loukachenko joue un jeu habile, mais dangereux avec le grand frère russe. Au pouvoir depuis 1994, Alexandre Loukachenko s’est toujours présenté comme un proche allié de la Russie. Du coup, il a cherché à conserver des relations étroites, mais pas exclusives, avec Moscou. Depuis l’été 2020, et encore plus depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, tout a changé : pour avoir abrité sur son sol les troupes russes qui ont lancé la pitoyable offensive éclair contre Kiev, la Biélorussie a subi des sanctions européennes et occidentales.

Aujourd’hui, en tout cas, Loukachenko sait que le soutien russe est essentiel à son maintien au pouvoir. Mais il sait aussi que faire entrer son pays en guerre contre l’Ukraine menacerait tout autant son fragile pouvoir en risquant de réveiller la colère de son peuple. D’où cet exercice d’équilibriste auquel il se livre. Sous forte pression de Vladimir Poutine, qui a même fait le déplacement à Minsk très récemment.

Les Russes voudraient obtenir un engagement plus concret de Minsk dans le conflit qui l’oppose à Kiev. Ou alors, il s’agit d’un leurre, la Russie faisant croire aux Ukrainiens que la prochaine offensive d’envergure contre le nord de l’Ukraine, viendra du même endroit que l’an dernier, le territoire biélorusse.

De nouveaux exercices militaires conjoints

Quoi qu'il en soit, la question reste posée : la Biélorussie, qui vient de débuter avec la Russie de nouveaux exercices militaires conjoints, est-elle un simple complice de Moscou ou se prépare-t-elle, contrainte et forcée, à s’impliquer davantage dans le conflit ? Question sans réponse pour l’instant.

Il ne faut jamais oublier que politiquement et diplomatiquement, les deux pays se tiennent par la barbichette : Moscou tient à cette alliance qui fonctionne encore avec un pays de l’ex-espace soviétique. Loukachenko, pour se maintenir au pouvoir et faire diversion, a besoin d’entretenir le suspense sur sa participation directe ou pas dans le conflit ukrainien. Une drôle d’alliance, pour le meilleur. Ou peut-être, pour le pire.

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