Le monde en questions

La paix mondiale selon Pékin

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Tout juste réélu pour son troisième mandat le président chinois multiplie les offensives diplomatiques à travers le monde. Cela signifie-t-il que le monde entre dans une nouvelle ère géopolitique ? 

Le président chinois Xi Jinping et son holologue russe Vladimir Poutine, au centre se retirent après leur dîner au Palais des facettes du Kremlin de Moscou, en Russie, le mardi 21 mars 2023.
Le président chinois Xi Jinping et son holologue russe Vladimir Poutine, au centre se retirent après leur dîner au Palais des facettes du Kremlin de Moscou, en Russie, le mardi 21 mars 2023. AP - Pavel Byrkin
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L’image est forte et va bien au-delà de l’opération de communication diplomatique : Vladimir Poutine qui raccompagne son homologue chinois à sa voiture au terme d’une visite d’État dans la capitale russe et Xi Jinping qui lance en lui serrant la main « ce que nous venons d’initier ensemble sont les transformations les plus novatrices depuis un siècle ! » Comprenne qui pourra, mais cette sortie ne pouvait faire plus plaisir à son hôte russe isolé sur la scène internationale et visé quelques jours plus tôt par un mandat d’arrêt pour crimes de guerre dans la déportation d’enfants ukrainiens. Un Vladimir Poutine aux anges qui s’est même avoué « un peu jaloux » des succès de son nouveau parrain chinois. Très clairement, Xi Jinping n’est plus dans la neutralité ambiguë et équivoque affichée depuis le début de la guerre en Ukraine. Outre la livraison d’armes, dont des drones armés derniers cris, Pékin a offert son soutien et son amitié durable à son partenaire russe, quitte à mettre une partie du monde dans l’embarras, Washington au premier chef, déstabilisé par l’impressionnante montée en puissance de la diplomatie chinoise assortie d’un discours quasi civilisationnel fustigeant ouvertement l’hégémonie occidentale.

Fort de quelques succès, Xi Jinping ne s’embarrasse plus avec les faux-semblants

Alors que le chef de la diplomatie chinoise Wang Yi multipliait, depuis plusieurs mois, les voyages à travers la planète, l’annonce surprise du rétablissement des relations le 10 mars entre l’Iran et l’Arabie Saoudite, grâce à la médiation de Pékin, a permis de confortablement installer Xi Jinping sur le devant de la scène internationale, tout en offrant une bien opportune porte de sortie à l’Iran sous sanctions. Une médiation qui suscite quelques espoirs au Yémen, en Syrie ou au Liban, prisonniers depuis tant d’années de la guerre par procuration que se livrent les deux puissances du Moyen-Orient.

Mais c’est aussi et surtout un formidable pied de nez diplomatique à Washington battu dans son propre pré-carré moyen-oriental, la Chine hissant l’étendard d’une paix inédite dans un nouvel ordre mondial mené par Pékin et les pays du Sud. Une démondialisation à la chinoise ou encore une désoccidentalisation des relations internationales. Au-delà de la tentation de la nouvelle voie chinoise, beaucoup d’experts questionnent la diplomatie d’opportunités, au coup par coup de Pékin, qui balaie dangereusement toute forme de multilatéralisme au profit de sa propre montée en puissance et celle, bien entendu, constitutionnellement illimitée en Chine du président Xi Jinping.

►À lire aussi : La visite de Xi Jinping à Vladimir Poutine à Moscou, coup de pouce et médiation

Si certains pays comme la Russie acceptent une forme de vassalisation de Pékin, beaucoup d’autres hésitent

Sur sa lancée russe, le président chinois a formellement convié les dirigeants de plusieurs anciennes nations de la sphère soviétique au premier sommet Chine-Asie centrale en mai à Pékin. Afrique, Proche-Orient, Asie et même Amérique du Sud. Les Européens sont quant à eux contraints à une périlleuse diplomatie de la ligne de crête dans cette guerre d’influence que se livrent Washington et Pékin sur fond de dépendances énergétiques, d’alliance stratégique et de bouleversements mondiaux.

Aussi la position inconfortable du président français, Emmanuel Macron qui doit se rendre en visite officielle dans la capitale chinoise début avril. Succédant au chancelier allemand en novembre qui, en dépit des critiques à peine voilées, avait répondu que Pékin était tout simplement incontournable.

La Chine, faiseuse de paix ? Ce n'est pas exactement l'avis dominant à Taïwan. Quant au président ukrainien Volodymyr Zelensky, il a annoncé mardi dernier avoir proposé à Pékin de devenir un partenaire pour le règlement du conflit. Cette fois, Xi Jinping n’a pas répondu et n’a pas tendu la main.

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