Lignes de défense

Loi de programmation militaire 2024-2030: l’épineuse répartition des crédits

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Le projet de Loi de programmation militaire (LPM) français pour la période 2024-2030 a été présenté en Conseil des ministres le 4 avril. Sur fond de retour de la guerre en Europe, il prévoit des hausses annuelles sans précédent de 3 à 4 milliards d’euros du budget des armées. Cependant, le ministère des Armées admet avoir priorisé certains programmes d’armements au détriment d’autres. Cette LPM ne sera donc pas synonyme de massification des armées.

Avec la Loi de programmation militaire français 2024-2030, le passage au «tout Rafale» dans l'armée de l'air et de l'espace serait décalé à l’horizon 2035.
Avec la Loi de programmation militaire français 2024-2030, le passage au «tout Rafale» dans l'armée de l'air et de l'espace serait décalé à l’horizon 2035. REUTERS
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Avec un budget XXL de 413 milliards d’euros sur six ans, l’armée de terre espérait obtenir plus de chars. Ce ne sera donc pas le cas. Même le programme de renouvellement des blindés médians actuellement en route ne sera pas achevé en 2030. La situation est identique dans l’armée de l’air où le passage au tout Rafale est décalé à l’horizon 2035.

Alors comment se fait-il qu’avec autant d’argent, les armées ne grossissent pas, se sont interrogés les membres de la commission de la Défense, le 5 avril lors de l’audition à l’Assemblée nationale du ministre des Armées. Sébastien Lecornu leur répond : « Vous avez, dans ces crédits, des crédits qui vont être consommés rapidement pour des effets immédiats. C’est assez vrai par exemple pour le renseignement, c’est assez vrai pour certains achats de munitions. Et puis vous allez avoir des crédits de paiement pour des effets dont vous ne verrez rien pendant cette LPM. Exemple le plus visible, le plus évident, c’est le futur porte-avions de nouvelle génération. C’est de la construction et donc ça n’aura pas d’effets militaires immédiats. Il y a des réalités qui tiennent à la vie des programmes, c’est la réalité du physique. C’est comme ça ! »

Nouveaux champs de bataille

La réalité, c’est aussi qu’une large partie du budget sera absorbée par la rénovation des vecteurs de la dissuasion nucléaire. Des crédits largement destinés également au renseignement. Pour rester dans la course, il faut financer des sauts technologiques très coûteux, pointe Thomas Gassilloud, président de la commission de la Défense à l’Assemblée : « On doit faire face à de nouveaux combats, dans de nouveaux espaces où il faut être présent, notamment le cyber, l’espace exo atmosphérique. Et donc il ne s’agit pas seulement de gagner en muscle, mais d’être présent également sur de nouveaux champs de bataille où la guerre de demain se joue également. Surtout, il faut des moyens pour analyser les informations gigantesques qui arrivent puisqu’on a des capteurs de plus en plus nombreux et précis et donc on a besoin également d’intelligence artificielle pour faire parler ces masses de données et en tirer une information utile pour nos décisions politiques. »

Une menace plane cependant sur ces crédits militaires : l’inflation. Si la crainte de voir la flambée des prix rogner les budgets de défense est réelle, dit le député Jean-Michel Jacques rapporteur de cette LPM, ce risque n’a pas été oublié : « Effectivement, l’inflation est là. Maintenant, si on regarde dans les rétroviseurs, on le voit bien, d’autres gouvernements ont fait face à des inflations. Je pense aux années 1950 et 1960 et nous avons tout de même décidé dans ces périodes de nous doter de l’arme nucléaire et ça s’est fait. Ce que j’ai pu constater dans ce projet de Loi de programmation militaire, c’est que cette inflation est prise en compte à hauteur de 30 milliards d’euros, ce qui est vertueux. Bien entendu, le Parlement devra rester vigilant. Si l’inflation devait être plus lourde, il faudrait adapter les budgets militaires en conséquence. »

Avec 413 milliards d’euros, assure Sébastien Lecornu défendant son budget, il n’y a rien de trop dans la future Loi de programmation militaire, bien conscient du fait que la répartition de ces sommes n’a pas fini de faire grincer des dents sous les képis.

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