Un hiver trop doux provoque un développement précoce des cultures

En Afrique, en Amérique latine, des records de chaleur sont battus. Un rapport de l’ONU confirme que l’année 2023 a établi de nouveaux records. Et il y a une forte probabilité que 2024 affiche à son tour des températures inégalées. La France n’échappe pas à la règle. Il faisait 25 degrés dans le sud du pays il y a quelques jours. Cet hiver particulièrement doux a des conséquences sur la floraison de toutes les espèces végétales.

Un officier de l'Office national des forêts (ONF), examine une forêt d'épicéas dans le nord-est de la France. En raison du réchauffement climatique, certaines espèces végétales ne peuvent plus s'épanouir dans leur environnement d'origine. JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN/AFP

Les agriculteurs et les climatologues restent sans voix ! Dans le sud de la France, la floraison des abricotiers et des pêchers a deux semaines d’avance. Celle des pruniers et des cerisiers, plus d’un mois. Traditionnellement, cette floraison débute fin mars, à une période où le risque de gel diminue. C’est le problème de cette floraison précoce, elle intervient alors que les risques de gel sont encore très importants. Or, un bourgeon fermé peut résister à une température de -20 degrés. Un bourgeon ouvert à seulement moins deux degrés. Une forte gelée peut donc lui être fatale. Mais la douceur de l’hiver pose un autre problème. Pour se développer, les végétaux ont besoin d’une période de froid. Serge Zaka est agro-climatologue : « Les végétaux, notamment en arboriculture et en viticulture, ont besoin d’une période de vernalisation. La vernalisation, c’est le besoin en froid qui induit la floraison. Un pommier, par exemple, a besoin de 1 000 heures en dessous de 7 degrés, pour fleurir au printemps. S’il n’y a pas ce quota, la floraison est très lacunaire, il y a des problèmes de reproduction au niveau de la fleur, et donc des pertes de rendement très conséquent, de l’ordre de 80 à 90% de la production. »

Un hiver doux favorise l’émergence de maladies chez les végétaux

Le gel limite le risque de pathologie, en éliminant les insectes et les champignons, qui en sont le principal vecteur. Mais quand le temps est humide et doux, comme actuellement, il y a un risque de prolifération de ces maladies sur des plantes déjà affectées par le manque de froid. C’est ce qu’on appelle la théorie du boxeur : à force de coups répétés, la végétation finit par être fortement fragilisée. Pour Serge Zaka, la chute des températures en France, dans les jours qui viennent, entraînera inéluctablement des pertes de biodiversité. Mais pas de façon aussi dramatique qu’en 2021. Cette année-là, la France avait connu une des pires catastrophes agricoles depuis 1945. Le mois de mars avait été particulièrement chaud, avant de fortes gelées début avril, il avait fait -7 degrés, ce qui avait ravagé les récoltes. Mais la répétition de ces phénomènes climatiques va nous obliger à nous adapter selon Serge Zaka : « Le climat méditerranéen se déplace vers le nord. Le climat aquitain se déplace vers le bassin parisien. Les limites climatiques évoluent donc les arbres qui sont toujours implantés au même endroit, puisque eux ne bougent pas, connaissent des floraisons précoces qui sont symptomatiques du fait qu’ils ne sont plus dans la zone climatique dans laquelle ils ont prospéré. Donc l’objectif, c’est de planter des espèces du sud, vers le nord, pour qu’ils se retrouvent dans le climat qui leur convient. Tout ça, en raison de l’évolution de ce qu’on appelle la biogéographie ! »

La biogéographie, une discipline à multiples facettes, qui s’intéresse à la distribution des organismes vivant sur terre et cherche à expliquer les raisons de leur répartition géographique.

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