Questions d'environnement

Y a-t-il assez d'innovations vertes dans le monde ?

Publié le :

Selon un récent rapport de l'Office européen des brevets, le Vieux continent caracole en tête des brevets déposés pour des nouvelles technologies dites « propres », suivi par la Chine. Mais le développement de ces innovations pourrait être de plus grande ampleur s'il n'était pas freiné par des difficultés d'accès aux financements. Mais y a-t-il suffisamment d'innovations vertes dans le monde ? 

L'Europe est à la pointe des technologies propres.
L'Europe est à la pointe des technologies propres. © Office européen des brevets
Publicité

Pas moins de 750 000 inventions liées à la décarbonation, à la dépollution de l'eau, aux alternatives aux plastiques ou encore à l'adaptation au réchauffement climatique, ont été brevetées en 25 ans dans le monde. Le nombre de ces brevets de la « cleantech » s'est donc étoffé depuis 1997. On note, en valeur absolue, une accélération depuis 2016 avec l'engouement autour de l'hydrogène ou des batteries, par exemple.

Baisse de la part du bas-carbone dans les innovations 

Pourtant, le rythme des innovations ne serait pas assez dynamique. Un rapport de l’OCDE s’en inquiétait l’an dernier. Le nombre de brevets pour les technologies climatiques a augmenté beaucoup moins vite que les autres au cours de la décennie 2010, respectivement de 0,3 % contre 4,6 % par an depuis 2012. Résultat : la part des innovations bas-carbone sur l’ensemble des inventions régresse, passant de 12,6 % en 2010 à 9 % en 2020. Exception faite des batteries, tout le secteur est touché, des énergies renouvelables aux mini-réseaux électriques en passant par le transport.

Or, au regard des préoccupations croissantes sur l'environnement, de la signature de l'accord de Paris en 2015, la tendance a de quoi surprendre. Plusieurs hypothèses peuvent l’expliquer.« Les prix du pétrole ont été assez faibles durant la dernière décennie », note Mohamed Bahlali, chargé de recherche en économie à l'Université Paris-Dauphine. Et dans ce cas, « les entreprises sont moins incitées à innover pour réduire leur dépendance aux énergies fossiles. » La deuxième explication « serait davantage liée aux politiques climatiques. On a observé un ralentissement durant la dernière décennie. Par exemple, c'est autour des années 2010 que les tarifs de rachat d'électricité renouvelable ont été réduits en Europe, y compris pour le photovoltaïque. »

Pari sur des technologies non matures

Toujours en ce qui concerne le photovoltaïque, la mainmise de la Chine sur le secteur a réduit la concurrence à la portion congrue. Des entreprises en difficulté, voire en faillite, ne constituent pas un bon terreau pour l’innovation. Or, les politiques d’atténuation du réchauffement climatique ont fait le pari de la technologie. Les analyses de l'Agence Internationale de l’énergie suggèrent que les objectifs climatiques ne pourront pas être atteints en déployant uniquement les technologies existantes. 35 % des réductions d'émissions nécessaires d'ici à 2050 seraient liées à des technologies qui ne sont pas encore matures. Signe que des progrès ont néanmoins été réalisés, en 2021, l'Agence internationale de l’énergie estimait cette part à 50 %.

Pour favoriser les innovations, Mohamed Bahlali a identifié plusieurs mesures possibles : « la taxe carbone sur les entreprises est un instrument assez efficace. À partir du moment où on met un prix sur le carbone qui est suffisamment élevé, elles réagissent assez rapidement en essayant de trouver des solutions qui permettent de réduire leur dépendance aux énergies fossiles. » Cela passe aussi par « des politiques climatiques plus ambitieuses, à la fois au niveau du soutien à la R&D et au déploiement de ces technologies vertes », recommande le chercheur. Certes, les plans de relance post-covid ont pu favoriser les aides à la recherche et développement. Mais, l'OCDE a appelé à pérenniser les efforts.

Ces difficultés illustrent en tout cas l'inquiétude autour du pari fait sur les technologies pour résoudre la crise environnementale. Un pari qui, aux yeux de certaines ONG notamment, détourne trop de la voie de la sobriété.

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes