Tunisie: dix ans après la révolution, le dynamisme des associations se confirme
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Depuis la révolution, le nombre d’associations a explosé en Tunisie, trois fois plus qu’en 2011. Dans un pays endetté et politiquement instable, ce maillage est une bénédiction. Une décennie après la révolution, la société civile tunisienne maintient le pays sous respiration artificielle.

De notre correspondante à Tunis,
Il est à peine 8 heures du matin et la journée a déjà été très longue pour Nabiha et son fils Rayan, 15 ans, atteint d’un cancer. « On s’est levés à 4 heures du matin. On a fait deux heures de route pour arriver jusqu’à Tunis. Mon fils a fait des analyses de sang et après on a dû attendre trois heures pour avoir les résultats. En tout, ces examens nous mobilisent heures d’affilée à chaque fois », raconte Nabiha.
En plus du soutien indéfectible de sa maman, Rayan peut compter sur ce qu’il appelle sa « deuxième famille ». Après sa séance de chimiothérapie, il se rend dans un foyer dédié aux enfants ayant un cancer et à leurs proches. « Je me sens bien ici. C’est ma deuxième chambre. Mon deuxième chez moi », dit le lycéen.
« Le Tunisien est généreux de nature »
Ce cocon, c’est Manel Gharbi qui l’a imaginé. Une cadre dynamique et heureuse jusqu’à la mort de sa petite fille d’un cancer en 2014. Endeuillée, elle cherche alors à sublimer sa douleur : « C’est un lieu d’échange. Ce qui est très important, c'est de voir d’autres expériences. De voir que tout passe finalement. Que la douleur passe, que la souffrance passe. La maladie aussi », explique la fondatrice de Dar Maram.
Tout ici provient de dons. Du terrain sur lequel a été édifiée la maison jusqu’au moindre livre, jeu ou objet de décoration. Pour Manel Gharbi, « le Tunisien est généreux de nature et quand il croit en votre cause, il donne sans limites. C’est cela qui est beau, c’est de pouvoir partager votre cause avec d’autres gens, c’est magnifique », souligne-t-elle.
De 8 000 à 24 000 associations en dix ans
Avant la révolution, les associations étaient uniquement 8 000 à opérer sur le territoire. Elles sont 24 000 aujourd’hui. Le monde associatif est en ébullition en Tunisie. Sur les antennes de Shems FM, une radio très en vue, une émission lui est même consacrée.
Ce dynamisme, les instigateurs du programme y voient une arme à double tranchant. « La société civile, c’est la concrétisation de la révolution en Tunisie et c’est ce qui garantit que la révolution ne diverge pas », pense Mohamed Hammami, animateur chez Shems FM. Mais pour Sofien Asta, représentant de la plateforme associative jamaity.org, « le fait de remplacer l’État, c’est un truc dangereux. » Ce à quoi Mohamed Hammami répond : « L’État doit prendre la responsabilité de régler les situations et les problèmes phares. Et les associations, ce n’est qu’un bras pour aider et renforcer l’État », soutient-il.
Alors que la Tunisie est fortement endettée, les associations jouent désormais un double rôle : vigies de la révolution, elles maintiennent aussi le pays sous perfusion.
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