Le comté de Garissa, dans le nord du Kenya, est parmi les plus affectés par la sécheresse qui frappe l’Afrique de l’Est. 70% des points d’eau y sont asséchés. Pour s’approvisionner en eau, les communautés dépendent de ravitaillements effectués par des camions-citernes, appartenant le plus souvent à des sociétés privées, qui facturent leurs services à coût exorbitants.

De notre envoyée spéciale à Garissa,
À l’entrée de la ville, on ne voit qu’eux. Des dizaines de camions-citernes peints en bleu… avec dessus cette inscription « eau propre ». Abdihussein Ali est indépendant et propriétaire de l’un ces camions. « J’attends qu’un client m’appelle pour aller lui livrer de l’eau », dit-il.
Non loin de là se trouve l’une des principales stations de pompage d’eau de la ville. Elle appartient à un Mohumed Aden, un opérateur privé, propriétaire d’une parcelle sur les rives du fleuve Tana. « J’ai une licence du gouvernement. Grâce à des moteurs, je pompe l’eau du fleuve, puis je remplis les camions d’eau. Et on me paie en échange... », explique Mohumed Aden.
La sécheresse suscite des vocations
À Garissa, la distribution de l’eau repose très largement sur ces opérateurs privés. Ce n’est pas nouveau, mais après deux années de sécheresse, c’est devenu un business florissant. « À certaines périodes, il y a tellement de demande que je peux rester trois jours sans dormir à pomper de l’eau, jour et nuit. Donc, avec la sécheresse, les affaires marchent bien. D’ailleurs, j’ai remarqué qu’il y a plein de nouveaux camions-citernes sur le marché », constate Mohumed Aden.
Plusieurs sources confirment que le nombre de particuliers qui ont décidé d’acheter leurs camions pour se lancer dans le commerce de l’eau a considérablement augmenté ces deux dernières années. Certains sont légaux, d’autres non. La sécheresse suscite des vocations.
« Pour remplir un camion de 10 000 litres, je demande environ 700 shillings kényans, avant, c'était 400, mais à cause du prix de l'essence, j’ai dû augmenter », poursuit Mohumed Adan. « À la revente, les propriétaires de camions demandent 3 500 shillings dans Garissa même, et jusqu’à 10 000 shillings en dehors de la ville ».
Des tarifs inabordables pour beaucoup
En réalité, ces prix ne sont pas réglementés. Teitas Mbuvi possède un camion-citerne et demande jusqu’à trois fois cette somme, lorsqu’il doit livrer à une centaine de kilomètres de Garissa. « Pour aller si loin, il faut beaucoup d’essence et puis il est possible que le camion ait besoin de réparation, donc mon prix couvre également les risques que je prends. »
Ces tarifs sont inabordables pour beaucoup. Omar Abdi, travaille pour l’autorité en charge de la gestion des ressources en eau. Il déplore ce système, tout en reconnaissant les lacunes du gouvernement. « Ils pratiquent des prix exorbitants. Mais les gens n’ont pas le choix », dit-il. « Vos animaux meurent de soif ? Vous achetez de l’eau à n’importe quel prix. Il n’y a pas d’alternatives, car le gouvernement n’a pas suffisamment de camions-citernes et parfois ils sont en mauvais état. »
Pour répondre à la sécheresse, le gouvernement, aidé par des bailleurs de fonds, a pourtant augmenté la quantité de ses ravitaillements eau, mais ils restent ponctuels et insuffisants.
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