Reportage Afrique

Côte d'Ivoire: les conditions de vie des femmes consommatrices de drogue [3/4]

Publié le :

Viols, prostitution forcée… Les usagères sont beaucoup plus vulnérables que les hommes et rencontrent des difficultés à s’en sortir nettement plus importantes.

Fatou Diabaté et Jean-Claude Amessan consommaient des stupéfiants pendant vingt ans, avant d'être pris en charge par le Casa.
Fatou Diabaté et Jean-Claude Amessan consommaient des stupéfiants pendant vingt ans, avant d'être pris en charge par le Casa. © RFI / Sidy Yansané
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De notre correspondant à Abidjan,

Au Casa d'Abidjan, viennent tous les jours des UD, des usagers de drogue, pour voir des médecins et prendre leur dose de méthadone. Viviane, 43 ans, est une habituée des lieux. Embrigadée dans la cocaïne et l’héroïne par un petit ami il y a 15 ans, elle a tout perdu : son bar, sa famille... Les relations avec son fils devenaient impossibles.

Seule, sans revenus, et comme de nombreuses UD, elle a dû vendre son corps pour payer sa drogue : « Il y a des jours où il fallait se prostituer. La journée comme la nuit. Il y avait des clients puissants. Il y avait des violences, des vols... C'était un calvaire. Même à la police, tu ne peux pas aller te plaindre, car tu es une prostituée. C'est vrai, j'ai la force, la volonté, le courage, mais avec la cocaïne et l'héroïne, c'est comme si tu as un serpent qui te tourne dans le ventre, il fallait forcément la fumer : c'est un démon. »

►À lire aussi : Côte d'Ivoire : la prise en charge et les soins apportés aux usagers de drogue

« Je suis toute seule dans mon coin »

À ses côtés, une autre usagère : 37 ans d’âge, 20 ans de consommation. Dans ses bras, son garçon de deux ans est très agité. À peine venu au monde, il présentait déjà des symptômes de manque :

« Quand Jean-Marc est en manque, il souffre, parce qu'il veut téter toute la journée ou toute la soirée. Si je l'en prive, il va commencer à me battre, il est dérangé, en plus il pleure », décrit-elle. « Comment je fais ? Je suis obligée parce que je n'ai personne, je suis toute seule dans mon coin. Je cherche une occasion pour le confier à quelqu'un, pour qu'il devienne une bonne personne, parce que je veux qu'il parte à l'école », espère la trentenaire.

Une prise en charge plus difficile pour les femmes

Les usagères sont beaucoup moins nombreuses que les hommes, mais sont beaucoup plus vulnérables, vivant sur les sites mêmes de consommation. Keïta Matina, ex-consommatrice et membre du groupe Phénix, qui lutte pour les droits des UD, constate que la prise en charge des femmes est nettement plus difficile.

Les garçons fréquentent plus les centres de santé par rapport aux femmes. En Afrique, une femme qui fume une cigarette est déjà perçue comme une personne qui n'a pas de morale. Donc, une femme qui consomme de la drogue, c'est encore plus compliqué. La difficulté est de retrouver les personnes qui sont sous traitements, qui ont des rendez-vous avec les médecins ; les accompagner dans les centres de santé. J'ai déjà eu une femme enceinte usagère de drogue qui devait aller au bloc [opératoire pour accoucher]. Elle devait faire une césarienne, mais elle ne voulait pas parce qu'elle était en manque. Elle voulait sortir et aller consommer.

Selon Médecins du monde, Les femmes représentent 10% des usagers de drogue en Côte d’Ivoire.

►À lire aussi : Usagers de drogues en Côte d’Ivoire : les fumoirs

►Retrouvez les autres épisodes de cette série :

Usagers de drogues en Côte d’Ivoire: les fumoirs [1/4]

Côte d'Ivoire: la prise en charge et les soins apportés aux usagers de drogue [2/4]

Côte d'Ivoire: les autorités changent d'approche face aux usagers de drogue [4/4]

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