Côte d'Ivoire: les autorités changent d'approche face aux usagers de drogue [4/4]
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Habituellement axée sur la répression pour lutter contre la drogue, la loi ivoirienne vient d’évoluer et donne de la place à un volet médical et de prise en charge des usagers. Un progrès qui découle de plusieurs actions de plaidoyer de la part des associations et ONG.
De notre correspondant à Abidjan,
Cet après-midi, une équipe de Médecins du Monde a rendez-vous dans un commissariat de la commune de Cocody pour présenter aux policiers l’action de l’ONG en faveur des UD, les usagers de drogue : « Nous avons dit qu'il y a un organisme qui travaille afin de soutenir les personnes usagères pour que, lorsqu'elles sont interpelées sur des sites, elles puissent être redirigées vers des personnes ressources », explique Samuel N’Guessan, éducateur pair à Médecins du Monde.
Il est déjà venu ici un soir pour plaider la cause d’un UD, arrêté suite à une descente policière dans un fumoir. Avec ses collègues, il revient pour forger une entente formelle avec les forces de l’ordre. Après une bonne heure de discussion, il en ressort satisfait. « La commissaire du commissariat nous a fait comprendre qu'elle-même travaille aussi comme nous pour qu'on puisse permettre [aux usagers de drogue] de pouvoir en sortir. Donc c'est un entretien qui a été très positif », relativise Samuel N’Guessan.
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Changer la perception des autorités face aux usagers de drogue
Cette campagne de sensibilisation est essentielle pour changer la perception des autorités sur les consommateurs de stupéfiants. Le chargé de plaidoyer de réduction des risques à Médecins du Monde, Jean Atta Kobenan, décrit une législation autant répressive qu’inefficace :
La simple consommation de drogue correspond à une peine de un à cinq ans. Régulièrement ils sont vus comme des voyous, des voleurs, des braqueurs... Si aujourd'hui ils sont vus comme des personnes malades, l'État va certainement jouer son rôle pour que, au lieu de les envoyer en prison, on va les envoyer dans les hôpitaux dans le but de les soigner.
Le plaidoyer a porté ses fruits. Avec l’appui du Comité interministériel de lutte anti-drogue, la loi a évolué cette année et intègre désormais un volet médical. Depuis plus d’un an déjà, le ministère de la Santé a autorisé le Centre d’accompagnement et de soins en addictologie d’Abidjan, à prescrire de la méthadone aux usagers, un produit de remplacement aux opiacés les aidant à se défaire de leur addiction.
► À lire aussi : Côte d'Ivoire: la prise en charge et les soins apportés aux usagers de drogue
Des consommateurs toujours stigmatisés par la population
En attendant sa généralisation, le directeur du Programme national de lutte contre le tabagisme, l’alcoolisme et la toxicomanie, le docteur Ernest Zotoua, rappelle qu’un protocole de prise en charge est en place : « Qu'est ce qu'un infirmier dans un village peut apporter comme aide à l'usager de drogue, et ainsi de suite, au niveau de l'hôpital de référence du district ou du département, qu'est ce qu'on peut faire ? Partout où l'usager de drogue se retrouve en Côte d'Ivoire, il peut aller dans n'importe quel centre de santé et puis recevoir une aide », souligne le directeur.
Pour Médecins du Monde, le prochain défi sera de changer les mentalités de la population, qui a encore tendance à stigmatiser les usagers de drogue.
► À lire aussi : Côte d'Ivoire: les conditions de vie des femmes consommatrices de drogue
►Retrouvez les autres épisodes de cette série :
Usagers de drogues en Côte d’Ivoire: les fumoirs [1/4]
Côte d'Ivoire: la prise en charge et les soins apportés aux usagers de drogue [2/4]
Côte d'Ivoire: les conditions de vie des femmes consommatrices de drogue [3/4]
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