Madagascar: Sexy Expédition Yéyé ou l'art de magnifier la vie quotidienne et les rites
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Ses tableaux sont des explosions de couleurs, de matières, et de senteurs parfois. Myriam Merch, alias « Sexy Expédition Yéyé » est une artiste touche à tout, qui puise dans la nature et la culture de son pays d’adoption, une inspiration qu’on croirait sans limites. Des œuvres hybrides, de style figuratif, dans lesquelles cette native de Belgique - qui a vécu presque la moitié de sa vie sur la Grande Île, à Tamatave réussit à magnifier chaque scène banale du quotidien. Ses tableaux sont reconnaissables entre mille, car tel un clin d’œil, - une obsession dira-t-elle – l’artiste prend soin d’y représenter systématiquement son animal fétiche.

De notre correspondante à Antananarivo,
Échange d’impressions entre un visiteur et l’artiste, un jour d’exposition :
« Moi, j’aime beaucoup cette pièce. »
« Ça, c'est de l’écorce de Ravinala (aussi appelé Arbre du voyageur, l’emblème de Madagascar, NDLR) »
« En plus, il y a une espèce de désaturation de la couleur. »
« Oui, c’est ça qui est intéressant de travailler sur le bois brut. Ça absorbe… J’aime le son, le mouvement et l’odeur, aussi, il y en a qui sentent la cannelle. »
La nature a toujours fasciné Myriam Merch. Mais son histoire d’amour avec Madagascar tient à un coup de cœur, pour un animal, découvert dans une tablette de chocolat dans les années 1960. « Quand j’étais petite, je collectionnais les images Côte-d'Or Chromo, raconte-t-elle. J’avais flashé sur ce petit lémurien et je regardais toujours cette image. Et quand j’ai été plus âgée, à la trentaine, j’ai retrouvé ma collection et j’ai été happée par cette image qui a fait resurgir des souvenirs intenses, qui m’a attirée vers Madagascar. À partir de ce moment-là, je me suis dit ''J'intègre les lémuriens dans mes œuvres, et j’irai à Madagascar les voir.'' Je suis partie pour trois mois, et me voici, ça fait 28 ans. »
Vingt-huit années passées à parcourir l’île. Fascinée par ses rencontres. Happée par un mode de vie aux antipodes de celui qu’elle connaissait.
« J’ai toujours adoré les atmosphères de petites lumières, poursuit l'artiste. Il n'y a presque pas d’électricité ici, j’aimais bien... J’ai tout de suite été dans une ambiance familière, c’est très étrange. Et ce rythme de vie où l’on se pose, on résout le problème, on ne s’énerve pas et où finalement les choses avancent et se font très bien, je me disais ''C’est nous qui sommes dans le faux !''. J’ai vraiment eu un coup de foudre pour cette manière de vivre... De même que cette atmosphère de récup, je l’ai intégrée dans mes œuvres. Ça a modifié ma vision de la vie. Et forcément, ça a modifié mon art. »
Un art libre, vif et joyeux, profondément respectueux des traditions
Son art résonne comme un hommage aux cultures plurielles de l’île. À l’instar de cette œuvre intitulée « Savatra » que l’artiste commente pour nous.
Là, c’est une scène dans un village. J’ai essayé de représenter leur mode de vie. Ici, ils se réunissent sous le tamarinier, parce qu’il y a beaucoup de soleil. Tu as toujours des zébus qui se baladent. Au loin, tu as de grandes étendues, et il y a toujours un baobab quelque part. Il y a le sisal, et l'aloès. J’ai présenté d'abord les choses essentielles dans le pays. Et puis la musique. Il y a forcément leurs traditions musicales avec leurs instruments et leurs danses. Là, tu as le xylophone à jambe. La femme met les bois sur ses jambes. Et puis tu as les cabosses de toutes les sortes. C’est ça que j’adore dans le Sud, ce sont les dissonances, c’est magique. Et après, tu as forcément des lémuriens. Là, tu as le maki. Je les interprète à ma manière, mais ils font partie de la vie, ils sont là, présents. Ils représentent la liberté, le lien avec la nature. Parce que ce qui est magnifique dans les traditions, et dans les villages en Androy, c’est qu’ils vivent toujours en harmonie avec la nature. Ils ne la détruisent pas, ils la respectent, la valorisent. Moi, je rends ça très bucolique, j’aime les choses joyeuses. Je le montre comme je le sens. Ce qu’ils me renvoient, je leur renvoie à mon tour, en amplifiant les couleurs, et la joie de vivre.
Une sorte d’échange que Sexy Expédition Yéyé s’apprête à renouveler à nouveau en novembre, pour un périple à pied et en pirogue, en Androy.
► Ses toiles et sculptures sont exposées en ce moment dans la capitale, à la librairie Lecture et Loisirs.
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